Dans un avis adopté le 24 septembre, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) demande le retrait de l’instruction ministérielle parue le 4 juillet 2019, qui vise au partage mensuel d’informations entre l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et le 115 concernant les demandeurs d’asile et les réfugiés. C’est « sa plus vive inquiétude » que la CNCDH a voulu exprimer à travers cet avis quant à cette coopération qui pourrait, selon elle, « ouvrir une brèche dans le principe d’inconditionnalité de l’accueil en hébergement d’urgence ». Car si cette instruction est censée permettre une meilleure orientation des demandeurs d’asile vers les dispositifs qui leur sont dédiés, ou vers l’aide au retour volontaire pour ceux qui ont été déboutés, la CNCDH rappelle que le gouvernement ne prévoit pas de créer davantage de places au sein du dispositif national d’accueil (DNA), pourtant largement saturé.
Pour cette instance, ces dispositions risquent de renforcer la précarité des personnes, non seulement parce qu’elles pourraient ne plus faire appel au 115 par peur des contrôles, mais aussi parce qu’elles pourraient se voir refuser le versement de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA). L’instruction prévoit en effet que cette aide, renforcée pour les demandeurs d’asile non hébergés, soit suspendue dès lors qu’ils se trouvent dans un centre du 115.
De plus, le manque de transparence qui entoure ce partage de fichiers nominatifs risque, selon la CNCDH, d’affecter le « cœur de métier » des travailleurs sociaux et le respect du secret professionnel concernant leurs missions auprès des personnes accompagnées, introduit en 2014 par la loi Alur. « Le risque est réel d’un détournement des missions d’accompagnement des travailleurs sociaux vers toujours plus de contrôle, ceux-ci se voyant placés face à des injonctions contradictoires, dans une position très inconfortable au regard de leur engagement et de leur éthique professionnelle », estime la Commission. Au-delà du retrait même de l’instruction ministérielle, la CNCDH appelle le gouvernement à renforcer les dispositifs d’hébergement des demandeurs d’asile et des réfugiés et à respecter ses obligations internationales en matière d’accueil.