Pute un jour

Dans « Putains de vie ! », l’auteure et illustratrice Muriel Dourou donne la parole à Emmy, à Amélia, à Monica… qu’elle a rencontrées en accompagnant les maraudes dédiées à la prostitution organisées par Médecins du monde et l’association Paloma. Des femmes travailleuses du sexe que l’on n’entend jamais, « comme si elles n’étaient pas capables de discernement, comme si leur parole n’avait pas valeur d’expertise, comme si elles n’étaient pas en capacité de revendiquer ce qui leur semblait être juste pour elles-mêmes », souligne la réalisatrice Ovidie, qui a préfacé l’ouvrage. La BD s’ouvre sur Vanessa, 48 ans, enfant battue par sa mère qui, pour s’enfuir de chez elle à 16 ans, n’a eu d’autre solution que de se prostituer. C’est cachée sous une perruque depuis presque trente ans qu’elle reçoit ses clients, des habitués, et qu’elle subvient aux besoins de ses six enfants. Rien à voir avec Lauriane, qui a lâché son travail d’employée pour devenir escort-girl. Un métier qu’elle a choisi et qui lui rapporte de l’argent. A chaque rendez-vous, elle endosse son rôle comme on revêt un costume de scène… En arrivant des rizières de Chine, Mei croyait pouvoir travailler pour des Chinois qui fabriquent des raviolis à Paris. Sans papiers ni argent, elle s’est retrouvée sur les trottoirs de Belleville. Depuis la loi de 2016 sur la pénalisation des clients, ses revenus ont baissé, mais elle n’a pas envie de rentrer dans son pays, où « la vie est encore plus dure ». Originaire de Bogota, Georgia était un petit garçon à la naissance, c’est désormais une femme engagée qui milite dans les associations transgenres. « La rencontre de ces femmes m’a permis de comprendre combien il est compliqué d’appréhender ce que vivent des gens aux destins éloignés des nôtres », pointe l’auteure. Elle y parvient en nous faisant ouvrir les yeux sur ces tranches de vie singulières, sans jugement ni tabou, juste du respect.