Recevoir la newsletter

Projet de loi de finances pour 2020

Article réservé aux abonnés

Image

Projet de loi de finances pour 2020

Crédit photo Olivier Hielle
Baisse de l’impôt sur le revenu, suppression de la taxe d’habitation, revalorisation de l’AAH ou encore baisse du taux de l’impôt sur les sociétés : présentation des grands points du projet de loi de finances 2020(1).

Quinquennat « Macron », acte 2. Sans doute poussé par la gronde naissante dans l’ensemble du pays et touchant plus particulièrement certains corps de métiers, comme les personnels des urgences ou les pompiers, le gouvernement affiche deux objectifs qui semblent à première vue antinomiques : « baisser massivement les impôts et préparer l’avenir ». Par ailleurs, il affiche fièrement un déficit public en baisse de plus de 20 milliards d’euros en 2020, aidé notamment par un contexte macro-économique, certes encore fragile, mais tout de même favorable, avec des taux d’intérêts particulièrement bas.

Cette année, le gouvernement table sur une croissance à 1,3 %. Comme l’an dernier, l’exécutif reste prudent, soulignant plusieurs incertitudes sur le plan international : les conséquences du Brexit, d’une part, et les tensions commerciales entre la Chine et les Etats-Unis, d’autre part. Mais « la croissance française résiste mieux au ralentissement mondial que celle de certains de ses partenaires européens », assure-t-il.

La baisse des impôts pour les ménages en 2020 représente un effort de 20,6 milliards d’euros pour les finances publiques. La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales représente à elle seule presque la moitié de l’effort consenti (10,2 milliards d’euros). Côté entreprises, l’effort sera de 9,4 milliards d’euros, du fait notamment de la baisse du taux d’impôt sur les sociétés qui passera à 25 %, contre 33 % aujourd’hui.

Cela est financé par une maîtrise assidue des dépenses. L’Etat poursuit la réorganisation de ses services et de sa masse salariale. D’un côté, 3 330 équivalents temps plein (ETP) sont créés dans les missions régaliennes (justice, intérieur, armées) et, de l’autre, 3 335 équivalents temps plein sont supprimés dans les ministères en transformation et leurs opérateurs (dont 1 666 ETP au ministère de l’Action et des Comptes publics et 1 073 ETP au ministère de la Transition écologique et solidaire). Au global, les dépenses pilotables de l’Etat s’élèveront à 278,8 milliards d’euros en 2020, soit + 5,4 milliards d’euros à périmètre constant.

I. Handicap et dépendance

Les sujets du handicap et de la dépendance sont en grande partie traités par le programme 157, sous l’autorité directe du Premier ministre. Cette année, le pouvoir exécutif recycle son objectif global déjà présent l’an dernier : « Permettre aux personnes handicapées et aux personnes âgées en perte d’autonomie de choisir librement leur mode de vie en leur facilitant l’accès au droit commun et en leur offrant des dispositifs adaptés à leurs besoins évalués de façon individualisé. » D’autres actions sont financées par le ministère de l’Education nationale et le ministère du Travail. L’administration poursuit la mise en œuvre du comité interministériel du handicap du 25 octobre 2018 qui a fixé cinq priorités « pour améliorer concrètement la vie des personnes en situation de handicap » : simplification, scolarisation, emploi, accès aux soins, participation et autonomie par les nouvelles technologies.

A. Personnes âgées

Dans les projets de loi de finances (PLF), les personnes âgées ne font toujours pas l’objet d’un traitement spécifique par un programme bien déterminé, ni par une politique transversale. Les actions de l’Etat pour ce public incombent principalement au ministère chargé de la santé. Le financement des actions est plus largement assuré par le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Notons tout de même trois montants budgétaires alloués plus ou moins directement pour ce public en 2020.

Les centres régionaux d’études, d’actions et d’informations en faveur des personnes en situation de vulnérabilité (Creai) interviennent notamment dans le champ de l’accompagnement des personnes âgées. Ils seront dotés de 625 000 € l’année prochaine.

Plus spécifiquement, l’Etat renouvelle l’enveloppe de 280 000 € consacrée au soutien financier d’actions d’associations dans le secteur des personnes âgées.

B. personnes en situation de handicap

1. Allocations

L’allocation aux adultes handicapés (AAH) représente à elle seule 86 % des dépenses du programme 157.

a) AAH

En 2020, l’AAH sera financée à hauteur de 12,19 milliards d’euros. Compte tenu des revalorisations exceptionnelles de l’allocation la portant à 900 € au 1er novembre 2019, les prévisions de dépenses à l’horizon 2023 sont naturellement en hausse. Pour l’Etat cela représente un effort de 362 millions d’euros en 2020.

Pour rappel, l’article 266 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a simplifié les dispositifs de soutien complémentaire aux bénéficiaires de l’AAH au profit d’un complément unique : la majoration pour la vie autonome. Ce complément est entré en vigueur le 1er décembre 2019. Les droits des bénéficiaires actuels du complément de ressources seront préservés. Ils pourront continuer d’en bénéficier à compter du 1er décembre 2019 pendant une durée de 10 ans, y compris à l’occasion d’une demande de renouvellement.

b) ASI

Selon le projet de loi de finances pour 2020, l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI) sera financée à hauteur de 256 millions d’euros. Le ministère des Solidarités et de la Santé table sur une stabilité du nombre des bénéficiaires en 2018 et 2019, par rapport à 2017. Au 30 juin 2018, le nombre de bénéficiaires tous régimes confondus s’élevait en moyenne à 72 243 personnes contre 71 632 en moyenne au 30 juin 2019, soit une diminution de 0,8 %.

2. Travail des personnes en situation de handicap

Les éléments de politique publique visant à favoriser et développer le travail des personnes en situation de handicap sont traités à la fois par le ministère de la Solidarité et de la Santé et le ministère du Travail.

a) Esat

L’Etat devrait consacrer 1,37 milliard d’euros au financement de l’aide au poste au titre de la garantie de rémunération des travailleurs handicapés. Pour rappel, cette aide doit permettre « la compensation par l’Etat des charges supportées par les établissements et services d’aide par le travail (Esat) au titre de la rémunération, des cotisations sociales, du financement partiel de la formation professionnelle continue et de la prévoyance des travailleurs handicapés admis dans ces services ».

Le nombre de places ainsi financées ne change pas par rapport à l’an dernier : il reste à environ 120 000.

b) Entreprises adaptées et aides individuelles

Le taux de chômage des personnes en situation de handicap est toujours deux fois plus élevé que celui de l’ensemble de la population active. Les entreprises adaptées ont fait l’objet d’une réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2019 dont l’objectif principal est de favoriser une plus grande diversité des publics accueillis. Cette question est traitée par le programme 102 « Accès et retour à l’emploi », assuré par le ministère du Travail.

Le financement de l’Etat pour les entreprises adaptées augmente pour la troisième année consécutive, pour atteindre 407,47 millions d’euros l’année prochaine (contre 377 millions d’euros en 2018). Le gouvernement veut accueillir 40 000 personnes en plus dans le secteur adapté à l’horizon 2022. 12 millions d’euros seront consacrés au système d’incitation à la formation des travailleurs handicapés.

3. Inclusion scolaire des élèves

Comme l’an dernier, l’action 03 relative à l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap bénéficie d’une hausse budgétaire. En 2020, le budget de l’Etat atteindra 1,77 milliard d’euros, soit une hausse de 14,20 % sur un an.

La rémunération des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) pèse à elle seule 807 millions d’euros. 4 000 équivalents temps plein supplémentaires pourront être créés d’ici fin 2020. Un peu plus de 8 millions d’euros seront consacrés à la formation des AESH.

C. Lutte contre la maltraitance

Les pouvoirs publics mesurent le niveau de réalisation de l’objectif de lutte contre les situations de maltraitance des personnes vulnérables grâce à l’analyse du taux des appels traités par la plateforme nationale du numéro 3977, créée en février 2008. Les personnes âgées et les personnes handicapées sont concernées par ces actions qui seront financées à hauteur de 1,8 million d’euros en 2020, soit le même montant que l’année passée.

II. Insertion et emploi

L’insertion professionnelle et l’emploi dépendent en majeure partie de la mission « travail et emploi » qui dépend elle-même du ministère du Travail. Dans cette partie seront également traités les dispositifs d’insertion au sens plus large, pilotés par le ministère des Solidarités et de la Santé.

A. Insertion

1. Lutte contre la pauvreté

Avant de parler travail, il s’agit d’abord de permettre aux citoyens les plus fragiles de pouvoir survivre, même sans emploi. Les aides poursuivant cet objectif d’inclusion sociale dépendent du ministère des Solidarités et de la Santé. En 2016, 8,8 millions de personnes vivaient au-dessous du seuil de pauvreté qui est de 1 015 € par mois. La pauvreté touche 13,8 % de la population française. Pour le gouvernement, l’objectif premier pour sortir les ménages de la pauvreté est d’« inciter à l’activité et au maintien dans l’emploi ».

Le programme 304 « inclusion sociale et protection des personnes » finance plusieurs actions qui permettent notamment de financer la prime d’activité, les actions de la stratégie interministérielle de lutte contre la pauvreté et les crédits de l’aide alimentaire.

La prime d’activité et les autres dispositifs liés absorbent la plupart des crédits du programme (10,78 milliards d’euros dont 9,5 milliards pour la seule prime d’activité, contre 6 milliards d’euros en 2019). En mars 2019, le nombre de foyers allocataires de cette prime s’élevait à 4,1 millions. En un an, cela représente une hausse de 52 %. La prime de Noël, créée en 1998, coûtera 467,8 millions d’euros en 2020, pour une hypothèse de 2,3 millions de bénéficiaires. Quant au revenu de solidarité active (RSA) jeunes, le montant des dépenses est estimé à 4,5 millions d’euros.

Enfin, 75,4 millions d’euros seront consacrés au dispositif de l’aide alimentaire, c’est 20 millions d’euros de plus que l’an dernier (51,6 millions d’euros).

Le RSA relevant de la compétence départementale, il n’y a donc pas d’élément budgétaire précis à ce sujet dans le projet de loi de finances, qui concerne les dépenses de l’Etat uniquement.

2. Insertion dans l’emploi

Pour 2020, le gouvernement a prévu un taux de retour à l’emploi légèrement différent de l’an dernier (3,5 %, contre 3 % l’an passé).

En crédits de paiement, l’action sur l’amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi sera dotée de 3,6 milliards d’euros. Un montant en baisse d’environ 50 millions d’euros après une autre baisse déjà amorcée l’an passé à hauteur de 400 millions d’euros. L’action sur l’amélioration des dispositifs en faveur de l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail sera elle aussi dotée de moins de crédits de paiement que l’année dernière : 2,1 milliards d’euros contre 2,3 milliards en 2019, du fait principalement de la suppression des contrats aidés. Pour rappel, les sous-actions relatives aux contrats aidés coûtaient encore presque 500 millions d’euros en 2019. Cela a notamment permis à l’Etat de consacrer davantage de budget à la sous-action « accompagnement des publics les plus en difficulté », dont le budget est passé à 1,76 milliard d’euros, contre 1,57 milliard en 2019.

La mise en place du Fonds d’inclusion dans l’emploi, créé par une circulaire du 11 janvier 2018, sera poursuivie en 2020. Cette année, son développement s’articulera autour de trois axes. D’abord, par le recentrage des emplois aidés vers le secteur non marchand et les personnes les plus éloignées du marché du travail. Ensuite, par une augmentation des solutions d’insertion par l’activité économique à hauteur de 1 milliard d’euros. Enfin, par la mise en œuvre de la réforme des entreprises adaptées.

B. Emploi

Les moyens alloués à la politique concernant le travail et l’emploi passent notamment par le programme 111 relatif à l’amélioration de la qualité de l’emploi et des relations de travail. Son objectif est d’« améliorer les conditions d’emploi et de travail des salariés du secteur concurrentiel (16 millions de personnes) ». Il s’appuie sur trois piliers : la qualité du droit, sa diffusion et le contrôle de sa mise en œuvre, le conseil et l’appui au dialogue social. Principales priorités : la mise en œuvre de la réforme du dialogue social impulsée par les ordonnances de septembre 2017 et le renforcement de la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement.

La mission « travail et emploi » comprend également les programmes 102 et 103 : accès et retour à l’emploi et accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi. Objectif commun : compléter les mesures générales de réduction du coût du travail. Dans le bleu budgétaire, le ministère du Travail affirme que les ordonnances « travail » et la loi « avenir professionnel » « donneront leurs pleins effets en 2020 ».

III. Logement

Les aides à l’accès au logement, le logement social et la lutte contre l’habitat indigne sont les trois principales politiques publiques en matière de logement.

A. Aides à l’accès au logement

L’aide à l’accès au logement bénéficie de tout un programme dédié. Le ministère de la Cohésion des territoires mène ce programme sur deux axes. Le premier est celui « des aides à la personne, ciblées sur les ménages aux ressources les plus modestes, qui constituent le principal poste budgétaire du logement ». Le second axe consiste en une politique de solidarité pour l’accès au logement décent « qui nécessite une mobilisation de tous les acteurs et une cohérence d’action ».

En 2020, 12 milliards d’euros seront consacrés aux aides personnelles au logement via le financement du Fonds national d’aide au logement (Fnal). Un montant en baisse de 1 milliard d’euros par rapport à 2019, qui suit une précédente baisse de 400 millions d’euros. Pour rappel, il existe trois types d’aides : l’allocation de logement à caractère familial (ALF), l’allocation de logement à caractère social (ALS) et l’aide personnalisée au logement (APL). En 2017, 6,5 millions de ménages ont bénéficié d’une aide.

Le montant du financement du Fnal tient compte, cette année :

• de la réduction de loyer de solidarité dans le parc social, fixée à 1,3 milliard d’euros en 2020 ;

• de la réforme du mode de calcul des aides au logement qui sera mise en place dès janvier 2020 ;

• d’un abondement du Fnal par Action logement à hauteur de 500 millions d’euros ;

• de la compensation par l’Etat de la baisse de 166 millions d’euros des cotisations employeurs versées au Fnal induite par le relèvement du seuil d’assujettissement des employeurs à cette cotisation à la suite du vote de la loi « Pacte » ;

• d’une revalorisation de l’ensemble des paramètres du barème à un taux forfaitaire de 0,3 % en 2020. En outre, le budget consacré à l’action « information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté » sera l’année prochaine de 8,3 millions d’euros, un montant stable par rapport aux années précédentes.

B. Logement social et droit au logement

Le logement social occupe une place importante dans le programme 135 « urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ». Le gouvernement ne cache pas son ambition de produire davantage de logements locatifs sociaux « prioritairement financées dans les zones où la demande de logement social est la plus forte et où les loyers privés sont les plus élevés ». En 2019, ce programme sera doté de 61 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2019 et atteindra 285 millions d’euros en crédits de paiement. Deux missions mobilisent à elles seules plus des trois quarts de cette somme : elles portant sur la réglementation de la construction (223 millions d’euros) et l’urbanisme et l’aménagement (61 millions d’euros).

Pour le gouvernement, « dans les prochaines années, la différence de mobilité dans le parc social entre zones tendues et zones détendues devrait se réduire sous l’effet du recentrage des aides directes sur les zones les plus tendues ». Mais pour l’heure, l’exécutif table sur une poursuite à la hausse du taux de mobilité en particulier dans la zone A, la plus tendue, « à condition que la demande de logements locatifs sociaux se stabilise ».

14,5 millions d’euros seront ainsi consacrés à la construction locative et à l’amélioration du parc locatif social, dont 4,5 millions pour l’accueil des gens du voyage et 3 millions pour le fonctionnement du système national d’enregistrement de la demande de logement social.

Par ailleurs, 8,1 millions d’euros de crédits de paiement seront consacrés aux commissions de médiation pour la mise en œuvre du droit au logement opposable (Dalo), institué par la loi du 5 mars 2007.

C. Autres actions

La lutte contre l’habitat indigne est une action financée par l’Agence nationale de l’habitat (Anah). En 2020, l’Etat y contribuera à hauteur de 20 millions d’euros en crédits de paiement.

L’aide aux travaux pour les propriétaires modestes sera dotée de 10 millions d’euros. En 2019, ils avaient été consacrés à des territoires particulièrement touchés par la problématique de l’habitat indigne, comme en Seine-Saint-Denis ou dans les Bouches-du-Rhône.

IV. Immigration et intégration

La mission « immigration, asile et intégration » dépend du ministère de l’Intérieur. Dotée de 1,8 milliard d’euros en crédits de paiement pour 2020, elle est composée de deux programmes : « immigration et asile » et « intégration et accès à la nationalité française ». Le montant total est en hausse de 9,8 % par rapport à 2019, soit + 162,4 millions d’euros.

Comme l’indique le bleu budgétaire, la mission se structure autour de trois axes :

• la maîtrise des flux migratoires ;

• l’intégration des personnes immigrées en situation régulière ;

• la garantie du droit d’asile.

Remarque : La politique sur l’immigration et l’intégration fait l’objet d’un document de politique transversale – ou orange budgétaire, dans le jargon des finances publiques. Toutes participations confondues, cette politique transversale sera dotée de 6,67 milliards d’euros en crédits de paiement en 2020.

A. Immigration et asile

Réduire les délais de traitement de la demande d’asile est le premier objectif poursuivi par le ministère de l’Intérieur, au regard, garantit-il, « des conséquences humaines pour les demandeurs » : « une personne en besoin de protection doit pouvoir bénéficier d’une décision rapide pour s’insérer dans les meilleures conditions en France », ajoute le ministère. 1,2 milliard d’euros seront consacrés à cette action en 2020.

Conformément au plan d’action du 12 juillet 2017, le gouvernement compte utiliser plusieurs leviers pour « optimiser la prise en charge des demandeurs d’asile », dont la réduction des délais d’instruction des demandes par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), et la création de places en centre d’accueil (2 000 en 2018 et 1 000 en 2019) et en hébergement d’urgence (5 000 entre 2018 et 2019).

1. Traitement des demandes et hébergement

Le délai moyen de traitement d’un dossier par l’Ofpra était de 150 jours en 2018, soit 35 jours de moins qu’en 2017. L’an dernier, le gouvernement avait pour objectif drastique de passer à 60 jours en moyenne. Grande déception cependant, puisqu’il a été de 190 jours. Le ministère de l’Intérieur l’explique par la hausse ininterrompue des demandes introduites auprès de l’Ofpra ces trois dernières années : + 22 % en 2018 et + 17 % en 2016. Pour tenir le cap, une soixantaine d’officiers de protection devraient être recrutés à la fin de l’année 2019. En 2020, 90 officiers supplémentaires seront recrutés. Cela devrait permettre d’absorber le stock existant.

En 2019, 52 % des demandeurs d’asile sont hébergés. Le nombre de places disponibles a augmenté de 16 500 entre 2018 et 2019. « L’enjeu en 2020, explique le ministère, sera de continuer à améliorer nos conditions d’accueil des demandeurs d’asile en veillant à la bonne application des dispositions de la loi du 10 septembre 2018. » La loi « asile-immigration » prévoit notamment la définition de normes minimales en matière d’accompagnement social et administratif dans les lieux d’hébergement.

Le gouvernement prévoit un chiffre optimiste de 63 % pour 2020 mais cible toujours 86 % en 2020, qui était déjà inscrit au PLF pour 2019. 836 millions d’euros seront dédiés à l’hébergement, dont 317 millions pour les centres d’accueil des demandeurs d’asile (Cada), 31 millions d’euros pour les centres d’accueil et d’examen des situations (CAES) et 488 millions d’euros pour l’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile (Huda).

Remarque : Une partie des personnes migrantes sont hébergées par les crédits du programme 177 « hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». Le gouvernement a prévu de lancer une mission d’inspection pour mieux définir le champ d’intervention respectif entre les deux programmes.

2. Allocations et lutte contre l’immigration irrégulière

L’allocation pour demandeur d’asile (ADA) sera dotée de 444 millions d’euros de crédits de paiement pour 2020, en hausse de 108 millions d’euros par rapport à 2019. Les frais de gestion, assurée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), sont prévus à hauteur de 4,1 millions d’euros.

Enfin, la lutte contre l’immigration irrégulière bénéficiera de 122 millions d’euros en crédit de paiement en 2020. Elle inclut notamment les opérations de réacheminement et d’éloignement du territoire des étrangers qui font l’objet de mesure de non-admission, d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), d’un arrêté ministériel d’expulsion ou d’une interdiction du territoire. Les expulsions au titre de l’ordre public relèvent du programme « police nationale ».

B. Intégration et accès à la nationalité Française

En 2020, le programme « intégration et accès à la nationalité française » bénéficiera d’un budget de 437 millions d’euros en crédits de paiement. L’accueil des étrangers primo-arrivants est l’action qui mobilise le plus de deniers, avec un budget de 258 millions d’euros. L’accompagnement des réfugiés arrive loin derrière avec 115 millions d’euros. Enfin, les actions d’accompagnement des étrangers en situation régulière bénéficient de près de 53 millions d’euros.

La direction générale des étrangers en France, chargée de l’exécution du présent programme rappelle en introduction que chaque année, environ 100 000 étrangers issus de pays tiers à l’Union européenne arrivent en France en situation régulière. Le programme s’articule autour des propositions énoncées par le député (LREM) Aurélien Taché, dans un rapport sur l’intégration rendu le 19 février 2018. Deux objectifs gouverneront le programme d’intégration en 2019 : améliorer les conditions d’accueil et d’intégration et améliorer l’efficacité du traitement des dossiers de naturalisation.

Depuis 2016, le taux d’atteinte du niveau A1 de maîtrise de la langue français stagne entre 60 % et 65 %. Le gouvernement souhaite atteindre 85 % en 2020, grâce notamment à l’accroissement de la durée de formation. C’est en 2020 que les bénéficiaires des formations longues (400 ou 600 heures) les auront terminées. Cela semble bien partir puisque la prévision actualisée dépasse les espérances avec 75 % d’atteinte du niveau A1.

V. Justice

Le budget global de la mission « justice » sera doté de 9,39 milliards d’euros en 2020, soit une augmentation de 3,66 % par rapport à 2019. En dépenses pilotables, c’est-à-dire hors remboursements, dégrèvements et investissements d’avenir, le budget s’élève à 7,585 milliards d’euros. La hausse est de 4 %, soit 1 point de moins que ce qui était prévu par la loi de programmation. 115 millions d’euros ont été déduits du fait du retard de certains chantiers immobiliers pénitentiaires. La mission comprend notamment les programmes « administration pénitentiaire », « protection judiciaire de la jeunesse » et « accès au droit et à la justice ». Dans cette partie, nous traiterons également de la protection juridique des majeurs qui dépend de la mission « solidarité, insertion et égalité des chances ».

A. Pénitentiaire

Dans le PLF 2019, le programme « administration pénitentiaire » bénéficie d’un budget de près de 3,06 milliards d’euros hors contribution au compte d’affectation spéciale pensions (permettant notamment de payer les retraites des fonctionnaires de la pénitentiaire). Le montant est en augmentation de 177,4 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019, soit + 6,2 % après une autre hausse de 6,5 % en 2019.

La pénitentiaire sera dotée de 1 000 emplois supplémentaires, dont 400 pour le renforcement de services d’insertion et de probation. Hors masse salariale, la majeure partie de l’effort budgétaire consenti est affectée à l’investissement immobilier (+ 85 millions d’euros).

Comme l’année dernière, les objectifs de l’administration pénitentiaire portent cette année sur trois « axes stratégiques ». La première priorité a toutefois changé : alors qu’il s’agissait de la réinsertion l’an dernier, le ministère a choisi de placer la sécurité des personnels en premier. La réinsertion arrive ensuite, suivie de l’amélioration de la prise en charge des personnes sous main de justice.

Le taux d’occupation des établissements pénitentiaires est toujours préoccupant, particulièrement en maison d’arrêt et dans les quartiers maison d’arrêt. En 2019, il devrait être de 138 %. Le ministère de la Justice cible 135 % en 2020, soit une baisse de 3 points. Un objectif qui apparaît comme particulièrement optimiste.

En 2020, 73,9 millions d’euros seront consacrés à la prévention de la récidive et à la réinsertion des détenus.

B. Justice des mineurs

Le programme « protection judiciaire de la jeunesse » (PJJ) sera doté d’un budget de 893 millions d’euros, un budget en hausse de 18 millions d’euros par rapport à la loi de finances 2019.

Il est intéressant de constater que le ministère de la Justice travaille déjà sur la nouvelle procédure issue de la réforme de l’ordonnance de 1945. L’ordonnance de création d’un code de la justice pénale des mineurs a été publiée au Journal officiel cette année, mais l’examen du projet de loi de ratification n’a pas encore débuté. Cette réforme entrera en vigueur le 1er octobre.

Deux objectifs gouvernent le programme « PJJ ». D’une part, « garantir une aide à la décision efficace et améliorer la qualité des prises en charge éducatives » et, d’autre part, « optimiser l’emploi des moyens humains, financiers et matériels ». 70 emplois nets seront créés. 29 postes sont supprimés au titre d’un redéploiement permis par la restructuration des dispositifs de prise en charge, et 94 emplois seront créés pour la mise en œuvre de la réforme.

Remarque : La justice des mineurs fait l’objet d’un document de politique transversale. Toutes participations confondues, cette politique transversale sera dotée de 1,62 milliard d’euros en crédits de paiement en 2020. Plus de la moitié de ce budget provient du programme « PJJ ».

C. Autres

1. Protection juridique des majeurs

La protection juridique des majeurs dépend de la mission « solidarité, insertion et égalité des chances », programme « inclusion sociale et protection des personnes », dans lequel elle y prend une petite place. 688 millions d’euros y seront consacrés en 2019. Des nouvelles dispositions, issues du rapport d’Anne Caron-Déglise, ont été inscrites dans la loi de réforme pour la justice. D’autres seront intégrées dans la future loi sur le grand âge et l’autonomie, initialement prévue pour l’automne 2019, mais repoussée à 2020.

2. Accès au droit

Le programme « accès au droit » comprend le financement de l’accès à la connaissance de ses droits, de l’aide aux victimes d’infractions pénales et, bien sûr, de l’aide juridictionnelle. Trois objectifs conduisent ce programme qui sera doté de 467 millions d’euros l’année prochaine : l’amélioration de la qualité et de l’efficience du service rendu en matière d’accès au droit et à la justice, l’amélioration de l’allocation des ressources consacrées à l’aide juridictionnelle et l’amélioration de l’accompagnement des victimes d’infractions. Sans grande surprise, c’est bien l’aide juridictionnelle qui absorbe la plus grande partie des crédits de ce programme : 484 millions d’euros. La prévision de dépense pour la rétribution de base des avocats est estimée à 459,9 millions d’euros. Le délai moyen de traitement des demandes d’aide juridictionnelle reste à 37 jours. L’objectif du gouvernement est de passer sous ce délai.

L’essentiel des mesures, côté dépenses

Recentralisation du RSA et du RSO en outre-mer (art. 25)

A compter du 1er janvier 2020, la caisse d’allocations familiales de La Réunion exercera les compétences d’instruction et d’attribution du droit au revenu de solidarité active (RSA). La réforme avait déjà été engagée s’agissant de la Guyane et de Mayotte au 1er janvier 2019. L’Etat prendra donc en charge le RSA à compter de 2020. La recentralisation sera financée par une mesure de périmètre au titre de la reprise des recettes précédemment affectées au département de La Réunion, pour un montant d’un peu plus de 607 millions d’euros.

Compensation des revalorisations du RSA en faveur des départements (art. 64)

La loi de finances pour 2014 prévoyait déjà un triple mécanisme de ressources supplémentaires affectées aux départements pour compenser la charge résultant des revalorisations exceptionnelles du RSA. Le PLF pour 2020 précise les modalités de compensation.

Contribution de l’Agefiph à la transformation de entreprises adaptées (art. 65)

Le PLF pour 2020 met à contribution l’Association de gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) au soutien financier des entreprises adaptées, à auteur de 50 à 55 millions d’euros par an pour les années 2020 à 2022. Ces moyens supplémentaires sont justifiés par l’objectif de création de 40 000 emplois supplémentaires en entreprises adaptées.

Suppression de l’indexation de la réduction du loyer de solidarité (art. 67)

Le PLF prévoit enfin que, pour l’année 2020, le montant des plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la réduction de loyer de solidarité ne soit pas indexé sur l’inflation.

Dérogation à l’augmentation annuelle de certaines prestations sociales (art. 67)

Par dérogation aux modalités de revalorisation légales applicables, le PLF pour 2020 revalorise de + 0,3 % (au lieu du 1 % prévu) :

• les paramètres de calcul de l’aide personnalisée au logement, de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale le 1er octobre 2020 ;

• le montant de l’AAH le 1er avril 2020 ;

• le montant forfaitaire de la prime d’activité et le montant maximal de sa bonification le 1er avril 2020.

Montant des économies en 2020 : 400 millions d’euros. Cette économie est toutefois à relativiser puisque l’AAH et la prime d’activité ont fait l’objet de revalorisations exceptionnelles, portant la première à 900 €, et la seconde à 551 €.

L’essentiel des mesures, côté recettes

Baisse de l’impôt sur le revenu (art. 2)

La baisse de l’impôt sur le revenu représente un effort de 5 milliards d’euros pour l’Etat. Elle est concentrée sur les deux premières tranches de l’impôt. Le taux de la première tranche, de 10 064 € à 25 669 € passe de 14 à 11 %. Le site impots.gouv.fr a mis en place un simulateur de la baisse d’impôt annoncée. Pour un célibataire sans enfant percevant un revenu net imposable de 20 000 € par an, cela représentant un gain de 300 €. Grâce au prélèvement à la source (PAS) et à des ajustements techniques sur les modalités de calcul du taux du PAS, ces gains pour le contribuable seront perceptibles dès janvier 2020.

Suppression du Cite en 2021, mise en place d’une prime pour les ménages modestes (art. 4)

Le PLF pour 2020 engage la réalisation de la promesse du président de la République lors de la campagne présidentielle de 2017. Le crédit d’impôt pour la transition énergétique (Cite), jugé trop peu perceptible, va progressivement être transformé en une prime réalisée dès l’engagement des dépenses de rénovation énergétique des bâtiments.

La première étape consiste d’abord à créer une prime pour les ménages les plus pauvres au titre de la rénovation de leur logement. Cette prime sera versée par l’Agence nationale de l’habitat. Le PLF proroge le Cite en 2020 pour les ménages non éligibles à cette prime, qui n’en bénéficieront qu’en 2021.

Suppression de la taxe d’habitation et réforme du financement des collectivités territoriales (art. 5)

La suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale se fera progressivement. La totalité des contribuables en sera exonérée en 2023. En attendant, c’est un mécanisme d’allégement qui est préféré, qui permettent de minorer la charge due par la taxe d’habitation. Cette démarche a déjà été engagée l’an dernier. Ce dégrèvement dépend du revenu fiscal de référence (RFR). Pour être totalement exonéré en 2020, un célibataire sans enfant doit avoir un RFR inférieur ou égal à 27 432 €.

Baisse du taux de la TVA sur certains logements locatifs sociaux (art. 8)

Le PLF pour 2020 abaisse plusieurs taux de TVA de 10 % à 5,5 %, et ce jusqu’en 2022 :

• ceux portant sur les logements locatifs sociaux (LLS) financés par un prêt locatif aidé d’intégration (Plai) ;

• ceux portant sur les autres logements locatifs sociaux éligibles à un prêt locatif à usage social (Plus), ainsi que pour les logements situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) faisant l’objet d’une convention de rénovation ;

• ceux applicables aux livraisons de structures d’hébergement temporaire ou d’urgence ;

• ceux applicables aux livraisons de foyers de jeunes travailleurs (ajout d’un amendement en commission).

Pour les chefs d’entreprise et les employeurs

Trajectoire de la baisse de l’IS pour les plus grandes entreprises (art. 11)

L’article 11 du projet de loi de finances pour 2020 aménage de façon ponctuelle et ciblée la trajectoire de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) pour les exercices ouverts en 2020 et 2021 par les entreprises réalisant un chiffre d’affaires d’au moins 250 millions d’euros.

Pour ces grandes entreprises, le taux normal sera :

• au titre des exercices ouverts en 2020, de 31 % au lieu de 28 %, ce dernier taux demeurant néanmoins applicable à la fraction de bénéfice n’excédant pas 500 000 € ;

• au titre des exercices ouverts en 2021, de 27,5 % au lieu de 26,5 %.

Pour rappel, les petites et moyennes entreprises (PME) dont le chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros sont imposées au taux réduit de 15 % sur leurs premiers 38 120 € de bénéfice, sous réserve qu’elles soient détenues à hauteur d’au moins 75 % par des personnes physiques ou par des sociétés qui satisfont elles-mêmes cette condition de détention (code général des impôts, art. 219, I).

Exonération de certaines contributions (CFE, TFPB, CVAE) en milieu rural (art. 47)

Concentré sur les petites activités commerciales (entreprises de moins de 11 salariés réalisant moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires) et les territoires ruraux les plus fragiles, le dispositif de l’article 47 du PLF pour 2020 consiste à exonérer les établissements commerciaux éligibles situés dans une zone de revitalisation des commerces en milieu rural de trois contributions : la cotisation foncière des entreprises, la taxe foncière, la cotisation sur la valeur ajoutée.

Il incombera aux communes d’instituer cette exonération. L’Etat n’y participera pas financièrement : le manque à gagner sera uniquement supporté par les collectivités.

Taxe CDD d’usage (art. 51)

La réforme de l’assurance chômage a introduit un système de bonus-malus relatif aux contrats à durée déterminée. L’article 51 du PLF pour 2020 prévoit l’instauration d’une taxe de 10 € due par l’employeur au titre de chaque CDD dit « d’usage » (CDDU).

L’article 51 comprend quatre exceptions à cette taxe :

• les CDDU conclus avec les intermittents du spectacle ;

• les CDDU conclus avec les ouvriers dockers occasionnels ;

• les associations intermédiaires conventionnées par l’Etat agissant en matière d’insertion par l’activité économique ;

• les secteurs qui ont déjà prévu par un accord collectif de limiter le recours abusif à ce type de contrat.

Une offre de soins à parfaire, selon la commission des affaires sociales

Dans son avis sur la partie du projet de loi de finances pour 2020 consacrée à la pénitentiaire, le député Bruno Questel, de la commission des affaires sociales, alerte sur le niveau de l’offre de soins pour les détenus. Il relève que « l’organisation des soins en détention s’avère en pratique incomplète en raison de difficultés structurelles ».

La surpopulation carcérale est la première raison soulevée par le député, puisqu’elle a « un impact sur la charge de travail des praticiens ». Leurs effectifs ne sont en effet pas fixés selon la population réelle des établissements, mais selon leur population théorique. De surcroît, la profession pâtit d’un manque d’attractivité. En 2015, 22 % des postes de spécialistes budgétés n’étaient pas pourvus.

Notes

(1) A jour des amendements adoptés au 26 novembre 2019.

Dossier juridique

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur