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Après le confinement, les aidants sont exténués

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Epuisement, isolement, détresse. Après trois mois de pandémie, de crise sanitaire liée au coronavirus, la situation des proches aidants reste difficile. Alors qu’ils estiment n’avoir pas suffisamment été entendus par les pouvoirs publics, ils font part de leur ras-le-bol.

En France, 8 à 11 millions de personnes soutiennent un proche en perte d’autonomie pour des raisons liées à l’âge, à un handicap, à une maladie chronique ou invalidante. Soit environ un Français sur six dont le rôle est essentiel dans le système de santé. Et il a été encore plus crucial durant la crise sanitaire. Pourtant, ces aidants familiaux se sont retrouvés bien seuls, en première ligne, pour prendre soin de leurs parents ou conjoints fragilisés par la maladie, le handicap ou le grand âge. « Nous avons été oubliés, déplore Brigitte Patin, porte-parole de la Fédération nationale des aidants et accueillants familiaux (Fnaaf). Les pouvoirs publics se sont dit que, étant à domicile, nous ne risquions rien. Malheureusement, nous avons été englobés dans la généralité du confinement sans tenir compte de la spécificité de chacun. » « Les pouvoirs publics n’ont jamais pris en compte les aidants. Personne n’a parlé de nous, surenchérit Claudie Kulak, présidente du collectif Je t’aide. Dès le début du confinement, nous avons écrit au ministre de la Santé en demandant qu’ils ne soient pas exclus des procédures de soutien. Mais ni le Premier ministre, ni le ministre de la Santé, ni la secrétaire d’Etat au handicap n’ont parlé d’eux. Pas une seule fois. »

Les collectivités locales mobilisées

Celle qui est aussi présidente de l’association La Compagnie des aidants trouve toutefois un motif de satisfaction : « Un certain nombre de collectivités se sont mobilisées, ont pris en considération la situation des aidants. Il y a eu des initiatives locales à souligner. Des acteurs de terrain n’ont pas attendu les directives étatiques pour prendre des initiatives. Les villes et les départements notamment ont été extraordinaires. » Une reconnaissance et une prise en charge non négligeables, car durant cette crise le rôle des aidants a évolué. « On leur a demandé de jouer le rôle de professionnels du “care” sans être formés, confirme Claudie Kulak. Quand vous récupérez un proche amputé des deux jambes et qu’il faut le transférer du lit au fauteuil, qu’il faut changer les draps… Ce sont des gestes qui s’apprennent… »

Un rôle de soignant d’autant plus difficile à tenir que les aidants sont souvent parents, avec leurs enfants à domicile et que nombre d’entre eux ont continué à travailler. Ce qui a engendré des situations plus que complexes. « Une fille qui récupère son père atteint de la maladie d’Alzheimer et qui doit continuer à télétravailler avec quelqu’un en pleine crise de démence, c’est impossible », donne pour exemple Claudie Kulak. « Pour arriver à jongler entre notre activité professionnelle et la prise en charge du proche, il nous faudrait des journées de 32 heures pour s’en sortir, pour réussir à tout faire, se désole Brigitte Patin. On ne soupçonne pas à quel point la situation est parfois chaotique et grave. »

Pour la porte-parole de la Fnaaf, les difficultés rencontrées pendant la pandémie ne sont que le reflet du manque de considération de leur action. « La crise a été un miroir grossissant de l’absence de reconnaissance du statut de l’aidant », assure-t-elle. Car au niveau législatif, peu de textes encadrent le rôle de l’aidant. Une loi adoptée en décembre 2015 a instauré un « droit de répit » pour ceux qui s’occupent de seniors. Mais c’est à peu près tout. Un plan « Agir pour les aidants » en date d’octobre en 2019 propose bien que les aidants actifs puissent bénéficier d’un congé payé de trois mois. Il est censé entrer en vigueur à partir d’octobre 2020. Mais va-t-il bel et bien être appliqué ? Claudie Kulak en doute fortement : « Je pense que le gouvernement va nous dire que la crise a fait perdre trois mois, que les services de la CPAM n’ont pas pu se préparer et qu’il va donc falloir reporter à 2021. Ils avaient prévu 400 millions d’euros pour financer le plan, avec une grosse partie pour le répit. Ils vont nous dire qu’ils n’ont plus d’argent. Or nous ne pouvons plus attendre. » Et de menacer : « S’ils veulent des aidants jaunes [une référence aux “gilets jaunes”, ndlr], ils vont les avoir ! Nous en avons ras-le-bol ! Si le système de santé a tenu le coup, c’est aussi grâce à la mobilisation des aidants. Sinon, on aurait vécu une catastrophe sanitaire beaucoup plus importante. »

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