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Le régime fiscal des pensions alimentaires accroît les inégalités, selon deux députés

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Par principe, les sommes versées au titre des pensions alimentaires sont déductibles du revenu global du payeur. Mais, dans un rapport d’information publié cet été au nom de la délégation aux droits des femmes, deux députés ont relevé des « effets de seuil » et des « distorsions ». Il apparaît par exemple qu’il incite à ne pas assurer l’effectivité du versement.

Les principes qui régissent le régime fiscal des pensions alimentaires peuvent paraître simple au premier abord : les pensions versées sont déductibles de l’impôt sur le revenu, et les pensions reçues sont imposables. Mais dans un rapport d’information publié fin juillet, les députés Sophie Auconie (UDI et indépendants, Indre-et-Loire) et Guillaume Gouffier-Cha (LREM, Val-de-Marne) relèvent de nombreux inconvénients à ce régime fiscal qui est plus complexe qu’il n’en a l’air. En fait, « le régime fiscal de la pension alimentaire est intrinsèquement lié au mécanisme de calcul de l’impôt sur le revenu et indissociable de la logique de familialisation ». De surcroît, la pension alimentaire n’est déductible que si l’enfant qui bénéficie de cette pension n’est pas membre du foyer fiscal de celui qui la verse.

Le non-paiement est avantageux fiscalement

Le dispositif fiscal actuel a des effets tout à fait paradoxaux, qui peuvent par exemple conduire à ce que le versement d’une pension alimentaire appauvrisse la personne qui la reçoit, qui dispose déjà de très peu de revenus. « Le cas le plus significatif est celui du parent gardien qui peut prétendre au revenu de solidarité active [RSA]. En intégrant la pension reçue dans le barème du RSA, de la prime d’activité et des allocations logement, le revenu disponible de ce parent – essentiellement la mère – baisse. Le système aboutit même au résultat paradoxal selon lequel l’absence de paiement de la pension alimentaire profite au parent non gardien. Il diminue en revanche si le recouvrement est certain. »

D’après les députés, le régime fiscal des pensions alimentaires accentue également l’écart de niveau de vie entre les femmes et les hommes après une séparation. En outre, le gain fiscal créé par ce régime est concentré sur les foyers les plus riches, comme c’est très souvent le cas dans tous les mécanismes de déduction. En effet, la plupart des familles qui perçoivent une pension alimentaire ont des petits revenus, et ne paient donc pas d’impôt sur le revenu. Par conséquent, le mécanisme d’imposition des pensions reçues est sans incidence pour elles. Parallèlement, et selon le même principe, les foyers les plus aisés sont ceux qui bénéficient le plus du dispositif de déductibilité des pensions versées, indique le rapport : « Autrement dit, le système actuel est donc essentiellement profitable aux personnes qui versent les pensions alimentaires et n’a un impact fiscal que sur une minorité des personnes qui la reçoivent. Au plan strictement fiscal, le gain est inégalement réparti et se concentre sur les familles les plus aisées. »

Pour mettre fin à ces incroyables paradoxes, les députés plaident pour une refonte total du système socio-fiscal français. La plupart de leurs recommandations relèvent cependant du bon sens et manquent de précision sur le plan purement juridique. Ainsi, ils appellent notamment à une « mise en cohérence de l’appréciation de la structure familiale », d’une part, en « engageant une réflexion sur la valorisation des unités de consommation dans les barèmes sociaux et fiscaux » et, d’autre part, en « favorisant une harmonisation » de ces mêmes barèmes.

Qu’à cela ne tienne : dans une interview donnée au journal Libération, la secrétaire d’Etat Christelle Dubos a confirmé une réforme du recouvrement des sommes non versées dont les mesures seront présentées au cours du mois du septembre. Peut-être est-ce l’occasion pour le gouvernement de se pencher plus en détail sur le régime fiscal des pensions alimentaires, source de bien d’iniquités.

5,7 milliards d’euros

C’est le volume total déclaré de pensions alimentaires perçues sur l’année 2018 par près de 1,5 million de personnes. 90 % des foyers qui la perçoivent sont des familles monoparentales.

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