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Le 4 décembre, l’Igas a rendu public son rapport intitulé « Etat des lieux et perspectives d’évolution du groupement d’intérêt public “Enfance en danger” ». Il avait été rendu à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la santé, et à Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance, en juin dernier, pour aider à l’élaboration de la stratégie nationale de prévention et protection de l’enfance.

Ce rapport « état des lieux et perspectives d’évolution du groupement d’intérêt public “Enfance en danger” » (Giped), réalisé par l’inspection générale des affaires sociales (Igas), a déjà bien été exploité par Adrien Taquet. Le secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance l’a effectivement cité à plusieurs reprises, notamment le 26 novembre dernier lors de l’assemblée générale du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE). A cette occasion, il a réaffirmé « son engagement d’améliorer le fonctionnement de la gouvernance du secteur aujourd’hui trop cloisonnée entre plusieurs instances distinctes ». Il a aussi rappelé que cette décision de réforme de la gouvernance s’appuie notamment sur les recommandations 16 et 18 du rapport de l’Igas « Etat des lieux et perspectives d’évolution du groupement d’intérêt public “Enfance en danger” » daté de juin 2019. Ce document est depuis le 4 décembre dernier rendu public sur le site de l’Igas. Il a été réalisé par trois inspecteurs de l’Igas : Stéphanie Fillion, Jean-Robert Jourdan, Thierry Leconte. Ces derniers ont ainsi répondu à la lettre de mission du 26 novembre 2018 dans laquelle Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, avait demandé à l’Igas d’évaluer le fonctionnement et l’organisation du Giped dans la perspective de l’élaboration de son plan stratégique.

Le 119, un service indispensable à améliorer

Dans ce rapport, le 119, le service national d’accueil téléphonique de l’enfance en danger – est présenté comme un « filet de sécurité indispensable pour la protection des enfants ». Cette plateforme repose sur une fonction de pré-accueil, assurée par un prestataire, et sur un plateau d’écoute chargé de dialoguer avec l’appelant tout en appréciant la gravité de la situation décrite. Un service qui n’est pas toujours efficient, c’est ce que note cette mission de l’Igas. Ainsi, elle met en évidence la saturation constante de la ligne en journée, en raison d’une faible capacité de traitement du plateau d’écoute. En 2017, pour près des trois quarts des 113 147 appels traités par le pré-accueil, les appelants ont été invités à rappeler ultérieurement. « Bien qu’une priorité soit donnée aux appels de mineurs, cette saturation est préoccupante et ne correspond pas à la qualité de service attendue », peut-on lire. La révision de l’organisation de cette plateforme et le renforcement de son plateau d’écoute sont recommandés par l’Igas. Les inspecteurs conseillent également le développement d’autres modes de contacts, tels qu’une plateforme de tchat, « afin de dépasser une stratégie fondée exclusivement sur le téléphone, qui n’est pas suffisante et adaptée pour gérer l’ensemble des situations à risque », commentent-ils.

La notion d’information préoccupante

La mission constate également que l’absence de définition commune et précise de l’information préoccupante rend notamment largement inopérant le dispositif de remontée statistique sur les suites données par les départements. Elle invite donc le Giped à s’impliquer davantage dans la construction d’un langage commun autour de la notion d’information préoccupante et de son traitement. Pour répondre à ces problématiques, Adrien Taquet a d’ores et déjà intégré dans son « plan de mobilisation contre les violences faites aux enfants », présenté le 20 novembre dernier, 400 000 € de moyens supplémentaires pour le 119 dès 2020 afin de recruter cinq nouveaux écoutants et l’accélération des chantiers de digitalisation du service (tchat et formulaire en ligne) ainsi que celui pour améliorer les liens avec les cellules de recueil des informations préoccupantes.

Le Giped et l’ONPE

Concernant le Giped, organisme cofinancé par l’Etat et les départements et qui se compose donc du 119, et de l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), cette mission affirme que son budget est marginal dans l’effort national pour la protection de l’enfance. Il représente en effet 0,06 % des dépenses nationales de protection de l’enfance (4,6 millions d’euros sur 7,9 milliards d’euros en 2017). Elle note également que la stratégie inconstante de la tutelle a dégradé la situation financière du Giped et compromis la soutenabilité de son budget. Et d’ajouter que la subvention versée au Giped par l’Etat a été diminuée de 7 % en 2018, entraînant une baisse identique de la participation des départements. Un coup dur pour cet organisme même si son budget a été rétabli en 2019 à son niveau de 2017. Parallèlement à ce constat, et après avoir donc évoqué les difficultés financières de l’ONPE, la mission indique que le dispositif national d’observation longitudinale en protection de l’enfance, Olinpe, prévu par la loi de 2007 et reposant sur la transmission de données des observatoires départementaux vers l’ONPE, n’est toujours pas opérationnel, faute de remontées suffisantes de données par les départements. Pour l’Igas, ce projet Olinpe ne peut pas continuer sur les errements antérieurs. Le Giped doit mettre sur pied une démarche projet, pilotée par un chef de projet expérimenté, avec des objectifs à court et moyen termes, et une volonté politique forte tant de l’Etat que des départements, à l’instar de l’accompagnement des maisons départementales des personnes handicapées par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Parallèlement à cela, la mission considère que l’utilisation d’un référentiel national d’évaluation doit contribuer à améliorer la qualité des évaluations des situations individuelles et la saisie des informations relatives à ces évaluations dans les logiciels métiers, favorisant ainsi la transmission des données relatives à l’enfance en danger, dans le cadre du projet Olinpe.

La gouvernance

La mission de l’Igas met en lumière le fait que les faiblesses de la gouvernance nationale de la protection de l’enfance pèsent sur le Giped. Elle rappelle ainsi que le besoin d’une gouvernance nationale de la protection de l’enfance est affirmé par les différents acteurs. Il a d’ailleurs fait l’objet d’un rapport conjoint de l’Igas et de l’inspection générale des services judiciaires en 2014. La création du Conseil national de la protection de l’enfance par la loi du 14 mars 2016 avait notamment pour objectif de créer un lieu de gouvernance nationale partagée de la protection de l’enfance. Un objectif qui ne semble pas atteint selon ce rapport qui stipule que l’articulation entre le CNPE et le Giped reste à préciser, indiquant notamment que si le Giped est membre du CNPE, le CNPE n’est pas représenté au Giped. Il n’existe donc pas d’organisation formalisée, politique ou technique, visant à garantir l’articulation des travaux du Giped et du CNPE. Dans ce rapport, l’Igas, de manière exploratoire, avance l’idée d’une « agence pour la protection de l’enfance », c’est-à-dire une structure nationale intégrant l’animation nationale de la politique publique. Cette structure devrait avoir deux caractéristiques fondamentales : une gouvernance partagée et une posture technique, au service des acteurs. Une hypothèse qui fait aujourd’hui clairement l’actualité alors qu’Adrien Taquet a réaffirmé, à plusieurs reprises et notamment devant les membres du CNPE le 26 novembre dernier, son « engagement d’améliorer le fonctionnement de la gouvernance du secteur aujourd’hui trop cloisonnée entre plusieurs instances distinctes ». Cette réforme de la gouvernance de la protection de l’enfance prendra la forme d’un nouvel organisme rassemblant les missions attribuées à différentes instances existantes (CNPE, Giped, Agence française de l’adoption), selon le secrétaire d’Etat. L’objectif est d’aboutir à une instance unique au périmètre élargi et cohérent, avec des missions renforcées et des moyens supplémentaires d’études et de recherche. L’Igas a été missionnée sur le sujet afin d’expertiser les conditions de création et le statut de ce nouvel organisme. Celui-ci devrait voir le jour début 2021. En attendant, les différentes instances mises sur la sellette s’interrogent sur leur avenir.

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