Défini depuis la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, le dispositif de l’aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine est resté inappliqué pendant près de huit ans, faute de la publication des décrets. « En 2012, la mission parlementaire sur la situation des personnes âgées immigrées a mis en évidence qu’il fallait ressusciter ce dispositif de l’ARFS pour permettre à ces personnes de ne pas faire le choix entre la France et le pays d’origine mais de pouvoir aller d’un pays à l’autre sans aucune entrave administrative et financière. L’autre objectif était de faciliter la libération de places dans les foyers de travailleurs migrants ou dans les résidences soumis à une forte demande », rappelle Fatima Mejjouz, directrice territoriale adjointe à l’Office français de l’immigration et de l’intégration.
Mais l’ARFS n’a pas rencontré son public. Alors que le nombre de bénéficiaires potentiels était estimé entre 10 000 et 15 000 sur cinq ans, ils sont moins de 100 à avoir demandé cette aide. Les conditions d’octroi restrictives, de renouvellement et le faible montant de l’aide peuvent justifier le faible nombre de demandes. Le montant de l’ARFS varie entre 600 € et 6 600 € annuels, selon les ressources du demandeur. Elle est inférieure au montant de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), qui atteint pour une personne seule 9 609,60 € par an (soit 801 € par mois). « L’ARFS est exclusive de toute aide personnelle au logement et de tous minima sociaux. Lors de l’octroi de la prestation, le demandeur doit s’engager sur l’honneur à respecter des séjours d’une durée supérieure à six mois dans son pays d’origine, sur l’année civile. Cette condition implique le renoncement aux autres aides sociales, notamment l’Aspa et l’aide personnalisée au logement, dont la plupart des immigrés âgés bénéficient », notait le rapport « Stella Dupont » en juin 2018. Conséquence : la plupart des personnes préfèrent garder l’Aspa et la condition de résidence de six mois. En 2016, la loi de finances prévoyait 60 millions d’euros pour financer l’ARFS mais 50 millions d’euros (soit 83 % de la somme prévue) ont été annulés par décret dès le mois de juin. En 2017, la dotation de l’action a été divisée par six (10 millions d’euros). « Le sujet de l’ARFS est en grande discussion actuellement. Il est entre les mains d’Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé. Un premier scénario serait de supprimer l’ARFS et maintenir l’Aspa au-delà de six mois pour les personnes âgées immigrées qui font le choix de repartir dans leur pays d’origine. Pour cela deux voies existent, la loi ou la circulaire. Le deuxième scénario serait la réforme de l’ARFS en rapprochant ses dispositions de celle de l’Aspa. Le troisième scénario serait de supprimer l’ARFS et de créer pour les personnes âgées immigrées une nouvelle prestation extra-légale des régimes de retraite qui se substituerait à l’Aspa. Quel que soit le scénario qui sera retenu, il s’agit de réduire les conséquences négatives d’un séjour de plus de six mois hors de France », explique Fatima Mezzouj. « Ce public souhaite partir et revenir à son rythme, entre la France et son pays d’origine, c’est sa seule revendication. Il ne faut donc pas être dans une vision binaire du style “ou ces personnes partent de France, ou elles restent” mais s’inscrire dans une troisième voie : “elles restent et elles partent”. »
Fatima Mezzouj est docteure en sociologie. Elle est actuellement directrice territoriale adjointe à l’Office français de l’immigration et de l’intégration après avoir été chargée de mission, au ministère de l’Intérieur, sur la thématique de l’accueil et l’accompagnement des étrangers primo-arrivants.