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« L’interdiction de l’alcool était contreproductive »

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L’Anpaa 75 et Emmaüs Solidarité ont expérimenté une démarche de réduction des risques liés à l’alcool au CHRS Georges-Dunand, à Paris. Retour sur cette démarche réussie avec Meryem Belkacemi, chargée de mission « santé » chez Emmaüs Solidarité.
Comment est gérée la problématique « alcool » au sein de vos structures ?

L’alcool fait partie du quotidien de l’association Emmaüs Solidarité, car la plupart des personnes que nous accueillons ont des soucis avec cette addiction. Les travailleurs sociaux se sentent parfois très démunis face à cette problématique, ne sachant pas comment accompagner au mieux ces personnes. La mission « santé » d’Emmaüs Solidarité a élaboré des formations pour actualiser leurs savoirs et développer leurs savoir-faire sur la question des addictions. Par ailleurs, la création d’un partenariat avec l’Anpaa(1) a permis, outre des formations, la mise en place d’ateliers à destination des personnes accueillies et/ou hébergées à l’association.

Comment, dans un CHRS, passe-t-on de l’interdiction de l’alcool à une autorisation encadrée ?

En 2015, la démarche de réduction des risques liés à l’alcool s’est naturellement invitée dans notre partenariat avec l’Anpaa. A la suite d’un appel à candidature volontaire auprès des équipes de l’association, le CHRS Georges-Dunand, à Paris, s’est positionné pour accueillir l’expérimentation. C’est une révolution culturelle : généralement, l’alcool est interdit dans les centres d’hébergement. Mais cette interdiction était contre-productive et présentait des méfaits extrêmement importants : les personnes s’alcoolisaient très fortement avant d’arriver. Une consommation excessive dans un temps réduit, qui avait des incidences graves pour leur santé, sans oublier les risques de chutes, d’accidents, de bagarres. Nous étions conscients de l’intérêt d’explorer d’autres façons d’accompagner ces personnes, d’où cette expérimentation avec l’Anpaa. Les travailleurs sociaux étaient ouverts à cette idée de changer de paradigme et d’aller vers une consommation de l’alcool plus encadrée plutôt qu’une interdiction pure et simple.

Quelle méthodologie a été adoptée ?

Une grande phase de diagnostic auprès des équipes et des personnes hébergées a fait remonter les constats, les problèmes, les préjugés. Puis, tout au long de l’expérimentation, il y a eu un accompagnement de l’équipe de la veille sociale et de l’hébergement ainsi que des personnes hébergées pour leur expliquer comment on allait procéder pour essayer de diminuer les difficultés qui allaient émerger lors de cette phase de diagnostic. Il y a un vrai changement de regard et d’attitude de la part des personnes hébergées qui ne consomment pas d’alcool. Au départ, nous ne savions pas quelle forme allait prendre cette autorisation encadrée de l’alcool. Le travail mené par l’Anpaa a permis d’aboutir à cette solution qui permet aux personnes d’entrer dans le centre d’hébergement avec leurs produits et de consommer dans leur espace privatif sans déranger le groupe. Au bout de quelques temps, l’expérimentation a permis de définir de nouveaux modes de fonctionnement et de gestion de la question de l’alcool au sein du CHRS, avec des résultats extrêmement positifs, en particulier dans l’accompagnement vers le sevrage de certaines personnes en difficulté avec l’alcool.

D’autres CHRS vont-ils s’engager dans la même voie ?

Nous sommes en train de dupliquer l’expérimentation dans d’autres structures avec l’ambition à terme d’une généralisation. Nous adoptons toujours la même méthodologie : diagnostic, concertation, mise en place des actions et évaluation mais ce n’est pas un simple copier-coller. Le projet est d’abord présenté au conseil de la vie sociale (CVS) puis les résidents sont associés et impliqués à toutes les étapes du projet.

Repères

Meryem Belkacemi a travaillé pendant plusieurs années au comité régional d’éducation pour la santé d’Ile-de-France (Cresif), avant de devenir chargée de mission « santé » de l’association Emmaüs Solidarité.

Notes

(1) Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie.

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