A l’occasion du 30eanniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant (Cide), la Ligue des droits de l’Homme (LDH) alerte l’opinion et les pouvoirs publics sur « les très nombreuses atteintes aux droits de l’enfant en métropole et en outre-mer ». Dans un document de dix pages intitulé « Les atteintes aux droits de l’enfant en France aujourd’hui », publié le 23 octobre, la LDH dresse un état des lieux « non exhaustif », chiffres à l’appui, des violences faites aux enfants. Le spectre est large et couvre les violences intrafamiliales, l’enfermement des enfants, les difficultés d’accès à la scolarisation, la justice des mineurs, la grande pauvreté… « Force est de constater que toutes les stipulations de la Convention ne sont pas effectives en France, actuellement. Des atteintes aux droits de l’enfant peuvent être constatées dans le cadre des relations intrafamiliales comme dans le cadre institutionnel », juge la LDH.
Actuellement en France, le bilan de l’enfance maltraitée est « terrible », avertit l’association. Et de rappeler notamment qu’un enfant est tué par l’un de ses parents tous les cinq jours. « C’est un phénomène constant de 2012 à 2018, avec 72 morts d’enfants en moyenne par an. Aujourd’hui, il est impossible de déterminer précisément le nombre d’enfants tués à la suite de violences intrafamiliales ou de parents condamnés pour ces crimes. En outre, tous les experts s’accordent à dire que les chiffres à notre disposition sont largement sous-estimés. »
Au rang de ce qu’elle qualifie d’« atteintes aux droits de l’enfant dans le cadre institutionnel », la LDH met le focus sur l’enfermement des enfants dans les centres de rétention administrative. « En France métropolitaine, 114 familles dont 208 enfants ont été privés de liberté pour une durée de un à treize jours. En 2018, à Mayotte, 1 221 enfants ont subi ce traumatisme. En 2018, 339 mineurs non accompagnés âgés de 12 à 17 ans ont été enfermés car l’administration les considérait comme majeurs », cite-t-elle. Concernant l’aide sociale à l’enfance (ASE), l’association déplore une prise en charge « a minima et lacunaire » pour les mineurs non accompagnés. La LDH exprime également des inquiétudes concernant le futur code de la justice pénale des mineurs, qui risque « d’être une compilation d’articles de loi venant répondre aux infractions et délits commis par les mineurs, sans dimension éducative permettant la réinsertion ».
La LDH pointe du doigt un parcours « semé d’embûches » pour les enfants en situation de grande précarité ou de handicap. Selon les estimations de la défenseure des enfants, la France compte plus de 100 000 enfants non scolarisés, qui font partie de la communauté des gens du voyage ou qui vivent dans des hôtels sociaux ou des bidonvilles, particulièrement en outre-mer. « Si le droit à l’éducation est un droit fondamental pour tous les enfants, sans aucune distinction, il s’avère qu’en pratique l’accès à l’école en France n’est pas un droit effectif pour nombre d’entre eux, ainsi qu’en témoignent les refus d’inscription ou les tracasseries administratives envers les enfants d’origine étrangère, en grande précarité sociale, sans état civil ou en situation de handicap », déplore la LDH.
Au rang des enfants laissés pour compte figurent aussi 20 % d’enfants qui vivent dans la pauvreté, dont un grand nombre sont sans abri. « La situation des enfants et des familles touchés par la crise économique s’aggrave, en particulier pour les enfants des familles monoparentales et les enfants des bidonvilles ou des “zones urbaines sensibles” ainsi que les enfants qui vivent dans des “hébergements d’urgence”, parfois pendant des années », précise la LDH.
Compte tenu de ce sombre tableau, l’association réclame la mise en place de « politiques publiques ambitieuses et coordonnées » afin de garantir une effectivité des droits fondamentaux des enfants, et que « l’intérêt supérieur de l’enfant soit en toute occasion la considération primordiale ».