Recevoir la newsletter

Habitat intercalaire : quelle mission sociale ?

Article réservé aux abonnés

Comment faire de l’habitat intercalaire une solution d’hébergement prometteuse ? L’Association francilienne pour favoriser l’insertion par le logement (Affil) organisait, le 1er juillet à Paris, une rencontre autour de ce nouveau type d’habitat dont les contours restent à définir.

Ghada Saida est hébergée depuis juin 2016 aux Grands Voisins, accompagnée par l’association Aurore. Elle y tient un restaurant et se lance dans un projet d’épicerie solidaire : « La participation des résidents, c’est important pour la dignité », glisse-t-elle. Ce site parisien est une zone d’habitat intercalaire. Un ancien hôpital réaménagé où des personnes ont été logées pour une période éphémère, dans l’attente de la construction d’un quartier neuf. Au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis), un immeuble pour lequel l’office HLM avait été obligé de décaler son opération immobilière a été aménagé par le Groupe SOS en centre d’hébergement d’urgence, où habitent de nombreuses mères sortant de maternité. L’habitat intercalaire recouvre ainsi « toutes les initiatives qui visent, sur des bâtiments ou terrains inoccupés, à réactiver de la vie sociale, soit tant que le projet n’est pas défini, soit dans le laps de temps restant avant l’opération foncière », résume Gérard Barbier, président d’Interlogement 93.

En Ile-de-France, près de 115 projets de ce type, en cours ou achevés, ont été recensés. Ils prennent des formes variées, de l’occupation d’immeuble au bâti léger et modulaire sur un terrain nu – même si les terrains inoccupés sont plus rares. « Il serait bien que la carte de ces projets ne soit pas la même que celle de l’hébergement d’urgence » et n’ait donc pas pour seule mission de combler les lacunes de celui-ci, met en garde Bruno Morel, président de l’Affil et directeur général d’Emmaüs Solidarité. La directrice régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (Drihl), Isabelle Rougier, croit en des perspectives prometteuses : « L’intercalaire est devenu une modalité de l’hébergement. »

Convaincre les maires et propriétaires

Reste à convaincre les acteurs locaux, maires et propriétaires. Ceux-ci craignent souvent que le voisinage accepte mal le projet, ou que ce dernier ne s’achève pas à la date prévue. Mais depuis la loi de 2013 relative à la mobilisation du foncier public qui a impulsé ces initiatives, « tout se passe généralement très bien, les associations respectent les délais », assure Psylvia Dewas, directrice de la Drihl des Hauts-de-Seine. L’entretien du logement par l’occupation est avantageux, et permet « d’éviter les squats ». L’habitat intercalaire a cela d’ironique : « N’était-ce pas déjà cela, le squat ? Oui, sauf que ces opérations se sont institutionnalisées et développées… », analyse Gérard Barbier.

Arthur Anane, président de la Fédération des acteurs de la solidarité Ile-de-France, raconte comment deux projets d’habitat intercalaire viennent d’essuyer les refus d’élus des Yvelines « alors que nous avions un accord de principe du directeur de la cohésion sociale. S’il y avait automaticité, la question ne se poserait pas de la même façon ». C’est aussi l’avis du député Nicolas Démoulin, rapporteur du groupe de travail de la commission des affaires économiques sur l’hébergement d’urgence : « Il faudrait essayer de mettre en place une logique automatique, pour gagner du temps. » Quitte à court-circuiter les maires ? Dans tous les cas, ces projets demandent « un véritable cadrage pour dépassionner la relation avec les élus », résume un membre du public. Avec un financement « pluriannuel et non au coup par coup », précise Psylvia Dewas. Un guide méthodologique sera présenté par l’Affil lors du prochain congrès HLM du 24 au 26 septembre. Julien Denormandie devrait participer à son lancement, signe de l’intérêt du gouvernement.

L’ultimatum de sortie d’hébergement

Une cheffe du service du projet d’habitat intercalaire du Pré-Saint-Gervais alerte : « Comment éviter les sorties sèches ? Pour les résidents comme pour les salariés, ce stress est toujours présent… » Le caractère éphémère de l’intercalaire constitue « la limite du système », reconnaît Gérard Barbier. Cela implique de mener un « travail auprès des personnes accueillies qui savent que c’est temporaire, ce qui est très anxiogène », atteste Emmanuelle Huthwohl, directrice du CHU intercalaire Léon-Jouhaux. Juliette Baronnet, du cabinet d’évaluation des politiques publiques FORS, relaie l’interrogation des associations : « Comment monter une équipe quand on sait que c’est seulement pour neuf mois ? »

Focus

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur