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Un pilotage hors sol ?

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A LA JOURNÉE DU RÉSEAU DES ACTEURS DE L’HABITAT, les bailleurs ne sont pas les seuls à trouver que « le contexte financier est un sujet d’inquiétude majeur » : les collectivités locales sont aussi sur leurs gardes, tient à rappeler Claire Delpech, responsable des politiques de l’habitat à l’Assemblée des communautés de France. Avec la baisse des dotations en 2014 et un encadrement plus strict du budget ces dernières années, la situation financières des collectivités locales a « fortement fragilisé leur engagement avec les partenaires y compris dans le secteur de l’habitat », précise-t-elle. Or, les réformes affectant le logement social s’apparentent, pour nombre d’élus, à un « pilotage macroéconomique qui échappe aux réalités locales ». Pour Claire Delpech, la loi « Elan » semble ainsi « tourner le dos aux collectivités locales. Elle n’a pas l’air de faire confiance aux territoires et à leurs acteurs. Il y a la persistance d’un pilotage centralisé. »

L’idée de trajectoires imposées par le haut aux collectivités, pourtant en charge du développement de l’habitat social sur leurs territoires, est martelée au cours du colloque. Il en va ainsi des ventes en blocs. « Dans une zone de l’agglomération parisienne tendue comme la nôtre, la vente de HLM nous paraît illusoire. Il faut continuer à construire, nous allons poursuivre en ce sens, et il est impossible de faire disparaître le logement social déjà construit », témoigne une élue de Cachan en charge de l’habitat. « La vente HLM ne se décrète pas, ça n’a pas de sens de l’imposer », valide Dominique Hoorens, directeur des études de l’Union sociale pour l’habitat (USH).

Plus largement, Jean-Michel Fabre, vice-président du conseil départemental de Haute-Garonne et président de l’USH en Occitanie Midi-Pyrénées, donne l’exemple de « phrases qui tombent de Paris ». La première, affirmant qu’« il y a trop de bailleurs sociaux », ne lui semble pas vraie : « Je rencontre des maires qui disent ne pas arriver à en trouver sur leur territoire, il n’y en a pas assez qui sont prêts à venir. » Ou encore, l’idée selon laquelle « plus les bailleurs sont grands plus ils sont efficaces » l’interroge : « Efficaces sur quoi ? En Occitanie, de petits organismes gèrent très bien leurs comptes. Certains sont aussi très bons sur la proximité, qui n’est pas la même en milieu rural qu’en milieu urbain… »

Fractures territoriales et sociales

La question de la perte de proximité fait partie des points de vigilance soulevés par les représentants de collectivités. A cause des fusions de bailleurs, Caroline Cayeux, maire de Beauvais et présidente de Villes de France, prévoit que « demain, nous perdrons des organismes de proximité. Ils ne pourront plus entendre les élus. Les délais de réactivité, par exemple dans le cas de travaux en retard, ne seront pas les mêmes. » Un autre objet de méfiance, qui va de pair, est évoqué : le désengagement de certains territoires, accru par les regroupements. Nombre de structures « vont préférer investir dans les territoires denses, urbains, en défaveur des zones “détendues”, ce qui peut renforcer la concurrence entre les territoires », rappelle Claire Delpech. Jean-Michel Fabre craint ainsi « l’aggravation des fractures territoriales et des fractures sociales ». Il alerte sur le « risque de spécialisation des bailleurs : aux offices départementaux, on va leur demander de loger les ménages les plus pauvres ; quand d’autres types de bailleurs vont avoir à loger des publics moins en difficulté ».

Surtout, les collectivités locales disent avoir besoin de davantage de délai. Les regroupements de structures doivent se faire d’ici 2021, or les échéances électorales ] les municipales auront lieu en 2020 – « vont perturber l’organisation de cette réforme », juge Caroline Bayeux. « Nous avons besoin de plus de temps pour mettre en œuvre cette politique du logement ». Reste que dans la loi « Elan » et d’autres textes, les élus identifient des leviers : « Des dispositifs comme le Logement d’abord ; le permis de louer ou l’encadrement des loyers concernant le parc privé ; des marges de manœuvres comme l’enveloppe d’Action Logement… », liste Claire Delpech. « Les collectivités doivent se saisir résolument de ces outils », affirme-t-elle, tout en soulignant que le pilotage des réformes de l’habitat social ne pourra se faire sans « aller vers plus de territorialisation des dispositifs, et donner des possibilités d’ajustement local ».

Négociations au sommet

Au lendemain de la journée du Réseau des acteurs de l’habitat, les représentants du monde HLM ont été reçus par le Premier ministre suite à leurs sollicitations. « L’Union et l’ensemble des fédérations HLM ont réaffirmé collectivement leur opposition à la trajectoire prévue, et notamment le passage à 1,5 milliard d’euros de la baisse des APL et le maintien du taux de TVA à 10 % pour le logement social », a fait savoir l’Union sociale pour l’habitat. Si le Premier ministre a « fait part de son attachement à la trajectoire budgétaire fixée », le constat d’une crise aggravée du logement social « semble aujourd’hui partagé au plus haut niveau de l’Etat », estime la fédération. Les organismes HLM ont obtenu un délai de 15 jours pour « formuler des propositions alternatives, avec la perspective d’un accord engageant l’Etat et le mouvement HLM dans son ensemble ».

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