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Demain commence aujourd’hui

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28 mars 2019. Remise du rapport « Libault » à Agnès Buzyn.

Je suis partie de chez moi très en avance… Il faisait beau, j’avais envie de marcher, j’ai emprunté le boulevard des Invalides… et j’ai trouvé ça drôle comme coïncidence.

En face du ministère, le collectif « Pas de bébés à la consigne » manifestait pour une réforme des modes d’accueil des jeunes enfants. Effectifs supplémentaires, qualification des professionnels, amélioration de la formation, financement… J’étais ici pour les plus âgés, ils étaient là pour les plus jeunes, mais au fond nous voulions la même chose.

Je suis entrée dans le ministère. Portique de sécurité, badge, vestiaire.

Un peu à l’écart, avec mon mini-gobelet de café ministériel et ma mini-chocolatine, j’ai observé les gens autour de moi : ceux qui souriaient, ceux qui semblaient inquiets, ceux qui étaient bien habillés… Toutes sortes de gens. Avec mes éternelles chaussures roses, je faisais un peu tache dans ce décor feutré. Mais au fond, qui se soucie des vieilles chaussures d’une quadragénaire anonyme ?

Et puis, je suis entrée dans l’amphithéâtre. J’ai attendu. Et j’ai entendu.

Les experts, le journaliste, la table ronde des parlementaires. Tiens tiens, quatre femmes pour un homme… la solidarité serait-elle une histoire de femmes ?

Il y a eu les mots difficiles : solitude, dépendance, culpabilisation…

Il y a eu les chiffres de la concertation : 415 000 contributions en ligne, 10 ateliers techniques, 54 entretiens individuels. Là, je me suis un peu redressée sur mon siège. Moi, Florence, petit caillou de rien du tout, j’ai fait partie de ces entretiens. Un petit caillou sur le chemin. Un caillou dans la chaussure (rose), ou dans la poche (trouée). Un caillou parmi d’autres, avec des milliers d’autres cailloux. Humble caillou, comme disait León Felipe.

Et, pour finir, 175 propositions.

Et puis, Agnès Buzyn est entrée en scène. Des annonces, des projets : solidarité nationale pour la perte d’autonomie, revalorisation des métiers du grand âge, grand débat…

Et cette conclusion, simple et belle : « La vie vaut la peine d’être vécue jusqu’au bout. »

Oui. De la naissance à la mort, de la petite enfance au grand âge, vivre est précieux.

Statistiquement, je suis à la moitié de ma vie. Physiquement, mes plus belles années sont derrière moi. Il y a dix ans, je tenais debout sur un cheval au galop. Il y a vingt ans, je virevoltais au-dessus des montagnes en planeur. Il y a trente ans, j’enchaînais rondades et saltos.

Et maintenant ? Et demain ?

Serai-je seulement encore capable de courir après un train dans dix ans ?

Pourrai-je encore lire les petites lignes des notices dans vingt ans ?

Saurai-je encore sortir seule de mon lit dans trente ans ?

Pourrai-je encore profiter de la vie dans quarante ans ?

Et, si je ne peux plus faire tout cela, aurai-je la chance d’avoir une présence bienveillante à mes côtés pour m’y aider ? Serai-je obligée de choisir entre une solitude contrainte et une vie en collectivité subie ?

Je veux vieillir en vie et vivre mes envies. Sans peur et sans reproche.

La minute de Flo

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