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La fausse bonne idée

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Y a des gens, quand même, ils sont hors sol. Y a des gens, ils te parlent de « stratégie de remise à l’emploi » et de « remobilisation », comme ça, tranquilles, entre un petit four et une coupe de champagne.

Y a des gens, à les écouter, on pourrait presque croire que les allocataires du RSA ne sont que des fainéants qui s’ignorent, ayant juste besoin d’un bon coup de pied au c… pour se remettre au boulot. D’ailleurs, s’ils ne font aucun effort pour s’en sortir, on va finir par leur sucrer les allocs, ils rigoleront moins. Et juste après ça, ils reprennent un petit four.

Ces gens, entre un dîner mondain et une inauguration, ont eu une idée de génie : envoyer des bénéficiaires du RSA dans des Ehpad, à raison de neuf heures par semaine pendant deux mois, pour réaliser des actions d’animation telles que la lecture, la conversation, des jeux de société ou des promenades avec les résidents. En contrepartie, ces valeureux veinards toucheront une aide forfaitaire et une orientation vers une formation qualifiante dans le secteur de l’aide à la personne.

Mais attention ! En cas de rupture du contrat, paf ! Leur RSA sera suspendu.

Ils appellent ça un « dispositif d’insertion volontariste ». Moi, Floyd, j’appelle ça « prends-moi pour un con ».

J’y connais pas grand-chose, au monde des Ehpad, mais je croyais que c’était déjà fait par les salariés, ce genre de trucs, non ? Genre parler avec les gens, faire des sorties, c’est pas censé faire partie du service de base ?

Bon, admettons que le personnel n’ait pas le temps. Les sous-effectifs, les cadences infernales, tout ça… Du coup, faudrait faire appel à des animateurs. Oui, mais y a pas le budget pour ça, c’est pas dans les priorités, et puis, dans l’expression « secteur médico-social », si on dit d’abord « médico » et après « social », c’est pas pour rien, hein ?

Du coup, on n’a qu’à embaucher un pauvre ! Un pauvre, c’est gratuit, et ça ne demande qu’à se rendre utile, c’est bien connu. En plus, le pauvre, c’est pratique, il s’adapte aux contraintes de l’établissement (c’est dans le contrat), il est pas syndiqué et, surtout, il a tellement peur de perdre son RSA qu’il osera pas l’ouvrir en cas de problème.

Bon, okay, le pauvre en question n’est pas forcément compétent pour le job… Mais sincèrement, y a vraiment besoin d’un diplôme pour ça ? Un sourire, une caresse sur la main, quelques paroles rassurantes, c’est quand même pas compliqué, voyons !

Et puis c’est du gagnant-gagnant. L’allocataire est gagnant : il touche une prime et, avec un peu de chance, il y aura peut-être une formation à la clé. L’Ehpad est gagnant : un animateur gratuit neuf heures par semaine, c’est toujours bon à prendre. Le département est gagnant : plus vite l’allocataire trouve un job, plus vite on économise une prestation.

Ça en fait, des gagnants, dans l’histoire… Y a forcément un truc.

Oh mais… Et les résidents ?

Les résidents, ils y gagnent un novice, pas forcément très investi vu qu’il n’est là que pour deux mois, pas forcément compétent pour accompagner correctement des personnes dépendantes…

Finalement, cette histoire de volontariat intergénérationnel remobilisant la stratégie pour l’emploi (ou à peu près), ce serait pas un peu du foutage de gueule ?

La minute de Flo

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