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La récidive, phénomène encore mal connu

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Le 12 juin, l’Observatoire de la récidive et de la désistance a organisé une journée d’étude sur la problématique de la récidive. Avec une ambition majeure : déconstruire les idées reçues sur ce phénomène mal connu.

Avec l’irruption dans le débat du principe d’irresponsabilité pénale jusqu’à l’âge de 13 ans inclus, la garde des Sceaux Nicole Belloubet s’est attiré les critiques de la droite qui évoquent pour beaucoup une « explosion de la délinquance chez les jeunes ». Pourtant, nombre de chercheurs s’accordent à dire le contraire. Pour y voir plus clair, au-delà des postures idéologiques, l’Observatoire de la récidive et de la désistance a organisé, le 12 juin à Paris, un colloque sur le thème : « Déconstruire la récidive, sortir de la délinquance ». Pour les intervenants invités à partager leurs réflexions sur le sujet, il faudrait tout d’abord repenser le système carcéral, qui s’est montré jusqu’ici incapable d’enrayer la récidive.

Travailler sur la fin de peine

« Les études montrent toutes que les taux de récidive sont plus importants quand les personnes sortent de prison, alors que le taux est plus faible avec les sanctions non carcérales », souligne Annie Kinsey, cheffe de bureau des études et de la prospective au sein de la direction pénitentiaire du ministère de la Justice. Une étude qu’elle a menée sur la période allant de 2002 à 2008 a permis de mettre en lumière la rapidité avec laquelle des sortants de prison sont recondamnés : 59 % des sortants de prison en 2002 ont été recondamnés dans les cinq ans pour des faits survenus après leur libération. 46 % d’entre eux ont été condamnés à de la prison ferme, 13 % à une sanction non carcérale, et 0,5 % à la réclusion criminelle. La moitié d’entre eux ont été recondamnés seulement un an après leur sortie. « La période qui suit la sortie de prison est la plus à risque pour une personne qui sort sans argent et sans logement, confirme Xavier de Larminat, maître de conférences en science politique à l’université de Rouen. Il y a ceux qui passent le cap et qui arrivent à se remettre d’aplomb et ceux qui commettent une infraction à nouveau et qui sont jugés six mois plus tard. Il faut davantage travailler sur cette période de transition, à la fin de la peine. »

D’autant que l’étude des profils des personnes incarcérées révèle une certaine homogénéité des situations. Peu diplômés, rarement en emploi – et pour ceux qui avaient un emploi avant leur entrée en prison, il s’agissait bien souvent de contrats précaires –, les détenus sont souvent déjà désocialisés. « Si les classes populaires sont en prison, c’est d’une part parce que leurs conditions de vie les y ont amenées, mais aussi en grande partie parce qu’elles sont davantage contrôlées par la police et davantage condamnées : elles font l’objet de procédures rapides et ont de faibles garanties de représentation », analyse-t-il.

Un constat partagé également par Christian Mouhanna, sociologue : « A délit égal, on a largement plus de chances d’être en comparution immédiate quand on est pauvre, et bien moins de bénéficier d’une mesure alternative. 20 % des condamnés sont des sans-abri, et pourtant, aucun d’eux ne fait l’objet d’une peine alternative. » Et plus on a été condamné, plus on est amené à être condamné à nouveau, avant tout parce qu’on est « repéré » comme quelqu’un qui a déjà eu affaire à la justice.

Un manque de données

« Les études qualitatives me semblent importantes pour connaître la vie en détention. On ne sait pas quel est l’impact du travail en détention sur le taux de récidive. On a besoin d’études qui décrivent les parcours de vie : qu’est-ce qu’il s’est passé à la sortie de prison ? Quel était l’état de santé de la personne ? » suggère la sociologue.

Il semble finalement que le phénomène de « désistance », de sortie de la récidive, soit lui aussi multifactoriel, autant matériel que psychologique. Si certains se concentrent sur l’aspect mental : « redonner du sens à la peine », sur l’adhésion du détenu à sa peine, d’autres soulignent l’importance de la réinsertion. Pourtant, les moyens sont loin d’être au rendez-vous : on compte moins de 4 000 conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation pour près de 245 000 personnes placées sous la charge de l’administration pénitentiaire.

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