Recevoir la newsletter

Coopération Ofii-SIAO : la déontologie en question

Article réservé aux abonnés

Prévu dans la loi « asile-immigration », le partage d’informations entre le 115 et l’Ofii concernant les réfugiés et demandeurs d’asile hébergés est effectif depuis le 4 juillet. L’instruction, qui en précise les modalités, est pourtant loin d’avoir rassuré les travailleurs sociaux.

L’instruction interministérielle qui cristallise les inquiétudes au sein de la sphère associative depuis la fin du mois de juin a finalement été signée le 4 juillet. Emanant des ministères de la Cohésion des territoires et de l’Intérieur, elle définit les modalités de coopération et de transmission de données entre l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) et les services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO), qui gèrent notamment le 115. Tous les mois, les SIAO devront communiquer à l’Ofii la liste nominative des demandeurs d’asile et des bénéficiaires d’une protection qui se trouvent dans des structures d’hébergement d’urgence. Cette disposition était prévue dans la loi « asile-immigration » du 10 septembre 2018.

Les informations devant être transmises concernent l’état civil et la situation administrative des personnes. Des réunions mensuelles pourront se tenir « de manière à permettre un examen préalable par l’Ofii des données transmises ». « L’idée est de mieux connaître et de mieux prendre en charge les demandeurs d’asile qui sont au 115 et les personnes qui sont réfugiées, pour faciliter leur accompagnement, assure Didier Leschi, directeur général de l’Ofii. Puisqu’il est indiqué que dans le 115 il y a de plus en plus de demandeurs d’asile et de réfugiés, cela nous permettra d’objectiver ce qu’il en est. » La question budgétaire a aussi son importance : il s’agit d’éviter que le montant additionnel journalier de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) – de l’ordre de 7 € – prévu pour les demandeurs d’asile à la rue ne soit versé à ceux qui bénéficient d’un hébergement dans le dispositif généraliste depuis plus d’un mois.

Dans un courrier adressé aux ministres de l’Intérieur et du Logement le 5 juillet, une quarantaine d’associations et de fédérations de lutte contre l’exclusion, parmi lesquelles la Fédération des acteurs de la solidarité et le Samu social de Paris(1), ont exprimé leurs craintes quant aux « finalités » de l’échange d’informations « dans la mesure où l’Ofii dispose déjà de ces données par le biais des dispositifs du premier accueil pour demandeurs d’asile et du fichier DNA [dispositif national d’accueil] ». Les associations redoutent que l’intention première soit « d’identifier les étrangers présents dans l’hébergement d’urgence afin de procéder à des contrôles et à leur expulsion ou leur éloignement du territoire ». Une fausse allégation pour Didier Leschi qui assure qu’il n’est pas prévu de « qu’il y ait de transmission des noms des déboutés du droit d’asile ».

« Commençons par créer des places dans le DNA »

« Au niveau du Samu social, nous ne sommes pas défavorables à ce qu’on envoie les gens dans les bonnes cases, souligne Eric Pliez, président du Samu social de Paris. On sait que les demandeurs d’asile qui sont en Cada [centres d’accueil] ont plus de chances d’obtenir leur statut rapidement que s’ils sont dans un centre généraliste. Mais si les personnes font appel au 115, c’est parce qu’il n’y a pas assez de places dans le DNA. Commençons donc par créer des places, et nous pourrons ensuite orienter les gens dans la bonne direction. » Mais la construction de nouvelles places ne semble pas être à l’ordre du jour. Aujourd’hui, seul un demandeur d’asile sur deux est hébergé dans le DNA. Il ne manquerait pas moins de 40 000 places d’hébergement en Cada et en Huda sur le territoire national, ont estimé les associations dans un manifeste publié le 27 juin.

L’interconnexion possible des fichiers, tout comme les réunions prévues en préfecture, sont autant de sujets de préoccupation pour le président du Samu social de Paris : « Que dirons-nous lors de ces commissions, jusqu’où iront les discussions sur les personnes ? Il y a quand même des textes en France qui régissent les partages d’informations. On a l’impression qu’il n’y a aucun principe déontologique qui a été posé à ce stade », regrette-t-il. D’autant que la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) de 2014 a astreint les SIAO au secret professionnel.

Notes

(1) Voir la tribune dans ASH n° 3119 du 12-07-19, p. 34.

Focus

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur