UNE ÉTUDE QUI INTERROGE LA BIENTRAITANCE DANS LES STRUCTURES accueillant des enfants et adolescents dans le cadre de la protection de l’enfance… Certains pourraient y voir un lien avec le documentaire télévisé diffusé il y a quelques semaines sur les failles de l’aide sociale à l’enfance (ASE), et qui avait fait grand bruit. Et pourtant il n’en est rien. Lancée en 2016 par l’Anesm – agence qui, depuis avril dernier, a intégré la Haute Autorité de santé (HAS) –, cette enquête visait deux objectifs : permettre aux professionnels d’évaluer leurs actions et identifier de nouvelles pistes d’action.
Publiés le 12 février par la HAS, les résultats de l’étude apportent d’ores et déjà des éléments sur la population des enfants accueillis, préalable à une objectivation des difficultés rencontrées. Ce sont ainsi près de 341 000 enfants et jeunes qui, au 31 décembre 2017, étaient accompagnés ou confiés dans le cadre d’une mesure de protection de l’enfance, se traduisant dans plus de la moitié des cas par un placement en dehors de leur famille. On apprend, de plus, que la réalité de la maltraitance s’impose pour la moitié de ces enfants (cinq mineurs sur dix présentent un dossier où figurent, avant leur placement, des faits ou des risques de maltraitance). Mais également que la problématique et le nombre des mineurs non accompagnés se confirment (voir ASH n° 3098 du 15-02-19, p. 6) et que 15 % des enfants, porteurs d’un handicap, sont reconnus par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH).
Par ailleurs, le fait que 10 % des enfants placés sont en décrochage scolaire interroge les collaborations avec l’Education nationale et le champ médico-social. S’ajoute un paramètre, qu’il ne faut pas négliger : la rupture des liens (un enfant sur deux n’a pas vu ses proches au cours des trois derniers mois). Autant d’éléments qui peuvent expliquer des souffrances psychiques, potentiellement évolutives, et qui préfigurent la complexité des prises en charge.
Cette réalité explique que les actions en matière de santé à l’égard de ces enfants, notamment celles de prévention et de prise en charge de la souffrance psychologique, doivent être renforcées. Or, selon les résultats de cette enquête, seuls un quart des établissements ont mis en place de telles actions. Un autre sujet de préoccupation concerne la scolarisation des enfants accueillis – un accompagnement qui doit être renforcé, d’autant que quatre enfants sur dix présentent des troubles de la concentration. La HAS préconise à ce titre que l’aide aux devoirs soit systématique.
Au sujet des comportements violents, l’étude évoque des facteurs explicatifs d’ordre organisationnel : la taille de l’établissement, la présence majoritaire de garçons ou encore le placement, générateur de mal-être. Se pose en regard la question de l’importance que les établissements accordent à la fonction positive que peut avoir l’environnement sur le bien-être de l’enfant. Une problématique qui mérite, selon la HAS, une réflexion et des actions en ce sens de la part des organismes gestionnaires et des directions d’établissements. Et ce, alors que les phénomènes de violences se traduisent souvent par un recours à des intervenants extérieurs – la police, les services d’urgence – ou à la réorientation du jeune concerné. « Cela montre les limites des professionnels quant à la gestion de crise », peut-on ainsi lire dans les conclusions de l’étude.
Dans tous les cas, partant du principe que la bientraitance est une « qualité essentielle » au sein des structures de la protection de l’enfance, et pour permettre des actions d’amélioration, la HAS a décidé d’inclure les résultats de cette enquête dans le référentiel d’évaluation externe des établissements. Parallèlement, vont être élaborées au cours de l’année des recommandations de bonnes pratiques sur la scolarité, sur l’organisation de la sortie du dispositif, sur l’évaluation de la situation de danger des enfants ou encore sur la coordination entre les services de pédopsychiatrie et ceux de protection de l’enfance.