J’aimerais vous raconter une histoire. Cette histoire, c’est celle de Monsieur… Walker. C’est un monsieur un peu âgé et un peu désorienté. Mais surtout, c’est un monsieur qui marche. Il marche, il marche… de pièce en pièce, jour et nuit. Et puis il accélère, encore et encore… Il court, il court… Et au bout d’un moment, malheureusement, il tombe. Parce qu’il va trop vite, parce qu’il a pris trop d’élan, parce que rien ne le ralentit… Alors, les soignants accourent, le relèvent. Ils le soignent, ils l’apaisent, comme ils peuvent, avec leurs mots et leurs mains. Et Monsieur Walker recommence. Il marche, il court, il tombe…
Alors parfois, la seule solution, c’est le repos forcé. Les soignants l’installent dans un fauteuil, avec un peu de force mais aussi beaucoup de douceur. Et, tout en l’installant, ils lui parlent et posent leurs mains sur ses épaules, délicatement, avec empathie… et il s’apaise. Comme si, d’un coup, plus rien d’autre ne comptait que ce moment. Ne plus rien faire. Attendre. Et ils restent là, à côté de lui, prêts à intervenir. Et quand Monsieur Walker se relève, fatigué d’être assis, il reprend sa marche. Mais, cette fois, tranquillement. Sans se presser. Et surtout sans tomber.
Il y a un peu de moi dans ce Monsieur Walker. Peut-être un peu de vous. Un peu de nous. Alors, prenons un peu de temps, nous aussi, ensemble, …
Nous sommes le 27 décembre 2019 et voici le dernier numéro de l’année.
Je suis arrivé aux ASH le 16 août 2017. Il y a deux ans, quatre mois et onze jours. Durant cette période estivale, les bureaux sont encore quasiment vides.
Souvenir du premier comité éditorial. Tour Montparnasse, 9e étage, une salle de réunion. Une grande table avec des gens différents, issus de secteurs différents. Des hommes et des femmes, des jeunes et des moins jeunes, des journalistes et des gens du terrain, des abonnés et des désabonnés… Des profils différents, des pratiques différentes… Des idées différentes aussi. La richesse d’un magazine qui évolue avec ses lecteurs. Que peut-on faire, ensemble, pour ce magazine auquel nous tenons tant ?
Une nouvelle ligne éditoriale, et une nouvelle maquette du magazine qui va avec. Une couverture rajeunie, l’ouverture au secteur commercial, quelques dossiers juridiques pour les gestionnaires, le changement de look des numéros juridiques… Parce que si le secteur social évolue, il fallait que les ASH évoluent aussi. Implacable logique si nous voulons que le magazine survive.
Les nouvelles rubriques. L’Organisation de la semaine, la BD de Tara et sa vie rêvée, l’histoire de cette gamine futée et de son éducateur qui n’ont pas fini de vous surprendre. La Minute de Flo, avec sa multitude de personnages aux cheveux violets un peu poètes.
Et puis les rencontres, la confiance, le soutien, des moments de découragement et d’autres, d’espoir… et quelques numéros qui m’auront marqué plus que d’autres : l’Europe solidaire, le retour des enfants de parents djihadistes, l’esclavage moderne, la prostitution des mineurs, et le numéro 3115 sur les violences conjugales. Des sujets sensibles, difficiles… et si magnifiquement illustrés par Pavo.
Deux ans, quatre mois, onze jours. Et maintenant ? Maintenant, il y a encore beaucoup à faire dans les ASH. La révolution est irréversible. Mais moi, je vais faire comme Monsieur Walker, je vais m’asseoir un peu et profiter de cette petite semaine de trêve. M’asseoir et me laisser bercer par les mots et les mains de mes proches. Et puis, tranquillement, me relever et repartir.
Merci à vous de m’avoir accompagné durant ces deux ans, quatre mois et onze jours. Merci pour votre confiance et votre investissement. Merci au comité éditorial, aux lecteurs, à Pavo, à Flo, à Alison, à l’équipe des ASH et de Pixel, et à Nadia.
Passez de bonnes fêtes de fin d’année, prenez soin de vous, et surtout n’oubliez pas de vous asseoir de temps en temps !