L’un des ateliers proposés lors de ces deux jours de colloque pour développer la réflexion et les échanges de pratiques sur certaines problématiques était consacré aux « Jeunes majeurs : qu’est-ce qui doit changer et comment ? ».
Un sujet qui occupe ces derniers mois le calendrier politique avec la proposition de loi (PPL) de la députée (PS) Brigitte Bourguignon, votée le 7 mai dernier à l’Assemblée nationale mais toujours pas au programme du Sénat. La députée est aussi en charge d’une mission ministérielle sur l’accompagnement vers et dans la majorité et qui devrait rendre ses conclusions d’ici la fin du mois. Selon Xavier Iacovelli, sénateur PS, aucun de ses homologues ne veut porter cette loi car elle ne satisfait personne. Il a d’ailleurs lui aussi déposer dernièrement une PPL (voir ce numéro, page ? ?) au Sénat qui aborde notamment l’obligation de l’accompagnement des jeunes majeurs de l’aide sociale à l’enfance (ASE) jusqu’à 21 ans, sans aucune condition pour en bénéficier.
Un sujet qui n’a néanmoins pas été abordé par Adrien Taquet au cours du colloque. Et ce, alors même que les jeunes et les professionnels ne cessent de dénoncer la faiblesse du dispositif de sortie de l’ASE. Aujourd’hui encore, et même si la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté fait de la sortie de l’ASE une mesure socle, pour ces jeunes, 18 ans est synonyme d’insécurité car l’obtention du contrat « jeune majeur » reste à la discrétion des départements.
En attendant un engagement politique d’ampleur sur ce dossier, certains acteurs de terrain tentent d’innover et de donner du sens à la sortie du dispositif de la protection de l’enfance. Ainsi l’Association départementale d’entraide des personnes accueillies en protection de l’enfance (Adepape) du Var mise sur l’information des jeunes majeurs dans leur quotidien et leur insertion dans la vie active. Cette association a ainsi conçu un « Passeport malin », qui centralise toutes les données utiles.
La coopération entre la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et le département de Paris pour la sécurisation des parcours des mineurs non accompagnés (MNA) et des jeunes majeurs suivis dans le cadre pénal a été largement développée car elle constitue un exemple en la matière. « Cette collaboration entre la direction de l’action sociale, de l’enfance et de la santé (Dases) et la PJJ n’est pas toujours simple, mais néanmoins ça peut marcher si, et seulement si, on arrive à s’articuler sur les plans décisionnel politique et opérationnel », commente Sylvie Vella, directrice territoriale de la PJJ de Paris. Cette dernière rappelle que la problématique des MNA de la Goutte d’Or a imposé cette collaboration, ce qui leur a permis de se connaître et de se faire confiance. Ce double suivi (PJJ et Dases) est censé donner aux jeunes majeurs de meilleures chances d’insertion dans le droit commun. Concrètement, chaque mois, le parquet des mineurs, la présidente du tribunal pour enfants, la directrice territoriale de la PJJ et la cheffe du pôle « parcours de l’enfant » de l’ASE se réunissent pour faire du « cousu main pour les cas les plus complexes ». Ce dispositif s’appuie également sur deux autres instances : un comité de pilotage (Copil) mensuel réunissant la PJJ et la Dases ainsi que l’agence régionale de santé (ARS) et l’Education nationale (aspect décisionnel politique) ; l’autre Copil opérationnel réunissant les acteurs de terrain.
Ce dispositif fonctionne, plus de 20 jeunes en bénéficient chaque année sur Paris, mais des points sont encore à améliorer, notamment le développement des liens avec l’ARS et l’Education nationale, qui nécessitent d’être plus efficients, selon Sylvie Vella. Des pistes de rapprochement qui ont également été abordées par Adrien Taquet durant ces assises. Les politiques et les acteurs du terrain semblent ainsi se rejoindre sur ce point : la protection de l’enfance est l’affaire de tous.