Aujourd’hui, la France compte 15 millions de personnes âgées de 60 ans et plus (soit 18 % de la population). En 2030, il y en aura 20 millions et 24 millions en 2050. Ce vieillissement de la population aura nécessairement des conséquences. Si la question de la dépendance est régulièrement mise en avant, celle de l’autonomie des personnes âgées est beaucoup moins discutée. Pourtant, ce sont bien la préservation de l’autonomie et la prévention qui sont les enjeux majeurs de demain. « L’avenir c’est le grand âge sans incapacité », confirme Jean-Christophe Billou, responsable de la Fédération nationale des maisons d’accueil et de résidence pour l’autonomie (Marpa). Et d’ajouter : « Les différentes études et rapports sur le sujet ont tendance à montrer que la dépendance est quelque chose d’inéluctable. Or, ce constat est totalement faux. En effet, dans les années à venir, nous serons essentiellement des personnes âgées fragiles et autonomes. » Mais concrètement qu’est-ce que l’autonomie ? Il s’agit de la possibilité pour une personne de mener sa vie comme elle l’entend, avec toutes ses capacités et toute la liberté que cela implique.
Face au constat du vieillissement tel qu’il sera dans les années à venir, il est donc urgent que les politiques publiques, les associations, le privé lucratif comme non lucratif anticipent et proposent des offres de services à ces personnes âgées fragiles et autonomes. Le maintien à domicile est évidemment une solution mais ce ne peut pas être la seule. Parfois cela ne peut pas l’être du tout. En effet, certaines personnes âgées ne peuvent pas rester chez elles pour des raisons financières, de logement inadapté, de solitude… Il faut donc trouver des alternatives, des possibilités d’hébergement et d’accompagnement dans des établissements adaptés pour accueillir ces personnes âgées autonomes et fragiles. Outre le maintien à domicile, qui demeure la solution majoritaire, la volonté principale des seniors, il faut donc développer des structures différentes. Parmi ces solutions d’hébergement, il y a les résidences autonomie, thématique de l’une des conférences du Salon des services à la personne et de l’emploi à domicile qui a eu lieu les 26 et 27 novembre à Paris.
Ces résidences autonomie ont été instituées par la loi d’adaptation de la société au vieillissement (ASV), en 2015, mais elles existaient auparavant sous le nom de « logements-foyers ». Mais cette offre, qui datait de 1957, était devenue inadaptée. Dès lors, la loi « ASV » a permis de renforcer le rôle et la place des résidences autonomie dans le panel des « habitats intermédiaires ». Aujourd’hui, il en existe 2 200 sur l’ensemble du territoire, ce qui représente 14 % de l’offre d’hébergement proposée aux personnes âgées. Plus précisément, selon les données de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), fin 2015, parmi les 728 000 personnes accueillies en établissements, un peu moins de 102 000 l’étaient en résidences autonomie [les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) représentants une majorité écrasante de l’offre avec près de 600 000 places, ndlr]. « C’est le fruit d’une volonté politique qui a existé de 1970 à 2010, estime Jean-Christophe Billou. Les pouvoirs publics faisaient la promotion des Ehpad sans parler des offres alternatives existantes. Mais, l’avenir étant le grand âge sans incapacité, les Ehpad ne peuvent pas répondre à cette demande des seniors. Il faut donc développer les établissements intermédiaires. Il y a donc une vraie politique à engager : la création de places en premier lieu mais aussi de réhabilitation de certaines résidences qui ne sont plus adaptées. »
L’une des caractéristiques premières de la résidence autonomie est son implantation en centre bourg pour être à proximité des services, des commerces. Ainsi, les résidents sont impliqués, associés à la vie locale. Depuis 2015 et la loi « ASV », la résidence autonomie est juridiquement considérée comme un établissement médico-social. « Ce qui implique de donner une garantie suffisante de qualité de services aux résidents, appuie le responsable de la Fédération nationale des Marpa. Cette qualité de services est obligatoire et évaluée par l’autorité administrative, en l’occurrence les conseils départementaux, qui donne et renouvelle l’autorisation d’ouverture. » Le régime juridique implique aussi de mettre à disposition, pour la personne âgée, un contrat de séjour signé entre le résident et l’établissement. Ce qui suppose un certain nombre d’obligations, notamment en terme de tarif. Il y a aussi l’obligation d’être évalué régulièrement par l’autorité administrative. Cette évaluation est très large car elle porte sur l’intégralité de la qualité de services (accueil et intégration des personnes âgées, qualité du bâti, contrôle des tarifs, de la qualité des repas…). Enfin, les résidences autonomie ont aussi un statut juridique, complémentaire à celui de l’établissement médico-social, qui implique en particulier d’accueillir un public cible bien précis, celui des personnes âgées fragiles et non des personnes dépendantes.
« Les résidences autonomie accueillent en moyenne 46 résidents, précise encore Jean-Christophe Billou. Cela veut dire que ce sont des établissements à dimension humaine. Il y a vraiment la volonté d’avoir un accueil limité pour mieux les accompagner. 30 % des résidences autonomie ont même moins de 30 résidents. » Parmi les autres chiffres importants à connaître sur ces établissements, il est à noter que, en moyenne, six équivalents temps plein (ETP) travaillent dans ces structures. De plus, 74 % des résidents sont en GIR 5-6, pour seulement 2 % de personnes en GIR 1 ou 2. Il y a 78 % de femmes avec une moyenne d’âge de 80 ans, contre 85 ans en moyenne dans l’ensemble des établissements. La clientèle est donc plus jeune en résidence autonomie. Enfin, très majoritairement (90 %), les personnes vivent seules.
Si 90 % de l’accueil est permanent, ses structures proposent de plus en plus un accueil temporaire, qui permet au senior de s’acclimater à la vie en établissement. Il est possible également d’y être accueilli à la demi-journée. « La volonté des résidences autonomie est en effet d’être des établissements tournés vers l’extérieur et donc de proposer un accueil aux seniors venus de l’extérieur, précise encore le responsable de la Fédération nationale des Marpa. Ces résidences sont de véritables actrices du territoire, totalement intégrées dans le paysage local. » Concrètement, les personnes âgées arrivent pour le déjeuner. Souvent, un service de transport est proposé par la résidence autonomie, les personnes sont prises en charge chez elles. Elles déjeunent avec les autres résidents et participent ensuite aux activités d’animation. Elles peuvent parfois rester aussi pour le dîner avant ensuite de rentrer chez elles. « Certaines résidences autonomie vont encore plus loin et proposent des services d’aide à domicile et/ou une prise en charge à domicile nocturne, ajoute Jean-Christophe Billou. C’est-à-dire que le service de téléassistance proposé dans les résidences autonomie est intégré dans le domicile de la personne. On peut donc parler de résidences autonomie hors les murs, comme on parle d’Ehpad hors les murs. »
L’une des particularités de la résidence autonomie est aussi liée à la qualité de l’hébergement proposé. A la différence de l’Ehpad, les résidents n’occupent pas des chambres mais bel et bien de véritables appartements. La surface minimale est de 30 m2 et cela peut aller jusqu’à 45 m2 pour des couples (voire au-delà parfois). Il s’agit d’un vrai logement avec kitchenette, notamment parce que les prestations proposées sont facultatives. S’ils n’ont pas envie de déjeuner avec les autres résidents, ils peuvent le faire chez eux. Cela permet aussi, lors des visites de la famille ou de proches, de pouvoir recevoir plus tranquillement. « C’est un véritable domicile proposé aux résidents, résume Jean-Christophe Billou. Dans les résidences autonomie les plus récentes, une place de stationnement est même prévue pour les qui continuent de conduire. Il faut donc leur donner la possibilité de garer leur voiture. »
Les résidences autonomie ayant une vocation sociale, le coût des loyers est donc modéré. La facture se décompose en différentes parties : le loyer ou la redevance, les charges locatives, les frais liés aux prestations incluses (ex. : la prestation de restauration, en fonction du système proposé), les frais liés aux prestations facultatives (ex. : les sorties extérieures). Toutefois, « les résidences autonomie sont tenues à une qualité de services maximale, dans tous les domaines », souligne Jean-Christophe Billou. Il y a notamment une garantie de sécurité de jour comme de nuit. Mais aussi une prestation repas, même si celle-ci est assez variable selon les établissements. Ainsi, certains font trois repas par jour, 7 jours sur 7 quand d’autres ne proposent pas de repas le week-end ou les jours fériés. Il y a aussi une prestation lingerie, parfois en libre-service. Il y a obligatoirement un accès numérique. Le minimum étant une borne Internet dans les zones communes mais régulièrement le wi-fi est proposé dans chaque logement. Enfin, la continuité des soins est assurée même si la plupart des résidents n’en ont pas besoin. Mais quand c’est le cas, ils peuvent faire appel aux services de soins infirmiers à domicile ou aux cabinets d’infirmiers libéraux ou au médecin traitant. Bref, en résidence autonomie, tout est fait pour garantir au maximum le bien-être des seniors.