Sexualité : les « handi » et les « pro »

La sexualité des personnes en situation de handicap, voilà un sujet qui fait débat depuis des années. Partout, dans les magazines, les conversations, les histoires d’amour, les rencontres sur des sites dédiés, l’accumulation des expériences, les pratiques sont décrites, commentées, analysées. Mais quid de la vie amoureuse et sexuelle de celles et ceux vivant avec une déficience ? La question est longtemps restée silencieuse. En 1996, elle a été abordée pour la première fois par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) à la suite de demandes de stérilisation des personnes souffrant d’un handicap mental par les familles ou les établissements. En février dernier, le même CCNE était amené à plancher sur l’accompagnement sexuel des personnes handicapées. Un sujet qui déchaîne les passions le temps d’une médiatisation puis retombe aussi vite aux oubliettes, malgré les bonnes intentions, les colloques, la mobilisation d’associations ou de collectifs. La réalité est, quant à elle, plus brutale : les enquêtes montrent que les personnes en situation de handicap ont beaucoup moins d’expériences sexuelles et d’unions que la population valide. C’est encore pire pour celles vivant en établissements, pour lesquelles « les entraves à l’intimité sont davantage inhérentes à la vie en collectivité qu’à la dépendance », comme l’évoquent différents témoignages. De leur côté, les professionnels conviennent d’empêchements liés à l’institution, mais ils pointent la grande demande sexuelle des personnes dont ils s’occupent. Une sollicitation qui se manifeste surtout au moment de la toilette, vécue comme menaçante. L’auteure analyse la nature de cet écart entre ceux qui sont hébergés dans les structures médico-sociales et ceux qui y travaillent. Une distorsion qui met en avant le poids des espaces clos, de l’impensé, des préjugés, de la solitude, de l’humiliation… pour les personnes en situation de handicap désireuses d’accéder à une vie amoureuse et sexuelle.