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Magico-dynamo-charlatano-thérapie

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J’avais une cousine, elle s’appelait Colette, mais entre nous, on la surnommait Cosette. Elle avait tout le temps mal quelque part. Au ventre, à la tête, au pied, au dos… Et puis il lui arrivait toujours des trucs invraisemblables, dignes d’un cadavre exquis : son chien se faisait écraser par la voiture du vétérinaire, l’eau était coupée pile quand elle avait la gastro…

On l’a toujours connue comme ça, notre petite Cosette : souffreteuse et malchanceuse, entre douleurs et malheurs. Cosette un jour, Cosette toujours. Moi, Florine, ça me faisait presque rire. Presque.

Et puis, un jour, Cosette a eu très mal à la tête. Son médecin lui a prescrit des examens, mais avant ça elle a préféré voir un rebouteux, au cas où, puis une voyante et, de charlatan en magicien, elle a fini par tomber sur l’ami d’un ami qui faisait des miracles pour les gens comme elle. Un type un peu bizarre, un énergéticothérapeute qui travaillait avec les fluides quantiques biodynamiques et qui pouvait, grâce à une thérapie entièrement nouvelle et agréée par la Haute Autorité des Sciences de l’Esprit du Cosmos, colmater les fuites énergétiques, moyennant la modique somme de 666 € par séance.

Bon, j’avoue, on n’a pas tout compris à son discours, mais c’était à peu près ça, et elle avait l’air à fond. Cosette a suivi ses séances, scrupuleusement. Pour mettre toutes les chances de son côté, son biomagicothérapeute lui a également conseillé un nouveau régime alimentaire à base de sirops de plantes importées de Pétaouchnok, cultivées par une tribu aux traditions obscures et récoltées les soirs de pleine lune, selon un rituel très précis alliant chants traditionnels, polka et costumes de cérémonie en plumes de pigeon. Bon, bref, c’était censé être un truc surpuissant, alors Cosette a adopté la plantico-bio-énergético-thérapie. Là, on a tiqué encore un peu, ça commençait à faire un peu cher, tout ça, mais bon, si ça lui faisait du bien…

Cosette a perdu 20 kilos et ses cheveux. Elle avait toujours mal, mais pas d’inquiétude, elle allait vers du mieux, nous disait-elle ! D’ailleurs, son thérapeute l’avait justement adressée à une amie à lui, spécialiste en psychologie des fluides interfamiliaux, afin de commencer une expérience chamano-rituelle qui pourrait l’aider à transformer cette douleur en une expérience de vie transcendante et unique. Nous, on était de plus en plus sceptiques, mais que faire ? Cosette a foncé, s’achetant au passage le matériel nécessaire à la thérapie : une chaise à trois pieds en bois exotique cultivé à Prichipa-Le-Tartuffe, une tunique brodée de poils de dromadaire angora femelle de moins de deux ans, et une lotion à base de lait de lapine et de sperme de rhinocéros dont elle devait s’enduire avant chaque séance.

Les mois ont passé, et plus de nouvelles de Cosette. Injoignable, absente, disparue. Jusqu’à cet appel de l’hôpital, un soir de décembre. Une femme malade, très maigre et délirante avait été déposée aux urgences par un inconnu. Une femme mourante, au dernier stade d’un cancer métastasé qui n’avait été ni diagnostiqué ni traité. Une femme naïve et ruinée qui avait cru un imposteur et en avait payé le prix fort. Cosette un jour, Cosette toujours.

La minute de Flo

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