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La « réserve sociale » des étudiants inquiète

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L’appel du ministère des Solidarités et de la Santé au volontariat des étudiants pour venir en renfort des structures médico-sociales soulève des interrogations. Du bénévolat au CDD, son application est disparate selon les instituts de formation. Les intéressés dénoncent une forme de précarisation, dans un secteur en manque structurel de moyens.

Depuis les premières mesures de confinement et la mise à l’arrêt de la plupart des stages et des cours, des instituts de formation encouragent leurs étudiants en travail social à renforcer les établissements et services en manque de personnel face à la pandémie. Le 24 mars, la secrétaire d’Etat auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, Christelle Dubos, a défendu la constitution d’une « réserve sociale ». Les préfectures « font remonter les besoins des établissements et permettront de faire le lien avec les centres de formation », a-t-elle précisé dans un communiqué.

Le cadre juridique se traduit de manière hétérogène selon les régions. Le 20 mars, le préfet de région d’Auvergne-Rhône-Alpes a indiqué qu’il pouvait s’agir autant de bénévolat que d’un stage ou d’un contrat à durée déterminée (CDD). « Notre école nous a transmis un appel pour du bénévolat dans un foyer de vie », témoigne Hala Heddadi, en deuxième année du cursus d’assistante de service social (ASS) à l’Institut méditerranéen de formation (IMF) d’Avignon. Idem à l’Association régionale pour l’institut de formation en travail social (Arifts) de Nantes, où Céline Guillou, en troisième année d’éducation spécialisée, évoque une « offre de bénévolat dans un SIAO [service intégré d’accueil et d’orientation] ». « On nous a assuré que la direction ne nous transmettra que les offres de structures proposant des CDD », relaie à l’inverse Marjorie Leandri, en troisième année de formation d’ASS à l’institut régional du travail social (IRTS-IDS) de Canteleu (Normandie).

« Nous ne sommes pas que des travailleurs de l’ombre »

Le cabinet de Christelle Dubos répond que l’engagement doit se faire « dans un cadre juridique clair : stage ou CDD ». Ceci étant, un stage ne sera pas rémunéré si sa durée est inférieure à huit semaines. « Le confinement est reconduit de deux semaines en deux semaines : on imagine mal une structure signer pour un stage de plus de huit semaines », souligne Hugo Perlutti (1), en première année d’ASS à l’IFTS d’Echirolles. S’engager sans rémunération ? « Le social réclame des moyens depuis des années : accepter maintenant de faire du bénévolat, c’est ouvrir la boîte de Pandore », juge Marjorie Leandri. « Il faut un CDD a minima. Sinon, c’est de l’exploitation, estime Hugo Perlutti. Nous sommes certes dans une période de crise, mais le manque de moyens financiers et humains est structurel. »

Dans un communiqué signé par des dizaines d’étudiants et intervenants mais aussi par l’Association nationale des assistants de service social, le Comité de mobilisation des étudiants en travail social est clair : l’engagement « ne doit pas être synonyme de bénévolat ou de stage mais de CDD permettant une réelle rémunération ». Les signataires pointent par ailleurs le manque de garanties de protection sanitaire et demandent le maintien de la gratification des stages suspendus. La région Provence-Alpes-Côte d’Azur a annoncé, le 20 mars, une prime de 200 € pour les étudiants du paramédical et du médical mobilisés. Quid du travail social ? L’oubli fait bondir Hala Heddadi, étudiante dans la région concernée : « Le problème n’est pas que nous soyons appelés – cela fait partie de l’éthique de nos métiers. C’est le manque de reconnaissance. Après cette crise sanitaire, il y aura une crise du social… Nous ne sommes pas que des travailleurs de l’ombre. »

Valoriser l’engagement ?

Plusieurs écoles ont garanti que le volontariat serait valorisé. « Nous demandons aux instituts de formation de tenir compte de cette mobilisation des étudiants dans leur cursus », affirme de son côté le cabinet de Christelle Dubos. Les modalités restent à définir. « Nous sommes nombreux à avoir des engagements associatifs tout au long de l’année : pourquoi cet engagement-là serait-il valorisé ? », s’interroge néanmoins Hugo Perlutti. L’étudiant songe aux camarades de promotion qui « ne peuvent pas se porter volontaires en raison de problèmes de santé, ou parce qu’elles sont mères de famille », posant la question des inégalités sociales derrière le principe de valorisation.

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