LA LOI DU 13 AVRIL 2016 VISANT À LUTTER CONTRE LE SYSTÈME PROSTITUTIONNEL avait opéré un fort changement de paradigme en mettant fin au délit de racolage et en pénalisant les acheteurs d’actes sexuels. Si 3000 clients ont été interpellés depuis, le volet social de la loi peine encore, par endroits, à être mis en œuvre. Cette loi crée en effet les parcours de sortie, dont les décrets d’application sont parus entre fin 2016 et fin 2017. À travers notamment l’octroi d’un titre de séjour d’une durée de six mois, renouvelable quatre fois, et d’une aide financière à l’insertion sociale et professionnelle (Afis) d’un montant de 330 euros par mois pour une personne seule, les parcours de sortie sont censés permettre la reconversion et l’insertion sociale des femmes, dont une partie importante est en situation irrégulière. Mais ils n’auraient pour l’heure bénéficié qu’à une centaine de personnes. Le 10 avril, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui représente plusieurs associations d’accompagnement des personnes prostituées, en appelait ainsi à l’amplification de cette dynamique.
« On observe une application de la loi disparate selon les territoires, notamment concernant l’accès au titre de séjour, le renouvellement des parcours, l’accès à l’emploi, à la formation ou à l’hébergement. Du fait de l’absence de réelle impulsion ou suivi politiques de la part du gouvernement à ce sujet, l’application de la loi est grandement dépendante du bon vouloir des préfectures et des moyens des associations agréées », dénonce la FAS. Ces dernières accompagnent les femmes souhaitant rompre avec la prostitution et portent leurs dossiers auprès des commissions départementales, qui doivent donner leur avis sur leur entrée ou non dans les parcours de sortie. « Cela génère des besoins supplémentaires pour ces associations en termes de ressources humaines qui n’ont pas été compensés financièrement », souligne Laura Slimani, chargée de mission sur les questions de prostitution à la fédération.
Au-delà du renforcement des moyens des associations, la FAS réclame notamment la tenue d’un comité national de suivi de la loi, la poursuite et l’amplification des efforts en matière de formation des acteurs et de prévention en direction des jeunes, et la mise en œuvre d’un nouveau plan interministériel de lutte contre la traite des êtres humains, alors que le dernier a pris fin en 2016.