La dernière fois que je suis allé à un repas de famille, ça ne s’est pas franchement bien fini… J’en suis reparti sous une volée d’injures, mon frère ne m’a pas adressé la parole pendant un mois et ma chère et adorable cousine Florine n’a pas eu l’air d’apprécier le terme « islamo-gauchiasse »… Ces assistantes sociales n’ont décidément aucun humour !
Du coup, pour le repas du nouvel an, j’avais décidé d’être sérieux, raisonnable et poli. Un seul impératif, éviter les sujets de discorde : les SDF, le sexisme et la politique en général.
Nan, parce que je la connais, la cousine, quand elle est lancée, ça dégénère forcément. Les patrons sont méchants et les salariés sont gentils, les riches sont des escrocs et les pauvres sont des victimes, les hommes sont des bourreaux et les femmes des proies sans défense… Je suis un homme et un patron, Florine est une femme et une salariée… On voit tout de suite qui a le bon rôle.
Le repas s’est bien passé, les sujets sensibles ayant été soigneusement évités. Ça aurait presque pu être un moment agréable… mais il a fallu, une fois de plus, que mon petit morveux de neveu mette la pagaille dans cet idyllique tableau familial. Et pif !
J’étais tranquillement en train de me servir un énième verre quand le petit monstre s’est pointé avec sa bouille d’ange pour m’annoncer, tout content, qu’il allait avoir une petite cousine. Et paf !
A ce stade de la soirée, et après quelques verres de divers alcools pas très bien identifiés, j’ai eu un doute affreux. J’ai regardé ma femme, j’ai calculé vite fait, non, c’est bon, ça pouvait pas être elle, vu que ça fait bien deux ans qu’elle a soit ses règles soit la migraine. Et pouf !
« C’est Sophie », m’a révélé Florine avec un sourire gêné.
Ah ouais… Sophie… la cassos de service, toujours occupée à gérer ses mômes et ses mecs. Sophie, la chômeuse par vocation, la reine de la débrouille, une alloc par-ci un logement HLM par-là, pourquoi s’embêter à bosser quand on est pauvre et fertile ? Pif paf pouf !
« Je sais ce que tu vas dire… », a grimacé ma cousine. J’ai jubilé. On allait enfin s’amuser un peu !
Et pif, je lance la première attaque sur ces assistés qui vivent sur le dos de la société, et j’en ai marre de payer des impôts pour des gens comme elle ! Et paf, ma cousine me répond du tac au tac que si je paie, c’est que j’en ai les moyens, alors que d’autres n’ont pas cette chance, et la solidarité nationale, ça te dit quelque chose, Flobert ? Et pouf, je réplique que si Sophie passait autant de temps à travailler qu’à se reproduire, elle aussi pourrait payer des impôts, d’abord !
Florine, furieuse, me sort la carte « grand méchant patron qui exploite ses salariés au lieu de les embaucher à un salaire décent », et pif paf pouf, c’est à ce moment que j’ai reçu un texto de la nounou qui nous priait de rentrer au plus vite, le petit ayant vomi partout.
Retour maison, j’ai filé 20 € à la baby-sitter. Elle a protesté, en principe, c’était 50, mais pour trois heures au black, c’est déjà bien payé et si elle est pas contente, c’est pareil. De toute façon, la prochaine fois, on passe le jour de l’an au soleil. J’ai monté une petite affaire aux Maldives sur les conseils de mon avocat fiscaliste, autant en profiter, non ?