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Un « New Deal » pour le secteur de l’aide à domicile

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Un « New Deal » pour le secteur de l’aide à domicile

Crédit photo Nathalie Auphant
Faire mieux, sans dépenser plus, telle est l’ambition d’Adessadomicile avec la construction d’un « New Deal » « en faveur des personnes âgées et des professionnels qui s’en occupent ». Pour en démontrer les avantages financiers et humains, une évaluation socio-économique a été réalisée, elle révèle que proposer un « bouquet de services » n’a pas de surcoût économique pour la société.

Un « New deal » pour les services de l’aide à domicile, l’ambition est grande, certainement à la hauteur des difficultés que connaît depuis des années ce secteur : financières pour de nombreux services, mais aussi organisationnelles, le recrutement est difficile avec des métiers peu attractifs alors que la souffrance des professionnels est dénoncée régulièrement.

Une situation d’autant plus préoccupante que les projections démographiques font état d’un doublement du nombre de personnes de plus de 75 ans, passant de 6 millions en 2019 à 14 millions en 2070 selon l’Insee. Par conséquent, le nombre de personnes âgées en situation de dépendance devrait également progresser de 1,3 à 2,5 millions entre 2017 et 2060, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Dress). Parallèlement à ces prévisions, de nombreuses études/sondages ont révélé qu’une grande majorité de ces personnes âgées – plus ou moins 90 % selon les sources – veulent rester chez elles, mais pas seulement. Elles veulent également avoir une vie sociale, être actrices de leur vie et être autonomes le plus longtemps possible. Pourtant, selon Adessadomicile, fédération qui rassemble 350 associations, employeurs de 25 000 professionnels du secteur, « l’aide à domicile telle qu’elle est organisée aujourd’hui ne permet pas de répondre à ce désir profond ». L’aide actuelle relèverait plus d’un service de survie (lever, laver, faire manger, faire le ménage, et coucher la personne) qu’a un accompagnement à la vie.

Face à ce constat, Adessadomicile a lancé une étude sur la construction d’un « New Deal » « en faveur des personnes âgées et des professionnels qui s’en occupent », rendue publique le 27 novembre dernier à l’occasion du Salon des services à la personne et de l’emploi à domicile à Paris. Ce New Deal repose sur un principe essentiel : il s’agit de redimensionner l’aide à domicile afin de « pouvoir apporter non plus un accompagnement a minima, assuré aujourd’hui, mais un véritable bouquet de services en plus », selon l’analyse d’Adessadomicile. Ainsi, au-delà des services à domicile traditionnels, ce modèle de New Deal pour le grand âge au domicile prévoit, pour toutes les personnes âgées dépendantes, de l’aide administrative, une coordination efficace avec les services médicaux, de l’accompagnement favorisant le lien social, des ateliers de formation en numérique ou encore de prévention des chutes et d’accompagnement à la vie sociale, pouvant se matérialiser par des services de transport. Pour cette fédération, il s’agit de redonner une citoyenneté à ces personnes afin de ne pas les laisser enfermer chez elles. Dans ce modèle, les services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) sont le pivot de l’action auprès des personnes âgées dépendantes. Il aurait pour conséquence une amélioration du quotidien de la personne et également des conditions de travail des professionnels.

Un financement neutre

Outre cet aspect humain non négligeable, ce modèle aurait un impact direct à la baisse sur d’autres postes de dépenses. Alors que les personnes âgées insuffisamment accompagnées chez elles basculeraient dans les problèmes, un meilleur accompagnement permettrait une baisse des dépenses de santé : diminution du recours aux urgences et du nombre de séjours hospitaliers, un retardement des dépenses liées à un placement en établissement et une diminution du montant totale des allocations personnalisées d’autonomie (APA) à domicile, compte tenu de la prolongation de la durée de vie en autonomie. Des affirmations qui ont été vérifiée par une évaluation socio-économique, réalisé par Citizine, un cabinet indépendant spécialisé dans l’évaluation des politiques publiques et de leurs gains socio-économiques. Adessadomicile, en partenariat avec l’union d’organismes de prévoyance Ocirp, a fait appel à cet outil d’aide à la décision publique, fortement utilisé dans le secteur des infrastructures et reconnu académiquement, pour assurer aux décideurs politiques que ce modèle est plus créateur de valeur qu’il ne coûte.

Il en ressort que le New Deal serait neutre financièrement puisque les impacts attendus généreront 3,7 milliards d’économies par an et 700 millions de gains sociétaux. Des résultats optimistes qui font dire à Patrick Malfphette, président d’Adessadomicile : « L’Etat a les moyens de proposer aux personnes âgées une vie épanouie au domicile, puisque faire mieux ne coûterait rien. Et d’ajouter : Le coût du bouquet sera compensé par les gains socio-économiques qu’il produira. »

Dans cette étude, l’impact (voir graphique) a été calculé pour l’accompagnement de 750 000 personnes âgées moyennement ou très dépendantes (GIR 1 à 4) qui vivent à domicile et bénéficient de l’APA. Cette évaluation s’appuie sur la littérature académique, qui montre un lien causale entre ces dispositifs multi-composantes tels que le modèle proposé par Adessadomicile et la réduction des passages aux urgences. En effet, par la prévention et la promotion de l’activité physique et cognitive, ces services contribuent à réduire les maladies et accidents qui mènent aux urgences fréquemment. Les résultats de Lewis, et al. (2014) montrent que les personnes bénéficiant d’une offre de services multi-composante ont moins recours aux urgences, à hauteur de 8,8 % par rapport à celle des services d’aide à domicile classique. Cette réduction des passages aux urgences entraînerait une économie de 4,5 millions d’euros pour les finances publiques. Il en est de même pour les hospitalisations, la baisse des séjours serait de 9 % soit une économie de 138,4 millions d’euros. De façon assez proche, il est estimé dans cette étude que les ateliers de prévention des chutes et d’accompagnement à la vie sociale ont un effet sur la mobilité et les capacités physiques des personnes âgées dépendantes. Ainsi en évitant 0,7 chute par personnes âgées par an, les services du New Deal devraient générer un gain socio-économique valorisé par cette étude à environ 85 millions d’euros par an.

Rompre l’isolement

Par ailleurs alors que la perte d’autonomie mène souvent à l’isolement social, cette population est très vulnérable à la dépression. Or le New Deal propose des actions ciblant directement la rupture de l’isolement, en proposant des moyens pour sortir plus souvent de chez elles, mais aussi de rencontrer des personnes au travers des ateliers de prévention des chutes et d’utilisation des technologies leur permettant notamment de maintenir le contact avec leurs proches. En France, il est estimé qu’entre 8,6 et 14,1 des personnes âgées dépendantes demeurant au domicile ont des symptômes de dépression. Ces services multi-composantes permettraient de réduire de 7,8 % les cas de dépression selon les résultats de Kono, et al. (2011). L’estimation des économies sur les dépenses de traitement en dépression est de 7 millions d’euros par an.

Cette étude fait également l’hypothèse, en s’appuyant toujours sur des travaux scientifiques, que cette prise en charge de qualité et globale permettrait de retarder de 288 jours l’entrée en établissement, soit une économie de 3,5 milliards d’euros chaque année, dont près d’un milliard pour les finances publiques et 2,5 milliards en reste à charge des familles. De plus, le bien-être lié au fait de rester chez soi plus longtemps a une valeur socio-économique de l’ordre de 628 millions d’euros.

Néanmoins, pour parvenir à cette neutralité du financement, ce New Deal aura besoin de temps, environ deux ans. Hugues Vidor prévient : « L’utilisation partielle de la CRDS [contribution pour le remboursement de la dette sociale] doit être envisagée pour assurer la période de transition de sa mise en place. Et d’ajouter : En tout état de cause, ce New Deal ne pourra exister que si les professionnels du secteur sont mieux reconnus et mieux rémunérés. En conséquence, les 600 millions actuellement demandés par toute la branche de l’aide à domicile dans le cadre du PLFSS restent indispensables pour revaloriser les métiers du grand âge. »

Cette étude, concernant la construction d’un New Deal « en faveur des personnes âgées et des professionnels qui s’en occupent », a été transmises à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé. Adessadomicile espère qu’elle pourra se saisir de cette « vision des Saad » afin de l’intégrer dans la future loi dépendance, qu’elle doit prochainement présenter en conseil des ministres. Si ce n’est pas le cas, cette fédération compte œuvrer auprès des parlementaires pour que ce nouveau modèle de prise en charge globale puisse être proposé sous forme d’amendement.

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