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Plan maladies neurodégénératives : stop ou encore ?

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Le plan maladies neurodégénératives (PMND) 2014-2019 arrive à échéance. Il laisse place à des interrogations quant à l’orientation et aux moyens qui seront consacrés à l’accompagnement des 850 000 personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ainsi que des dizaines de milliers qui souffrent d’une autre pathologie neurodégénérative.

L’heure du bilan a sonné. Doté d’un budget de 470 millions d’euros sur cinq ans pour la réalisation de 96 mesures dédiées à la lutte contre trois pathologies principales – la maladie d’Alzheimer (850 000 personnes), celle de Parkinson (150 000 personnes) et la sclérose en plaques (85 000 personnes) –, le plan maladies neurodégénératives (PMND) 2014-2019 touche à sa fin.

Lors des 13es rencontres de l’association France Alzheimer et maladies apparentées, le 10 décembre à Paris, Joël Ankri, vice-président du comité de suivi du PMND, a été invité à en dresser un état des lieux. Son hôte, Joël Jaouen, président de France Alzheimer, a exprimé à nouveau sa « nostalgie » du troisième plan Alzheimer 2008-2012, composé de 44 mesures pour un budget dédié de 1,6 milliard d’euros.

Un fonctionnement en silos

« Le plan maladies neurodégénératives n’a pas donné la même visibilité que le plan précédent », reconnaît Joël Ankri. Et de poursuivre : « Le plan Alzheimer 2008-2012 partait de l’Elysée, alors que le PMND est parti de la base, du travail fait en région. C’est un plan “bottom up”. A partir du moment où il n’y a pas l’Elysée derrière, le plan s’est retrouvé dans un fonctionnement en silos, avec des ministères différents qui ne se parlent pas toujours entre eux. La conséquence est que lorsqu’on a voulu avoir des actions transversales comme sur le logement, les assurances, des mesures qui figurent dans le PMND, nous n’avons pas pu avancer. » Ce gériatre spécialiste de la maladie d’Alzheimer et aujourd’hui à la retraite rappelle que, dans son rapport d’évaluation du plan Alzheimer 2008-2012, remis en 2013 au ministère de la Santé, il avait demandé de placer la gouvernance auprès du Premier ministre pour une approche interministérielle. « Quand on lance un plan, il faut lui donner une force politique qui peut s’appliquer à d’autres ministères », insiste-t-il.

Très ambitieux, le PMND affichait 96 mesures au compteur. Pari réussi ? « La très grande majorité ont atteint leur but. Moins d’un tiers des mesures ont capoté », indique Joël Ankri. Grâce à ce plan, la France s’est notamment dotée de sept centres d’excellence labellisés pour les maladies neurodégénératives, reconnus sur le plan international dans le cadre du réseau Coen (Center of Excellence in Neuro-degeneration). « En revanche, la recherche en sciences humaines et sociales ne décolle pas alors que c’est essentiel, et il existe encore des freins pour avoir une meilleure évaluation des approches non médicamenteuses », regrette Joël Ankri. Le président de l’association France Alzheimer reconnaît, lui aussi, que le PMND comportait des mesures positives. « L’éducation thérapeutique du patient ne faisait pas partie de l’ADN de France Alzheimer. Le plan nous a fait prendre conscience que nous pouvions nous aussi proposer et mettre en œuvre cet accompagnement. France Alzheimer s’est positionnée sur 20 à 25 mesures du PMND, telles que celles sur la douleur, sur la fin de vie. Le plan nous a également permis d’œuvrer contre le manque d’implication des médecins traitants. France Alzheimer a diffusé un manifeste dans près de 6 000 cabinets médicaux », rappelle-t-il.

L’une des mesures du PMND était notamment de renforcer la place et le rôle des agences régionales de santé (ARS) dans la déclinaison territoriale du plan. « On nous a expliqué que le plan serait dupliqué en région, proche des problématiques territoriales, mais ça a fait “pschitt”, souligne-t-il. Les ARS ne se sont pas vraiment impliquées dans sa mise en œuvre. Les assises régionales n’ont pas eu beaucoup de suivi. La sclérose en plaques était organisée avec des guichets uniques, mais pas pour Parkinson et Alzheimer. Ce plan a fait apparaître la différence de nos accompagnements. » Et d’asséner : « Le PMND n’a pas inventé de mesures nouvelles. Il a consisté à saupoudrer ce qui a marché dans le troisième plan Alzheimer, à distribuer des Maia [maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer] et surtout des Pasa [pôles d’activités et de soins adaptés]. »

Des critiques que Joël Ankri entend nuancer : « Il n’était pas question de jeter le bébé avec l’eau du bain. Comme je l’ai écrit dans le rapport d’évaluation du troisième plan Alzheimer, ce qui était une expérimentation en 2008-2012 devient du droit commun. Certaines structures peuvent être associées entre les différentes maladies neurodégénératives même si elles ont des finalités différentes. » Et d’appuyer ses propos avec un bilan chiffré du PMND : « Au cours des quatre dernières années, plus de 7 500 places d’accueil de jour, plus de 4 700 places d’hébergement temporaire, plus de 5 400 places d’équipes spécialisées Alzheimer (ESA), 19 millions d’euros pour les plateformes de répit, plus de 44 millions pour les unités d’hébergement renforcées (UHR). Certes, ce n’est pas encore suffisant, mais la lutte doit continuer. » Quant à la comparaison entre les 470 millions affectés au PMND et le 1, 6 milliard d’euros du troisième plan Alzheimer, Joël Ankri en souligne les limites : « 1, 6 milliard, c’est symbolique car il n’y a eu que 600 millions dépensés pour le plan Alzheimer 2008-2012. »

Une politique incitative

Va-t-on vers un PMND 2 ? « La tendance du gouvernement est de vouloir réduire le nombre de plans. La France compte une centaine de plans plus ou moins connus et importants. La question fondamentale est de savoir combien de temps doit durer un plan et combien de fois il doit être renouvelé ? », souligne Joël Ankri, avant de pointer la priorité d’une politique « incitative » : « Les autres pays européens, nord-américains et asiatiques développent des initiatives incitatives, mais pas spécifiquement un plan. »

Sans dévoiler de noms, Joël Ankri indique que l’évaluation du PMND sera effectuée par deux experts, un étranger francophone et un français, désignés par la ministre Agnès Buzyn. « La décision du gouvernement, je ne la connais pas. Nos gouvernants connaissent le poids de ces problématiques de santé publique concernant les maladies neurodégénératives. Aucun gouvernement, quelle que soit sa couleur politique, ne pourrait laisser sur le bord du chemin les millions de personnes atteintes de ces maladies et les millions d’autres autour d’elles qui cherchent à les aider. Il y aura certainement quelque chose », assure-t-il.

Joël Ankri termine son état des lieux du PMND en incitant France Alzheimer et les acteurs du secteur à rester mobilisés. « La maladie d’Alzheimer touche en majorité les personnes âgées et il y a dans notre société un certain âgisme. Il est encore nécessaire d’agir de façon à engager dans notre pays une politique incitative. »

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