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De nouvelles solutions pour les plus démunis ?

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La 2e édition du Festival international du logement social s’est tenue à Lyon, du 4 au 8 juin. L’urgence européenne que constitue la crise du logement abordable, excluant de plus en plus les populations précaires, appelle des réponses d’ampleur. Bailleurs, chercheurs, responsables politiques et associatifs ont partagé des pistes d’innovation.

A Londres, Goska a pris en photo son ombre sur le pavé, précisant qu’il s’agissait là d’un symbole : pour certaines personnes, elle était devenue invisible, « comme une ombre de son soi d’avant ». A Toronto, Roberta a fait le portrait un peu flou de son amie aux dreadlocks grises, paupières closes et sourire serein devant un parc, et l’a appelé « Dreaming with the trees » (« Rêver avec les arbres »). A Budapest, Dorá s’est contenté de photographier sa paire de chaussures fleuries au bord de l’eau. Expulsés de leur logement, son mari et elle ont survécu un temps dans le métro, avant de retrouver un travail. Ce jour-là pourtant, elle avait « le sentiment qu’il n’y avait aucune issue à sa situation ». Ces photographies ont été exposées à Lyon, dans le cadre du Festival international du logement social. Pour sa 2e édition, l’événement regroupe sur une semaine les professionnels du secteur, afin de faire émerger des réponses au sans-abrisme et à la crise du logement abordable.

« Il y a actuellement une crise de logement dans toute l’Europe, et il nous faut regarder sur le terrain quelles pourraient en être les solutions », expose Björn Mallants, directeur exécutif de la plateforme Housing Solutions, qui vise à repérer les meilleures initiatives sur le plan de l’habitat social et du logement abordable. « Beaucoup de solutions existent mais restent cantonnées au niveau local », pointe David Van Vooren, chargé de mission à la Housing Agency Flanders en Belgique. La plateforme Housing Solutions souhaite « leur donner une ampleur européenne ». Un comité s’est réuni le 17 juin pour sélectionner 50 projets novateurs. Les lauréats seront informés de la sélection de leurs projets à la fin du mois, tandis que la parution officielle des résultats devrait être communiquée « à l’automne », indique Clotilde Clark-Foulquier, membre de la Fédération européenne des associations nationales travaillant avec les sans-abri (FEANTSA) et coordinatrice de la plateforme.

La question de l’investissement est centrale : « Ces logements doivent être efficaces en termes de coût, davantage que le logement ordinaire, pour pouvoir attirer l’attention des décisionnaires publics », considère David Van Vooren. Car le « réel enjeu », selon Juha Kaakinen, dirigeant de la Y-Foundation en Finlande et pionnier du Logement d’abord, reste « le manque de volonté politique de produire du logement abordable pour les personnes avec peu de revenus ».

Faire avec l’offre existante ?

Il est possible de penser, à l’instar de Björn Mallants, qu’« il y a, d’une certaine façon, assez d’offres pour donner aux gens un accès au logement décent. Mais pour cela, il faut travailler à les capter dans le marché ». La lutte contre le logement vacant doit en ce sens être approfondie. La ville de Strasbourg mène depuis 2016 un plan visant à dénicher ces solutions dans le parc existant. Syamak Agha Babaei, vice-président de l’Eurométropole et conseiller municipal, présente le mécanisme d’aide à la mise en location de biens vacants : subventions pour la rénovation, intermédiation locative par les associations, aide spécifique aux propriétaires… Une prime de 1 500 à 11 000 € par logement est prévue pour le propriétaire en fonction de sa situation géographique et de son projet. L’impact n’est pas immédiat, mais « c’est toujours plus rapide que de construire un nouvel appartement, ce qui peut prendre trois à quatre ans », fait valoir le conseiller municipal. Depuis 2016, 203 logements vacants ont ainsi pu être loués « à un prix abordable, et pour un coût de 3 500 € par habitat en moyenne ».

Face à la marginalisation des plus précaires, « le logement peut être une solution, mais cela ne passe pas sans mixité sociale et culturelle » tient à rappeler Gabriel Sibille, du groupement d’intérêt général La Ville Autrement, qui rassemble quatre acteurs du logement et de l’hébergement lyonnais. A partir de la rénovation d’un bâtiment ancien, un projet de 300 appartements réunissant personnes migrantes, familles, ménages en situation sociale complexe et résidence étudiante est en cours d’élaboration. Le tout en voisinage avec une colocation pour personnes malades d’Alzheimer. « On parvient ainsi à changer les stéréotypes en instaurant de la proximité », assure le responsable. Ce projet d’habitat coopératif, « connecté à l’expérimentation “Logement d’abord” », permet également de « lutter contre la gentrification », juge Martine Chanal, chargée de mission à la métropole du Grand Lyon.

« Logement d’Abord » pour les jeunes

Les diverses formes d’application du « Logement d’abord » dans les pays européens sont également des viviers de nouvelles approches. En Ecosse, par exemple, un modèle de « Housing First » dédié aux jeunes ayant connu un placement en protection de l’enfance se développe. L’association « Rock Trust », active auprès des jeunes sans-abri, s’est associée avec le bailleur Almond Housing Association, afin de dupliquer son programme pilote testé au Royaume-Uni. Depuis 2017, sept jeunes accompagnés en sortie de placement ont un logement indépendant. Trois autres devraient rejoindre leur nouvel habitat. Aucun des jeunes entrés dans le dispositif n’est retourné à la rue. « C’est leur première expérience de location : il faut tout apprendre. C’est bien plus facile de débloquer des choses et d’avancer pour un jeune plutôt que pour une personne qui connaît des échecs depuis 40 ans », assure un responsable.

D’après les données officielles écossaises, au moins 21 % des jeunes deviennent sans-abri dans les cinq ans suivant leur sortie des dispositifs d’aide à l’enfance. Le parallèle est rapidement fait avec la France : sortants de l’aide sociale à l’enfance, jeunes LGBT+, en rupture familiale, problématique de l’accès aux droits conditionné à des seuils d’âge comme pour le RSA… Les questions des professionnels présents à Lyon se succèdent sur les spécificités d’accompagnement, le système d’allocations écossais, ou encore les difficultés de nouer un partenariat entre bailleur social et association. Témoignage d’un secteur plus que jamais demandeur en bonnes pratiques d’accompagnement vers le logement.

Pour un plan d’action européen

Co-écrit par les organisateurs du festival (métropole de Lyon, Housing Europe, Union sociale pour l’habitat et Aura HLM), « L’Appel de Lyon » encourage le Parlement européen et la Commission à « adopter un plan d’action pour le logement social et abordable 2019-2024 ». Les futurs parlementaires sont invités à débattre d’un « fonds européen d’investissement spécifique au logement social et abordable », et de l’effectivité du volet « logement et aide aux sans-abri » du socle européen des droits sociaux, au cours d’un « sommet européen du logement » restant à organiser.

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