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« Le lien dehors-dedans est primordial »

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Directeur de l’association Permis de ConstruireLudovic Dardenne dirige l’association nantaise Permis de construire, créée en 2010 avec pour objectif l’accompagnement de personnes sous main de justice vers l’insertion professionnelle et sociale. Elle souhaite s’implanter à Saint-Nazaire et Vannes en 2020, puis s’étendre sur les territoires nationaux en besoin.
Quelles actions mettez-vous en place en termes d’insertion professionnelle ?

Nous avons débuté en travaillant sur l’insertion professionnelle en détention, notamment par du coaching professionnel dans les quartiers de semi-liberté. Mais très vite, notre évaluation a montré qu’il ne fallait pas centrer notre action uniquement sur l’emploi, et l’ouvrir à d’autres champs. Certes, on trouve une place et une posture sociale par le travail… Mais il y a aussi l’insertion sociale, le bien-être corporel et psychologique. Aujourd’hui, nous mettons en place des parcours individualisés qui s’appuient sur ces quatre piliers. C’est ainsi que l’on met en place une insertion sociale utile et pérenne, dans laquelle l’insertion professionnelle a toute sa place. Souvent, les « pilotes » – notre terme pour désigner les personnes accompagnées – viennent nous voir avec l’objectif de trouver un emploi ou de reprendre des études. Or, en amont, il faut que toutes les étapes personnelles soient travaillées. Les personnes se retrouvent vite confrontées à leurs propres limites en termes de compétences. Nous sommes donc amenés à travailler avec elles la diction, la relation à l’autre, la gestion budgétaire…

Comment votre équipe s’adapte-t-elle à ce public « multi-carencé », et comment l’accompagne-t-elle sur toutes ces thématiques ?

La diversité des problématiques implique que notre équipe développe des compétences transversales. Pour réaliser nos objectifs, nous avons un professionnel pour chacun des quatre piliers. Notre équipe est constituée d’un travailleur social, d’une formatrice, d’une psychologue ainsi que d’une travailleuse sociale longtemps impliquée à Médecins du monde et experte en santé. Ces professionnels sont là quotidiennement, et accompagnent les « pilotes » dans la durée. Nous nous appuyons également sur des partenaires extérieurs apportant leur expertise : coach professionnel, « résoluteur » de conflits, médecin spécialisé en addic­tologie, comédien… L’une des priorités reste de développer les liens d’associations comme la nôtre avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP), mais aussi avec le monde entrepreuneurial en rassurant les employeurs. Il s’agit d’être collectivement unis dans la définition de l’insertion professionnelle – qui doit être globale – et d’être mieux coordonnés afin de bénéficier aux personnes.

Vous intervenez à la fois en prison et à l’extérieur : comment entrez-vous en contact avec les personnes, et quelles différences observez-vous entre ces deux environnements en termes d’insertion ?

Pour rencontrer les personnes, soit nous nous rendons au parloir, soit c’est le SPIP qui les oriente vers notre local, sous forme de permissions. Les familles nous contactent aussi parfois : beaucoup sont démunies, voudraient une attestation d’emploi pour qu’il puisse y avoir un aménagement de peine… Ceci étant, il reste nécessaire de centrer l’accompagnement sur la personne, pas sur ses proches. Notre force, c’est le temps d’accueil à l’extérieur. Le lien « dedans-dehors » est primordial. Travailler un projet d’insertion dedans, pourquoi pas… Mais la réinsertion se fait dans la société : plus l’accompagnement se fait au cœur de la réalité sociale, mieux c’est ! Une personne qui a des problématiques d’addiction, par exemple, s’y confrontera véritablement dehors. C’est là qu’elle appréhendera au mieux sa liberté au regard de ses difficultés.

Quel suivi proposez-vous une fois que la personne décroche un emploi ?

Nous nous arrêtons lorsque la personne estime qu’elle n’a plus besoin de nous. Lorsqu’elle trouve un emploi, nous pouvons agir de deux manières. D’abord, nous pouvons nous placer en tripartite avec l’employeur. Lorsqu’un employeur embauche un travailleur sous main de justice, il va l’aider à développer ses savoir-faire ; mais il n’est, la plupart du temps, pas formé pour l’aider à réappréhender les relations avec les collègues, gérer les problématiques annexes de logement ou les difficultés psychologiques. Quand je suis arrivé, certains « pilotes » se surinvestissaient dans leur emploi, faisaient des heures supplémentaires, et finissaient par craquer au bout de six mois… D’où l’importance d’assurer un suivi. L’autre aspect, nous l’appelons « le coup de pouce » : la personne pourra toujours nous appeler ou solliciter un entretien dès qu’elle en aura besoin.

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