Les destructions d’habitats informels se multiplient en Guyane. La dernière vaste opération préfectorale de destruction d’un bidonville date du 9 décembre, dans la commune balnéaire de Remire-Montjoly, près de Cayenne. Dans ce quartier dit « Les Manguiers », « 400 habitations abritant environ 2 000 personnes, pour la plupart de nationalité française ou en situation régulière » sont édifiées parfois depuis 50 ans, a affirmé l’association Droit au logement (DAL) dans un communiqué. La préfecture assure que « 40 des 100 personnes » qui se sont présentées au « pôle social » « ont été prises en charge » pour une solution temporaire d’hébergement.
« Malgré les conditions troubles d’acquisition du terrain par un investisseur immobilier, et la gravité de la crise du logement en Guyane, le préfet a refusé de faire usage de la loi “Vivien” qui permet d’exproprier les îlots insalubres, de viabiliser le terrain et de revendre par lots aux occupants, afin de les laisser sur place comme cela s’est déjà pratiqué dans plusieurs quartiers de Guyane », critique le DAL. Ce terrain avec vue sur la mer, situé sur les contreforts de la très résidentielle commune de Remire-Montjoly, avait été acquis par le conseil général dans les années 1970, pour mener une opération d’urbanisme abandonnée depuis. En 2009, il avait été vendu à un particulier à bas prix, à la condition que celui-ci mette en place une résorption de l’habitat insalubre (RHI), afin de reloger les habitants (la délibération de la vente est disponible). Au lieu de respecter cette condition, le nouveau propriétaire a engagé des procédures d’expulsion, afin d’empocher « les fruits juteux d’une opération spéculative », accuse le DAL Guyane.
En septembre, le bidonville de la Mâtine à Cayenne, dans lequel vivaient 700 personnes, a fait l’objet d’une vaste opération d’expulsion de ses habitants suivie de la destruction des logements par les autorités. Douze organisations humanitaires ont interpellé Annick Girardin, la ministre des Outre-mer, dans une lettre envoyée le 25 novembre. « La problématique de l’habitat informel et indigne en Guyane ne peut être traitée par cette politique d’expulsions ou d’évacuations non accompagnées de solutions dignes et pérennes de relogement pour les personnes concernées. Loin de résoudre le problème, cette action publique l’aggrave, en menant à la sur-précarisation de populations déjà vulnérables et en multipliant les lieux de vie indignes. »