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“Les problèmes de santé et sociaux vont de pair”

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Plutôt que de se lancer dans une action humanitaire à l’autre bout du monde, Nicolas Blouin a préféré s’impliquer chez lui, à Saint-Nazaire. Son projet phare, Le MarSoins, est un camion qui sillonne les quartiers de l’agglomération pour proposer des actions de prévention santé gratuite et ouverte à tous.

C’est un jour de novembre venteux et pluvieux, comme il en existe beaucoup à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). En ce mardi matin, toutefois, les passants jettent des regards étonnés vers ce camion bariolé, posté au pied du bâtiment de l’assurance maladie. « C’est exactement l’effet que nous recherchions en lui donnant ce look flashy. Intrigués, les gens se laissent plus facilement aborder par nos bénévoles et embarquer dans le camion », lance malicieusement Nicolas Blouin, 34 ans, cofondateur avec sa compagne infirmière, Noémie Bregeon, de l’association A vos soins et auteur de ce concept inédit d’unité mobile mise en place en avril 2017. Baptisée Le MarSoins, celle-ci propose un lieu de discussions et d’échanges, axés principalement autour de la prévention santé et de la réduction des inégalités d’accès aux soins. « A Saint-Nazaire et aux alentours, certaines zones sont carrément sous-dotées en professionnels de santé, constate amèrement ce Nazairien pur souche. Grâce à notre camion, nous tentons de contourner le problème en créant une antenne de santé qui va au-devant de la population locale, en stationnant au pied des immeubles, aux abords des maisons de quartier, sur le marché ou dans des endroits particulièrement fréquentés. »

A l’intérieur du véhicule, l’accent a été mis sur la convivialité et la détente. L’espace, séparé en deux, accueille une première pièce dite de « convivialité » où l’on peut s’asseoir, boire un café ou feuilleter des prospectus sur la santé et, derrière une porte colorée, une petite salle où les personnes qui le souhaitent peuvent rencontrer un professionnel pour faire le point sur leur santé, demander un conseil ou se confier sans jugement. A l’issue de la consultation, une fiche de préconisation est remise, avec la liste des praticiens du secteur. « Face aux obstacles rencontrés dans l’accès aux soins – comme des délais trop longs pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste ou des difficultés pour couvrir le reste à charge –, nombreux sont ceux qui jettent l’éponge, explique Nicolas Blouin. A nous de leur donner toutes les clés pour les inciter à se réinsérer dans un parcours de soins. »

De l’hygiène à la prévention

Selon les jours de permanence, un médecin généraliste, une sage-femme, une psychologue-addictologue, un opticien, un audioprothésiste ou encore une socio-esthéticienne se relaient dans la cabine. Depuis le mois de novembre dernier, des assistantes sociales, salariées de l’association Œuvres de Pen-Bron spécialisée dans le handicap, ont également rejoint l’équipe de bénévoles. « Nous nous intéressons à une approche globale des personnes, et pas uniquement à leur santé, poursuit le trentenaire. Nous savons que les problèmes de santé vont de pair avec les problèmes sociaux. Il arrive que certaines personnes ne viennent que pour partager un moment avec les bénévoles. Et notre rôle est aussi de leur prêter une oreille attentive. »

Avant d’être consacré à la réduction des inégalités d’accès aux soins, Le MarSoins avait été imaginé pour permettre un accès à des douches gratuites pour les personnes en situation de vulnérabilité, comme il en existe notamment à Lyon ou à Marseille. Un projet qui a dû être abandonné dix-huit mois après le lancement, faute de moyens matériels et humains. « Il fallait être présent plusieurs fois par semaine à un endroit précis, alors que l’originalité de notre démarche est justement d’être mobiles et de pouvoir nous déplacer là où les autres ne vont pas », souligne le cofondateur de l’association. Depuis plus d’un an, la feuille de route de l’unité mobile ne cesse de s’étoffer avec, en moyenne, trois à cinq actions par semaine. Résultat : quelque 2 000 dépistages ont déjà été réalisés, et 60 % des personnes orientées vers des soins passent à l’action après leur passage dans le camion. Ce bilan positif intéresse d’autres villes de l’ouest de la France qui, à l’instar de Brest (Finistère) et de Redon (Ille-et-Vilaine), envisagent de se doter de leur propre unité mobile dans le courant de l’année. De nouvelles perspectives qui réjouissent Nicolas Blouin. Mais pour ce diplômé d’une école de management que rien ne destinait à une carrière dans le médico-social, l’aventure est avant tout collective. « Sans l’impulsion de Noémie, je ferais sans doute quelque chose de moins enthousiasmant. Ensemble, et avec l’aide de nos bénévoles et de nos salariés, nous avons pu agir localement, en apportant une réponse concrète aux bénéficiaires en mal de soins. L’important est désormais que nous gardions l’âme du projet pour que l’association continue d’avoir une vraie place dans la cité », raisonne celui qu’aucun défi ne semble effrayer. Pas même la création d’un centre de soins polyvalent, dont l’ouverture est prévue en septembre 2020.

Installé dans une ancienne ferme d’un quartier prioritaire de la commune, cet établissement devrait accueillir, outre les six infirmières du centre de soins infirmiers créé par l’association A vos soins en 2015, deux médecins généralistes, des assistantes sociales et, à moyenne échéance, une sage-femme. « Ce quartier, où résident en priorité des femmes isolées et des familles monoparentales, souffre, comme la majorité des quartiers nord de la ville, d’importantes problématiques d’accès aux soins. Ce projet s’inscrit dans une volonté d’aller là où il y a un manque tout en s’adressant à tous, détaille Nicolas Blouin. Le prochain défi pour nous sera de réunir les arguments suffisants pour attirer les professionnels de santé dans ce territoire. »

Un jardin « extraordinaire »

Autre rendez-vous inscrit au calendrier de l’association : la création par une trentaine de personnes âgées d’un jardin « extraordinaire ». Objectif : encourager l’activité physique et créer du lien pour prévenir la perte d’autonomie. Intitulé L’Arbre aux sens, le chantier, financé à hauteur de 50 000 € par un appel à projets de la Conférence des financeurs, démarrera en avril prochain et fera intervenir des professionnels de santé (ergothérapeute, kinésithérapeute, infirmière, psychothérapeute) et du jardinage.

Toujours à destination d’une population âgée : la saison 2 de La Valise à sons, une dizaine de séances d’immersions sonores, inaugurée en 2018, qui permet d’ouvrir des discussions sur des souvenirs et d’aborder ainsi les questions de la vie quotidienne. « Toutes ces actions viennent ajouter une pièce supplémentaire au puzzle associatif déjà bien fourni de Saint-Nazaire, résume l’instigateur de tous ces projets. Mon rôle est simplement de mettre tout cela en musique. »

Le Marsoins

compte 10 salariés et 30 bénévoles. Son budget annuel est de 80 000 €, dont 60 % proviennent de fonds privés et 40 % de subventions (mairie de Saint-Nazaire, région Pays de la Loire, bailleur social Silène, agence régionale de santé).

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