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« Sortir de l’approche uniquement déclarative »

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députée (LREM) de Meurthe-et-Moselle et corapporteure de la mission sur la fraude aux prestations sociales
Pourquoi n’êtes-vous pas parvenue à chiffrer le montant de la fraude aux prestations sociales ?

Le système de protection sociale français s’est complexifié au fur et à mesure des années. La multiplication des prestations, des dispositions, des paramétrages des populations cibles, des délais, des prérequis pour bénéficier des aides nuit aux populations les plus précaires et facilite les fraudes. Le système de protection sociale est organisé en silos. Chacun des organismes de protection sociale a son propre système d’information, réalise le versement des prestations qui sont dans son champ de compétences. Il y a peu d’interactions entre les systèmes d’information. Depuis quelques années, un effort a été fait. La déclaration sociale nominative (DSN) a permis de faire progresser le sujet. Le registre national commun de protection sociale permet de partager un certain nombre d’informations mais qu’il faudrait étendre.

Vous recommandez de prendre pour modèle la Banque-Carrefour de la sécurité sociale de Belgique…

La Belgique avait un système de protection sociale extrêmement complexe, très régio­nalisé. Le pays a dû mutualiser les données issues de systèmes de protection sociales issus de plus de 3 000 organismes de protection sociale. Avec la Banque-Carrefour de la sécurité sociale, l’interconnexion des données se fait dans le respect des systèmes d’information respectifs. Chaque organisme de protection sociale reste propriétaire de ses données. En revanche, une plateforme vient puiser les données nécessaires. La Belgique a réussi avec ce type d’outil à réduire très considé­rablement la fraude aux prestations sociales, mais également le non-recours aux droits. La mise en œuvre d’une plateforme française pourrait s’inspirer du modèle belge sans en être un simple copier-coller.

Que proposez-vous pour lutter contre le non-recours aux droits ?

Les trois phénomènes – fraude, erreur de bonne foi et non-recours aux droits – sont visés par nos propositions. L’erreur de bonne foi et le non-recours sont liés à notre incapacité à organiser une interconnexion des données et une facilitation de la relation de l’usager avec l’administration. Le fait d’avoir une seule porte d’entrée permettrait de sortir de l’approche uniquement déclarative. Aujourd’hui, 10 % des démarches entreprises par nos concitoyens sont arrêtées en cours de route. Un certain nombre de personnes, en particulier les plus fragiles, sont découragées d’avoir tout un tas de questions, d’éléments à remplir, de calculs de revenus à faire. Un système interconnecté des données permettrait donc de sortir du déclaratif, de prévenir la fraude et de faciliter la demande d’aides sociales. Par ailleurs, l’accompagnement des personnes en illettrisme numérique ou en situation de précarité sociale par les maisons France services serait plus facile si les données administratives étaient centralisées et les démarches uniques.

Vous préconisez d’adopter des « définitions juridiquement claires et communes des notions de “domicile social”, de “vie commune” »…

Cette notion de « vie commune » n’est pas appliquée de la même manière dans les différentes caisses d’allocations familiales en France ni par les différents organismes de protection sociale concernés par cette notion. Les agents sont en difficultés pour interpréter cette notion et, du coup, pour faire appliquer les décisions, voire les sanctions. Pour la résidence, nous souhaitons qu’elle soit conforme à celle communiquée à l’administration fiscale.

Quelles suites attendez-vous à votre rapport ?

Nous avons déjà fait adopter quatre amendements importants dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2020. Le fait d’ouvrir la présence dans les comités opérationnels départementaux anti-fraude (Codaf) aux agences régionales de santé permet de renforcer la lutte contre les fraudes au logement insalubre et aux fraudes à l’assurance maladie. Un amendement a été adopté qui demande un audit par un organisme indépendant sur les modalités de gestion et d’utilisation du répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS). C’est la clé pour répondre aux difficultés de chiffrage rencontrées. Cet audit sera également indispensable pour garantir la qualité des données, essentielle au versement de la juste prestation.

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