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Vie professionnelle et vie personnelle

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Les deux tiers des salariés sont insatisfaits ou très insatisfaits de l’équilibre entre leurs vies professionnelle et personnelle relève l’étude « Work Happy » du cabinet de recrutement Robert Half, publiée en mai dernier. A l’heure de la dématérialisation, des réseaux sociaux et du travail à distance, des règles de droit protègent la vie privée des salariés. Mais force est de constater que, dans la pratique, la frontière reste poreuse.
I L’encadrement juridique

En droit positif, deux grands textes protègent la vie privée du salarié : le code civil et le code du travail.

A. Les limites posées par le code civil

« Chacun a droit au respect de sa vie privée », lit-on dans l’article 9 du code civil. Mais il n’existe pas de définition juridique de la vie privée. Alors, comme souvent en pareil cas, ce sont les juges qui sont venus en préciser la nature juridique. La jurisprudence délimite les actes qui sont constitutifs d’atteintes à la vie privée et ceux qui ne le sont pas. S’agissant de la notion d’« intimité », la jurisprudence lui attache la vie sentimentale, la vie familiale, la situation financière, l’état de santé ainsi que les convictions politiques ou encore les croyances religieuses.

L’employeur a, par exemple, accès aux informations matrimoniales. Il a connaissance d’un mariage ou d’un pacte civil de solidarité (Pacs) et de l’existence ou non d’enfants. Il connaît la domiciliation, les dates de vacances, les éventuelles maternités des salariées. Avec le prélèvement à la source, il peut également avoir une indication financière plus poussée (si nous laissons de côté le taux neutre) sur les ressources d’un couple, il est également informé d’éventuelles saisies sur salaire. Tant qu’il en est fait un usage strictement limité et dans un but professionnel, sans porter atteinte à la personne, il n’y a pas de problème. Des informations relatives à notre vie privée sont portées à la connaissance de nos employeurs de notre plein gré. Nous donnons notre consentement en les communiquant. A charge pour lui de les protéger ensuite et de leur conserver leur caractère secret.

L’employeur a également connaissance de données à caractère médical. Il reçoit des informations de la médecine du travail ou des salariés eux-mêmes. Il s’agit souvent de restrictions apportées à des tâches afin d’assurer une meilleure santé au salarié. Dans la mesure où le but est de le protéger, la loi ne pose pas de limites, si ce n’est celle de la parfaite confidentialité. De la même manière, l’employeur peut être informé d’une situation de handicap. Le problème n’est pas qu’il en ait connaissance dès lors qu’il n’utilise pas cette information pour porter atteinte aux droits des personnes. La Cour de cassation veille sur la vie privée du salarié et utilise l’article 9 du code civil comme référence pour positionner son curseur (Cass. soc., 2 octobre 2001, n° 99-42942, Nikon).

B. La protection des droits et libertés fondamentaux du salarié dans le code du travail

Le code du travail prévoit des règles dédiées à la protection des droits et des libertés fondamentaux du salarié, au sein desquelles les juristes ont puisé une protection de la vie personnelle.

Ainsi, les articles L. 1225-16 à L. 1225-18 fixent des règles d’absence et de congés liées à la maternité. Ce code comporte également un ensemble de mesures qui favorisent l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes(1).

Le salarié, en qualité de personne, est de plus protégé contre toutes formes de discrimination. Nous pouvons notamment citer les articles L. 1132-1 et suivants du code du travail, qui fixent un cadre extensif au principe de non-discrimination. Nul ne peut porter atteinte à un salarié « en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français ».

Ces principes sont d’ordre public, c’est-à-dire que leur non-respect entraîne la nullité de la décision prise. Force est de constater que le législateur a pris en compte d’éventuels abus de l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.

Enfin, l’article L. 1121-1 du code du travail est le texte emblématique de la protection du salarié : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »

C. La protection par le contrat de travail

L’article L. 1121-1 du code du travail s’applique à tous les contrats de travail. Ce texte pose une règle générale qui permet d’y intégrer la violation de toutes les libertés et droits de la relation de travail. L’esprit du texte est de protéger les libertés du citoyen y compris dans le cadre des relations de travail. Concrètement, si un salarié s’estime atteint dans ses droits, il peut ester en justice afin de faire dire aux juges si l’atteinte est justifiée, ou non, en fonction de la tâche professionnelle à accomplir.

Le contrat de travail impose la fourniture d’une prestation de travail contre une rémunération. Le principe du contrat, en droit du travail français, repose sur le lien de subordination du salarié envers l’employeur. Faute de définition légale, la jurisprudence a défini cette notion en 1996. Ainsi, le « lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail » (Cass. soc., 13 novembre 1996).

L’employeur a donc le droit de surveiller le salarié dans le cadre de son travail, mais il a également l’obligation de respecter son droit à la vie privée. Le contrôle peut s’exercer sous trois conditions cumulatives :

• l’employeur doit tout d’abord justifier d’un intérêt légitime pour l’entreprise ;

• la surveillance doit être justifiée par la nature du travail à accomplir et proportionnée au but recherché (code du travail [C. trav.], art. L. 1121-1). De surcroît, s’il existe des instances représentatives du personnel, un comité d’entreprise ou un comité social et économique (CSE), le chef d’établissement a l’obligation de les consulter avant la mise en œuvre du dispositif de contrôle des salariés (art L2313-2 code du travail, art L2323-32 code du travail) ;

• enfin, les salariés doivent être informés des modalités de la surveillance avant que celle-ci ne soit mise en œuvre (C. trav., art. L. 1221-9).

En cas de non-respect de ces règles, l’employeur est pénalement responsable et encourt 1 an de prison et 45 000 € d’amende (Code pénal, art. 226-1). Le salarié pourra en outre agir devant le conseil de prud’hommes afin de demander le retrait de la mesure abusive. Tout réside donc dans l’art de trouver un juste équilibre entre les droits du salarié et les intérêts légitimes de l’employeur.

D. Le principe constitutionnel de non-discrimination

Le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, renvoie à celui de la Constitution de 1946 qui prévoit que « nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances ». Il est complété par différents textes que nous avons vus précédemment notamment par les dispositions du code civil et du code du travail. Le salarié, en qualité de citoyen, peut donc penser et croire ce qu’il veut sans risquer une sanction. Il n’en est plus de même si les croyances sont exprimées. C’est bien la croyance qui est protégée et non son expression.

E. La loi « El khomri » : laïcité, neutralité, lutte contre les discriminations et déconnexion

La loi « travail » du 8 août 2016(1), portée à l’époque par la ministre du Travail Myriam El Khomri, est allée plus loin encore dans la protection mais également dans les restrictions. Les dispositions légales de ladite loi sont intégrées dans le code du travail, notamment l’article 2 du chapitre 1, consacré à la refondation du code souhaitée par Emmanuel Macron. Après l’article L. 1321-2 du code du travail, il est inséré un article L. 1321-2-1 ainsi rédigé : « art. L. 1321-2-1.-Le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le principe de neutralité et restreignant ainsi la manifestation des convictions des salariés si ces restrictions sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché. »

Nous apprenons ainsi que les convictions des salariés sont certes protégées, mais leur expression et leurs manifestations peuvent être restreintes. Le règlement intérieur est l’arme de l’employeur pour ce faire. Il doit, subtilement et habilement, allier le respect des droits, libertés des salariés et l’intérêt de l’entreprise. La clause de neutralité doit être justifiée par un objectif clair. Il peut s’agir d’un lien avec un public dépendant et fragile en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou en services d’aide à domicile. Cette clause peut également être justifiée par des atteintes au droit de croire ou de ne pas croire, par l’égalité entre les femmes et les hommes ou, de manière plus générale, par des atteintes à la dignité et au respect de la personne humaine. Dans le secteur sanitaire et médico-social, il est impératif d’éviter tout risque de pratiques prosélytes ou de comportements qui exerceraient une pression sur des résidents, des bénéficiaires ou même encore sur d’autres salariés. Les publics pris en charge sont fragiles et/ou dépendants et doivent donc être protégés. Nous ne nous éloignons pas de la protection des salariés. Nous précisions que son expression peut passer par des restrictions afin de protéger d’autres sujets de droit. En outre, le chapitre 2 de la loi « travail » précitée est consacré au renforcement de la lutte contre les discriminations, le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Ce texte s’inscrit dans la veine du préambule de notre Constitution.

En plus de refondre le code du travail, la loi « El Khomri » avait pour but d’adapter le code à l’ère du numérique. C’est chose faite, notamment grâce à l’introduction du droit à la déconnexion à l’article 55. Il n’existe pas de définition de ce terme dans la loi. C’est aux entreprises que revient la mission de la définir, puisqu’elles ont l’obligation légale de rédiger une charte. A ce jour, il existe donc autant de définitions du droit à la déconnexion qu’il existe de chartes et d’entreprises. A l’heure où les téléphones et les ordinateurs professionnels entrent dans les foyers, la mission de protection est essentielle.

Ce droit est abordé dans le cadre de la négociation collective. En effet, dans les entreprises et structures dotées de représentants du personnel, la négociation joue un rôle de protection de la vie privée du salarié. Ainsi, les dispositions de l’article L. 2242-17, alinéa 7, du code du travail précisent que « la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail porte sur les modalités du plein exercice par le salarié de son droit à la déconnexion et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques, en vue d’assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale. A défaut d’accord, l’employeur élabore une charte, après avis du comité social et économique. Cette charte définit ces modalités de l’exercice du droit à la déconnexion et prévoit en outre la mise en œuvre, à destination des salariés et du personnel d’encadrement et de direction, d’actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques. »

F. La Protection par la négociation

A l’image du droit à la déconnexion, les structures dotées d’instances représentatives du personnel doivent, lors de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail, traiter de « l’articulation entre la vie personnelle et la vie professionnelle pour les salariés » (C. trav., art. L. 2242-17, al. 1).

G. Plusieurs normes juridiques protègent le secret de nos correspondances

L’article 8, alinéa 1er, de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH) intègre le secret des correspondances à la protection de la vie privée et familiale : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. » En droit national, la protection est assurée par le cumul de plusieurs textes : l’article 9 du code civil précité, les dispositions des articles 226-15 et 432-9 du code pénal, et enfin l’article 1er, de la loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances électroniques(1). Ce dernier énonce que « le secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques est garanti par la loi. Il ne peut être porté atteinte à ce secret que par l’autorité publique, dans les seuls cas de nécessité d’intérêt public prévus par la loi et dans les limites fixées par celle-ci. »

II La protection de la vie privée du salarié à l’épreuve de la réalité des faits

« Your employer is watching you ! » : cette formule de Grégoire Loiseau(2) prend tout son sens dans la jurisprudence actuelle, qui regorge de décisions sur la vie privée du salarié. En effet, l’encadrement juridique de la vie personnelle a beau exister, le développement des moyens de communication mobiles, l’instantanéité et les changements de comportements professionnels ont modifié notre rapport au travail. Dans les faits, les règles protectrices ne sont pas toujours simples à appliquer ou à faire appliquer.

A. L’employeur face à l’être et aux pensées de ses salariés

Les pensées et le physique du salarié lui appartiennent. Pourtant, l’employeur peut en avoir connaissance, et le salarié n’est pas aussi libre qu’il ne peut le penser.

1. Vie professionnelle et fait religieux

S’agissant des fonctionnaires, la question a été tranchée, et la Constitution de 1958 a posé le principe de laïcité dans le secteur public. Ainsi, la règle est claire : les salariés de la fonction publique ne peuvent pas manifester leurs opinions religieuses dans l’exercice de leurs fonctions.

S’agissant du secteur privé, ce que pense le salarié en matière de religion, autrement dit en ce qui concerne « le fait religieux », est encadré mais toujours sujet à controverse. L’article L. 1121-1 du code du travail affirme la règle selon laquelle « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». Il faut se remémorer ici l’affaire dite « Baby Loup », qui a dépassé le contentieux, pour poser l’emblématique débat de la laïcité dans les entreprises françaises.

En cause dans cette affaire, une directrice adjointe de crèche qui avait refusé de retirer son voile sur son lieu de travail. Dans un arrêt du 25 juin 2014, la Cour de cassation (Cass. ass. plèn., 25 juin 2014 n° 13-28369) a affirmé le principe de la liberté religieuse mais a autorisé l’employeur à la restreindre sous deux conditions : la restriction doit être justifiée au regard de la tâche à accomplir par le salarié et elle doit être proportionnée au but recherché. Ces conditions générales recouvrent des situations précises. Ainsi, l’employeur peut apporter des restrictions à la liberté religieuse pour le bon fonctionnement de l’entreprise ou encore pour des raisons de santé et de sécurité. Nous pouvons par exemple citer le port d’insignes religieux, qui ne doit pas entraver le port d’équipements de protection individuels (masques, lunettes de protection de bloc opératoire…). La délicate problématique de la dissimulation du visage s’est également posée. La question est sensible car elle renvoie forcément à la religion musulmane, et dans un Etat de droit, toutes doivent se voir appliquer les mêmes règles.

La jurisprudence « Baby Loup » a permis de fixer une règle : « La dissimulation du visage du salarié est interdite quand le salarié travaille dans un lieu ouvert au public ou dans un organisme chargé d’une mission de service public. » En cas de non-respect de cette obligation, le salarié encourt une amende pouvant aller jusque 150 €.

Le bon fonctionnement de l’entreprise implique également que la religion du salarié soit compatible avec les horaires et les tâches de travail. De surcroît, l’employeur a une obligation de sécurité et de protection de la santé de ses salariés. Le salarié est donc tenu de respecter certaines règles. La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) rappelle régulièrement que « le salarié ne peut invoquer des prescriptions religieuses pour refuser d’exécuter toute ou partie de ses missions contractuelles ou pour se soustraire à ses obligations légales ». Elle a, par exemple, reconnu comme valable, le licenciement d’une employée de cuisine qui refusait d’ôter son voile pour porter la charlotte imposée dans cette profession pour des raisons d’hygiène. En l’espèce, la salariée refusait de porter un équipement tendant à assurer l’hygiène (Délibération Halde n° 2010-166, 18 octobre 2010).

De son côté, la Cour de cassation a consacré en 2017 le principe de neutralité religieuse dans un arrêt du 22 novembre (Cass. soc., 22 novembre 2017 n° 13.19855, Bougnaoui c/ Sté Micropole Univers). Elle a affirmé que « l’employeur, investi de la mission de faire respecter au sein de la communauté de travail l’ensemble des libertés et droits fondamentaux de chaque salarié, peut prévoir dans le règlement intérieur de l’entreprise ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l’article L. 1321-5 du code du travail, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients ». L’employeur peut donc interdire le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, « à condition que cette clause soit générale et indifférenciée ». La boucle est bouclée avec la jurisprudence « Baby Loup » et force est de constater la porosité de la frontière entre vie personnelle et vie professionnelle.

La Cour de cassation se base sur le pouvoir de direction de l’employeur(1) pour lui permettre de régir la manifestation et l’expression des pensées de ses salariés. En pratique, le moyen juridique de restriction utilisé est le règlement intérieur de l’entreprise. La Haute Juridiction pose des limites, bien sûr, afin de préserver la liberté individuelle. Elle restreint l’application de la clause de neutralité aux salariés en contact avec la clientèle. Nous pouvons nous demander la raison pour laquelle elle laisse de côté les collègues des salariés qui ne sont pas en contact avec la clientèle, mais qui sont amenés à côtoyer chaque jour leurs voisins de travail.

Cette position jurisprudentielle fait sans nul doute suite à l’intégration du principe de neutralité dans le code du travail, à l’article L. 1321-2-1, via la loi « travail » du 8 août 2016.

Certes le principe est posé, mais les conditions de mise en œuvre sont floues, notamment, en l’absence de définition. De plus, la conformité aux normes supranationales n’a pas été jugée. Nous pensons bien sûr aux articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, relatifs aux libertés d’opinion et d’expression ainsi qu’aux articles 9 et 10 de la CEDH sur la liberté d’expression, de penser, de conscience et de religion. Si nous prenons, par exemple, le cas du jeûne observé chaque année pendant un mois par les pratiquants musulmans, cela concerne plusieurs millions de travailleurs et, chaque année, les mêmes questions se posent au sein des entreprises. A l’heure actuelle, aucune disposition légale ne vise explicitement un acte religieux, pas plus le jeûne du Carême que celui du mois de Ramadan. Le chef d’entreprise devra gérer la santé de ses salariés avec la boîte à outils laïcs à sa disposition : respect de l’obligation de protection de la santé et de la sécurité, du contrat de travail ainsi que des principes de non-discrimination.

Les salariés pratiquant le jeûne doivent respecter les horaires et les lieux de travail. Le ministère du Travail a publié un guide du fait religieux en entreprise, afin de donner un mode d’emploi aux dirigeants de structures(2). Concrètement, et au-delà de la théorie, lors des périodes de jeûne comme le Ramadan, le Yom Kippour ou le Carême, l’employeur doit adapter les conditions de travail des salariés au nom de son obligation de prévention contre les risques professionnels et la pénibilité au travail. Il peut adapter les horaires, privilégier le travail en équipe. Nonobstant cette obligation, le dirigeant ne peut pas questionner un salarié sur ses pratiques religieuses. Il a donc peu de moyens pour déceler une situation de fragilité du salarié si ce dernier ne l’informe pas. La question du jeûne est importante dans les métiers de la santé car les salariés sont en contact avec un public fragile et, pour beaucoup, ils ont en charge des personnes fragiles et/ou vulnérables. Pour encadrer le fait religieux, les entreprises et établissements peuvent mettre en place une charte de laïcité. « Elle permet de nous rappeler, en tant que citoyen (usager ou salarié), les principes fondamentaux de notre pays en matière de liberté, de conviction, des droits respectifs, d’égalité de traitement et de respect mutuel » déclare Serge Steitz, directeur des soins à l’Institut Godinot de Reims. Il précise que « l’institut a fait le choix également de ne pas avoir de lieu dédié à la pratique d’un culte afin de ne pas exclure qui que ce soit. Il s’agit symboliquement d’une manière de signifier la laïcité de l’établissement au sein duquel chacun peut recevoir en tant qu’individu un représentant du culte, ou pas. »

2. Sexualité, égalité femmes-hommes et parentalité

a) Sexualité

La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, prévoit une évaluation annuelle du sexisme en entreprise. Chose faite le 17 janvier 2019, avec le rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE). On y apprend que le physique et la manière d’être des femmes demeure encore de nos jours sujets à discussions, railleries et plaisanteries déplacées. Ainsi, toujours selon le rapport, 56 % des Françaises de moins de 25 ans avouent avoir entendu au moins une blague sexiste en 2017. Il insiste également sur les conséquences pour les victimes de violences sexistes et sexuelles qui « peuvent être en proie à des insomnies, des troubles alimentaires, des migraines, des nausées, de la fatigue, des problèmes d’ordre sexuel, des mutilations auto-infligées… ». Apporter la preuve de plaisanteries blessantes peut être compliqué dans les faits. Le HCE est ferme et précise que « ridiculiser les personnes qui protestent en leur reprochant leur manque d’humour permet de se déresponsabiliser et de ne pas remettre en question les fondements sexistes sur lesquels repose cet humour, ni de réfléchir aux conséquences d’une blague sexiste ou du fait d’en rire ». Le Haut Conseil insiste sur la compréhension de ces phénomènes afin d’en éradiquer la banalisation. Une injure sexiste en public coûte jusqu’à 1 an de prison à son auteur et 45 000 € d’amende. Le cas du sexisme se situe à la confluence des vies personnelle et professionnelle. Les hommes ne se sentent plus libres de plaisanter au risque que cela leur coûte cher, les femmes sont heurtées et osent désormais le dire. Force est de constater également que tout est question de personnalité. Face à une même plaisanterie, deux femmes pourront réagir différemment et l’humour masculin n’est pas univoque. Aujourd’hui, sur un lieu de travail, les traits constitutifs de nos personnalités comme l’humour ou le ressenti sont donc pris en compte.

S’agissant de la sexualité, la question du genre se pose également comme symbole des frontières qui se brouillent entre vies professionnelle et personnelle. La loi française ne prend en compte que deux genres : féminin et masculin, à la différence de l’Allemagne qui compte, depuis le 14 décembre 2018 un troisième genre : divers. L’apparition de nouveaux genres compliquent la relation civile mais également de travail. La loi est claire et interdit toute discrimination en raison de l’identité de genre(1). Afin de banaliser la transidentité en entreprise, l’association Notre cercle et l’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH) ont créé et diffusé un guide sur les bonnes pratiques concernant la transidentité pour les DRH et les managers(2). Le manuel se veut pratique et pragmatique. A la question « Comment accueillir l’annonce d’une transition professionnellement ? », les rédacteurs invitent les managers à « accueillir cette annonce comme un événement de vie tel qu’il en existe beaucoup, c’est-à-dire avec la retenue du contexte professionnel mais de manière positive ».

b) Egalité femmes-hommes

Nous vous renvoyons aux dossiers juridiques des ASH n° 3139 du 20-12-19, page 44 et n° 3141 du 10-01-20, page 44.

c) Parentalité

La parentalité appartient à la vie privée du salarié. Pourtant, dès l’embauche, le nombre d’enfants peut être un frein pour les employeurs. Même si la question n’a juridiquement pas à être posée, elle l’est dans les faits. Par exemple, le salarié peut être amené à demander des adaptations d’horaires en raison d’une garde d’enfant alternée. Depuis quelques années, certaines entreprises développent des crèches en interne, preuve que l’entreprise s’occupe de la vie privée du salarié.

Une directrice des ressources humaines d’un groupement d’hôpitaux a décidé de créer une crèche au sein de l’association à but non lucratif qu’elle dirige, car elle avait elle-même du mal à passer du temps avec ses enfants. Elle souhaite garder l’anonymat pour nous confier que « les modes de garde inadaptés aux horaires du secteur sanitaire engendrent beaucoup d’absences ». Elle ajoute que « les exigences des métiers, les horaires décalés et les plannings incertains rendent les salariés moins rentables ». En effet, en raison de leurs obligations familiales, les femmes s’absentent plus fréquemment et « les journées “enfants malades” sont toutes consommées ». Selon elle, « la crèche interne est une solution pour combiner vies professionnelle et privée des salariés avec leurs enfants ». Parmi les bénéfices principaux, elle relève « le gain de temps dans les transports et une diminution de l’absentéisme ». Professionnelle des ressources humaines, elle reconnaît que la frontière n’existe plus vraiment dans ce cas : « L’établissement prend en charge une partie de la vie personnelle du salarié dans le but qu’il soit plus rentable. » Elle tempère aussitôt, en ajoutant que cette crèche apporte également des avantages aux salariés en termes de confort de vie.

Les résultats de la 10e édition du baromètre de l’Observatoire de la parentalité en entreprise, paru en 2018, nous apprennent que les mesures les plus plébiscitées par les salariés sont le télétravail, la flexibilité dans les horaires et les modalités d’organisation, les crèches et les aides au financement des modes de garde ainsi que le congé de paternité rémunéré. Plus récemment, le 19 novembre 2019, l’Observatoire de la qualité de vie au travail (OQVT) a publié son deuxième guide pratique de la parentalité en entreprise. Pour l’observatoire, « les entreprises sont directement concernées par l’émergence de ces évolutions sociétales : chaque année, 250 000 couples divorcent ou se séparent, dont une très grande majorité sont en activité professionnelle ; la monoparentalité concerne 1,8 million de familles ; le nombre d’aidants familiaux ne cesse d’augmenter (11 millions). Il s’agit pour les employeurs d’un enjeu majeur de performance économique et sociale qui les invite à apporter une attention particulière à l’articulation des temps de vie des salariés concernés : adaptation des modalités d’organisation du travail, management bienveillant, services qui facilitent la vie quotidienne ou encore soutien financier. »

Le stade de la frontière vie professionnelle et vie personnelle semble dépassé. L’heure est donc à la meilleure conciliation entre ces deux sphères et la parentalité en est un exemple criant. La Cour de cassation, dans un arrêt du 14 novembre dernier (Cass. soc., 14 novembre 2019, n° 18-15682, arrêt n° 1567), fait également le lien entre congé parental et sexe. Elle tient ainsi compte de la réalité des faits de société puisque, en droit, le congé parental est lié à la qualité de parent et non à la grossesse ou au sexe. De surcroît, la Cour fait expressément référence au droit communautaire en la matière et cite plusieurs jurisprudences(3) afin d’étayer son exposé. Dans le cas d’espèce, une salariée avait introduit, après un congé parental, une action pour faire reconnaître un harcèlement et une discrimination liée à la grossesse. Le jugement sur le fond avait débouté la salariée, qui s’était alors pourvue en cassation. La Cour casse et annule mais seulement sur ses demandes au titre de la discrimination. Selon elle, et il s’agit d’une nouveauté, une discrimination indirecte peut découler du sexe féminin et d’un congé parental.

3. Tenue vestimentaire et apparence physique

Un salarié sur deux dit avoir été victime de discrimination au cours de sa vie professionnelle, selon le baromètre Cegos sur les discriminations. Les deux formes principales citées sont l’apparence physique (16 %) et l’âge (18 %). Elles s’exercent lors du recrutement (32 %, selon les DRH et les salariés) et à l’occasion des promotions (d’après 35 % des salariés et 32 % des DRH). La vie professionnelle est donc conditionnée par notre être et notre vie personnelle. L’obligation pour l’employeur est alors de ne pas porter atteinte à la personne. Jacques Toubon, le défenseur des droits, dans une décision-cadre du 15 octobre 2019, rappelle qu’il « est tenu de prévenir toute discrimination ou harcèlement liés à l’apparence physique de ses salariés, et à sanctionner ces comportements ». Il recommande aux entreprises de former leur personnel aux droits et libertés des salariés, tout en associant les partenaires sociaux à la mise en œuvre effective de l’ensemble des mesures. Dans cette même veine, le défenseur des droits avait publié, en juin 2019, un guide « pour un recrutement sans discrimination »(1).

Cette décision-cadre invite les employeurs à réinterroger « non seulement leurs codes vestimentaires, mais de manière plus générale leurs pratiques […] à la lumière de la non-discrimination » indique le défenseur des droits. Le document est assorti de cinq annexes qui visent, chacune un aspect de l’identité physique notamment le poids, la tenue vestimentaire, la barbe, la coiffure, les tatouages et piercings. Il rappelle que la tenue de travail ou le code vestimentaire imposés doivent être justifiés par des raisons objectives liées à la santé et à la sécurité ou relativement au contact avec la clientèle ou les résidents. Au sein des établissements sanitaires et médico-sociaux, la blouse et les cheveux attachés sont hygiéniquement obligatoires. Mais un règlement intérieur qui interdit aux ambulanciers de porter un jean ou des baskets et les oblige à porter une cravate a ainsi été jugé disproportionné par la Cour de cassation (Cass. soc., 19 mai 1998, n° 96-41123).

« Certains codes stricts et conservateurs doivent être revus à la lumière de l’évolution de la société […] et des phénomènes de mode », insiste le défenseur des droits. Et d’ajouter : « L’effacement progressif des frontières entre les sphères privée et professionnelle permet aujourd’hui plus de liberté. »

B. L’employeur et le contrôle des durées, des lieux de travail et de la correspondance

Un salarié peut travailler depuis chez lui, avec un téléphone ou un ordinateur portable, ce qui brouille la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle, mais aussi le contrôle de l’employeur. En principe, le dirigeant ne peut pas s’immiscer dans la vie personnelle des salariés. Il dispose néanmoins, en cas d’abus, d’un pouvoir de direction qui lui permet de prendre des mesures nécessaires et proportionnées. En pareil cas, c’est le juge qui l’appréciera en cas de contentieux.

S’il y a nécessité de surveillance des salariés par vidéo-surveillance ou géolocalisation, celle-ci est possible dans la mesure où :

• chaque salarié est informé ;

• le règlement intérieur le précise ;

• les représentants du personnel ont été consultés.

Un employeur qui surveille ainsi un salarié sans se soumettre à ces obligations encourt le retrait du dispositif de surveillance devant le juge prud’homal, ainsi que 1 an de prison et 45 000 € d’amende devant le juge pénal (Code pénal, art. 226-1).

Pousser l’analyse de la surveillance pose alors la question de la fouille. Elle est interdite, de manière systématique, mais autorisée si elle est justifiée par des raisons impérieuses. Il en est de même des tests d’alcoolémie. Leur utilisation systématique est prohibée. Mais si elle est inscrite dans le règlement intérieur afin de prévenir ou de faire cesser une situation dangereuse, il est alors possible d’y recourir.

S’agissant du temps de travail, l’article L. 3121-1 du code du travail précise que le temps de travail effectif est celui pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. Le reste du temps, il s’agit de temps personnel. Mais, au fil des années, la notion a évolué avec les technologies. Le temps de travail était le temps passé sur le lieu de travail, il est devenu le temps où le salarié est disponible pour son travail. Aujourd’hui, il intègre les déplacements entre deux lieux de travail. Mais le temps de déplacement du domicile au lieu de travail n’est pas considéré comme du temps de travail effectif. A l’exception du secteur de l’aide à domicile où les trajets sont considérés dans plusieurs conventions collectives comme du temps de travail et rémunérés comme tels. En résumé, le temps de travail est celui où le salarié est placé sous l’autorité de l’employeur quel que soit le lieu.

En dehors de ce temps, l’employeur n’a plus de pouvoir de direction sur le salarié. Mais, avec le développement des réseaux sociaux, les choses ne sont pas aussi simples. Ainsi, si un salarié tient, avec un statut public du type forum ou page Facebook, des propos insultants ou dénigrants à l’encontre de son employeur au sens large, son licenciement est alors justifié(2). La Cour de cassation ne considère en revanche pas comme des injures les propos tenus sur des pages dites « privées »(3). Plus généralement, au-delà des réseaux sociaux, se pose la question des faits personnels ayant une incidence professionnelle ou inversement. Comme souvent en droit, chaque principe a ses exceptions. Là encore, le principe veut qu’un motif tiré de la vie privée du salarié ne puisse pas motiver un licenciement, sauf s’il constitue un manquement découlant de ses obligations professionnelles. La Cour juge que la perte du permis pour conduite en état d’ébriété, en dehors des horaires de travail, peut être un motif de licenciement. Le cas des chauffeurs est souvent cité(4). L’impact est similaire pour les aides à domicile qui se déplacent entre chaque prise en charge. En résumé, même durant son temps personnel, le salarié reste lié à son employeur par une obligation de loyauté.

S’agissant des correspondances, le principe est le même. La règle de droit qualifie de « présumées professionnelles » toutes les correspondances réalisées sur le lieu, ou depuis un poste, appartenant à l’employeur. Mais il reste une exception : si le salarié identifie le message comme étant personnel, alors l’employeur n’a pas le droit d’en prendre connaissance au nom du secret des correspondances(5).

Employeurs et salariés se demandent souvent s’il est possible de surfer sur Internet et d’envoyer des mails personnels durant les horaires de travail. La réponse est « oui ». Le salarié peut utiliser son ordinateur et son téléphone professionnels à des fins personnelles. Il peut également consulter des pages Internet durant ses heures de travail. Il existe bien sûr une limite. L’abus est interdit et l’employeur est, évidemment, en droit de sanctionner un salarié qui abuserait(6). Il reste au juge à qualifier les notions d’« utilisation modérée » et d’« abus » car, employeurs et salariés n’en ont pas la même définition devant les tribunaux. Une autre question fréquente en entreprise est celle du stockage de données personnelles sur des ordinateurs ou téléphones professionnels. A ce sujet, il a été jugé qu’un salarié pouvait conserver sur son ordinateur de travail des photographies, même pornographiques, à partir du moment où elles n’étaient pas illégales(1). Mais force est de conclure que l’abus peut être sanctionné. Le manager est un levier essentiel dans l’articulation vie professionnelle et vie personnelle. A toutes les étapes il signale l’abus ou valide la pratique.

Selon Serge Steitz, « la frontière vie privée-vie professionnelle ne peut pas être totalement étanche ». En effet, « chaque salarié est singulier et intrinsèquement modelé tant par son vécu personnel que professionnel. Au quotidien, les managers ne gèrent pas que des compétences, mais également des personnalités. Tout l’art consiste à trouver l’équilibre qui puisse garantir une frontière commune admise par le groupe », précise le directeur des soins à l’Institut Godinot, lui-même manager.

C. L’employeur face au bien-être et à la santé des salariés

La santé et le bien-être relèvent de la liberté et de la responsabilité individuelle de chaque salarié. Mais l’employeur a l’obligation de veiller à la santé et à la sécurité de ses collaborateurs. Derrière cette injonction, nous avons vu fleurir ces dernières années des cours de fitness, de yoga et autres salles de sieste en entreprise. Inévitablement, cela implique des conséquences juridiques. Le principe est le même : les activités sont autorisées, voire vivement conseillées, mais l’abus est sanctionné. Pas question donc de prolonger la séance de sport ou de dormir 3 heures à son poste de travail. Ce concept dénommé « work-life balance » – qui signifie « équilibre entre travail et vie privée » – suppose que la vie professionnelle soit indépendante de la vie privée.

Certaines entreprises prennent des mesures pour aider les salariés à équilibrer vie professionnelle et vie privée, et les salariés sont en demande. Selon l’enquête « Conditions de travail et risques psychosociaux de 2016 », 13 % des femmes et 14 % des hommes salariés déclarent recevoir des reproches de leur entourage, en raison de leur manque de disponibilité lié aux horaires de travail(2). 21 % des femmes et des hommes qui déclarent devoir « toujours » ou « souvent » se dépêcher dans leur travail font état de difficultés avec leurs proches. S’agissant des activités sportives en entreprise, elles sont régies par le code du sport et le code du travail. Elles peuvent relever des activités sociales et culturelles du comité social d’entreprise (CSE). La décision de proposer des cours de sport sur un lieu de travail comporte son lot d’obligations légales. Il faut notamment garantir la sécurité et la santé des salariés et répondre aux exigences du code du travail, notamment en termes d’accessibilité, d’évacuation, d’hygiène et de sécurité.

La DRH interrogée dans le cadre de ce dossier a mis en place des cours de yoga au sein des établissements hospitaliers qu’elle dirige. « Nous avons ainsi conservé une infirmière qui souhaitait quitter l’établissement. Les cours sont complets et les retours sont unanimement positifs », affirme-t-elle. C’est d’ailleurs un élément qu’elle met en avant lors des entretiens d’embauche au même titre que la mutuelle et d’autres avantages. « Les salariés demandent que nous prenions soin d’eux, qui plus est dans le secteur de la santé », ajoute-t-elle. Un DRH, qui souhaite lui aussi rester discret, nous confie que les mesures de qualité de vie qu’il a mises en place sont « esthétiques » : traduire « un vernis pour faire beau et responsable ». « Nous offrons des fruits frais trois après-midi par semaine, mais il s’agit des restes de la cantine d’entreprise. » Employeurs, salariés : « Tenez-vous prudemment entre les deux extrêmes. Marchez au milieu, c’est le plus sûr des systèmes », disait déjà Ovide, poète latin (43 av. J.-C.– 17 ap. J.-C)…

Distinction vie privée-vie personnelle

« La vie privée, c’est l’intimité, c’est-à-dire le donjon spécialement protégé de la vie personnelle : le secret des correspondances, le domicile, les relations du salarié. La vie personnelle, c’est l’ensemble des actes qui ne relèvent pas de l’autorité de l’employeur, c’est au fond l’exercice de la liberté individuelle du salarié. »

La notion de « vie personnelle » englobe celle de « vie privée » qui bénéficie à tous les citoyens.

P. Waquet – Le « trouble objectif dans l’entreprise » : une notion à redéfinir – Revue Droit du travail, 2006, p. 304.

Notes

(1) Voir ASH n° 3139 du 20-12-19, p. 44 et n° 3141 du 10-01-20, p. 37.

(1) Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

(1) Loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques..

(2) Grégoire Loiseau – « Your employer is watching you » – Les Cahiers sociaux n° 255, 1er septembre 2013.

(1) Voir ASH n° 3140 du 27-12-19, p. 36.

(2) Disp. sur le site du ministère : https://bit.ly/2GlXJed.

(1) Code pénal, art. 225-1 modifié par l’article 86 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

(2) Téléchargeable sur https://bit.ly/37pPGsB.

(3) CJUE, 22 octobre 2009, aff. C-116/08, points 35 et 37 ; CJUE, 27 février 2014, aff. C-588/12, points 30 et 32 ; CJUE, 8 mai 2019, aff. C-486/18, point 41.

(1) Disponible sur https://bit.ly/37nRqm1.

(2) Conseil de prud’hommes Boulogne-Billancourt, 19 novembre 2010, n° 09/00316

(3) Cass. civ., 10 avril 2013, n° 11-19530.

(4) Cass. soc., 2 décembre 2003, n° 01-43227

(5) Cass. soc., 19 juin 2013 n° 12-12138.

(6) Cass. soc., 26 février 2013, n° 11-27372

(1) Cass. soc., 8 décembre 2009, n° 08-42097.

(2) Dares Analyses n° 045, septembre 2019.

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