« J’avais pris beaucoup de poids après le diagnostic. Mon corps était douloureux et lourd. Je pensais que plus personne ne pourrait m’aimer. » Après une longue errance médicale, Adeline a appris qu’elle avait un syndrome d’Ehlers-Danlos, qui lui cause fatigue musculaire, luxations, problèmes aux tissus conjonctifs… La même année, elle perd son « chéri », son travail, et ses parents déménagent loin d’elle. Elle sombre : « J’ai été au fond du trou pendant cinq ans, je ne sortais plus, je n’avais plus confiance en moi. » Et puis, techniquement, pour faire l’amour, toutes les positions ne sont plus possibles, et « il faut être vraiment très doux », indique-t-elle.
Après avoir envisagé de faire appel à un « escort », d’offrir son corps en échange de tendresse, Adeline trouve finalement des informations sur les assistants sexuels. Elle vérifie qu’elle est éligible. Même si elle peut se caresser elle-même, la réponse est « oui ». A l’époque, aucun professionnel n’exerce dans sa région. Elle sollicite donc le Lyonnais Fabrice Flageul (voir page 7) : « On a beaucoup échangé au téléphone pour commencer. J’étais stressée. Faire venir un homme chez moi alors que je vis seule. Et il est plus âgé… »
Le jour de leur rencontre, il commence par un massage. Elle se détend. Ils font l’amour. « Je pleurais, je lâchais prise. J’ai pu me reconnecter à mon corps, alors qu’il n’était plus touché que par des gants et des médecins. J’ai même ressenti des sensations jamais éprouvées jusqu’alors. » Son corps retrouvé, Adeline dit aussi avoir récupéré de la confiance en elle, de la fierté, admis que son corps n’était pas seulement « un fardeau mais qu’il pouvait aussi apporter du plaisir ». Elle note que l’assistant sexuel est là pour le plaisir de sa partenaire, non pour le sien. Elle s’amuse : « J’ai fait plus de progrès en deux séances avec Fabrice qu’en cinq ans de thérapie ! » Comment dès lors ne pas tomber amoureuse ? Elle convient que le risque est là, mais que son assistant sexuel a su mettre les distances, rappeler qu’il était là dans le cadre de son métier. Et le caractère payant de la prestation aide, également, à poser les limites. Adeline espère vite voir « changer les mentalités », pour ne plus s’entendre dire qu’elle fait appel à un prostitué : « C’est dégradant, et il s’agit de tellement autre chose… » Une autre chose qui lui a donné envie de prendre à nouveau soin d’elle, de draguer d’autres hommes. Avec succès : elle revendique un « sexe friend ». « Je vois encore Fabrice une ou deux fois par an mais progressivement, il s’effacera… » Un pas de plus dans la réappropriation de sa vie intime…