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« Le premier Skype de braille »

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« Télétravailler avec des élèves déficients visuels pourrait paraître paradoxal. Pourtant, après deux semaines de tâtonnements, le confinement étant parti pour durer, il convenait de trouver comment déjouer le temps et comment renouveler en un clin d’œil nos pratiques. Par bonheur, les collégiens aveugles que j’accompagne dans mon Ulis [unité localisée pour l’inclusion scolaire] sont de vrais geeks. L’idée de les convier simultanément à une séance de Skype germe assez vite alors qu’une avalanche de travail s’abat sur mon assistante et sur moi : transcriptions et adaptations en gros caractères, en braille, programmations mathématiques au format compatible avec le bloc-notes braille des élèves… Chacune travaille sur un portable et envoie par mail aux élèves les documents adaptés. Pour les dessins en relief que nous pourrions réaliser, impossible de les thermogonfler depuis nos domiciles. On abandonne l’idée et on revient à la bonne vieille description de l’iconographie indispensable à la compréhension du cours. Et puis, les parents, eux aussi en télétravail, se mettent à s’adapter un peu, entre deux “conf calls”… De mon côté, tout en veillant sur mes propres enfants, le travail de coordination à distance est énorme : réfléchir avec les familles à l’orientation, aux projets individuels des élèves, les rassurer, harmoniser ce que l’on fait avec les partenaires, se concerter avec les équipes pédagogiques débordées par la situation et déroutées par l’usage exclusif des écrans.

Alors vient le premier Skype de braille abrégé avec mes élèves aveugles. C’est un bonheur de les retrouver, et de les interroger à tour de rôle sur les extraits du Club des incorrigibles optimistes que je leur ai préparés. Les cafouillages sonores épuisants, les désynchronisations et les hurlements de fond des petits frères impliquent plus de rigueur qu’en présentiel. Ils aiment – nous aimons – ce moment, qui devient hebdomadaire. Avec mes élèves malvoyants, le partage d’écran permet de les guider dans leur PC, afin de les mener à plus d’autonomie, en leur apprenant à remanier eux-mêmes des documents pour se les rendre accessibles, à se retrouver dans la plateforme labyrinthique où ils doivent récupérer et poster leur travail. Et il y a ceux qui sont moins bien équipés, ceux qu’on a peur, un temps, d’avoir « perdus », et qui, un jour, répondent à nouveau et acceptent de travailler, par téléphone. On se réjouit de parvenir à préserver avec eux le fil même le plus ténu. »

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