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Le règlement intérieur

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LA LOI IMPOSE LA MISE EN PLACE OBLIGATOIRE d’un règlement intérieur aux entreprises ou établissements d’au moins 20 salariés. Acte unilatéral rédigé par l’employeur, il s’impose à tous ses salariés. Présentation, dans cette première partie, des formalités et des clauses obligatoires qui doivent figurer dans ce document.

PURE EXPRESSION DU POUVOIR PATRONAL, le règlement intérieur connaît une indéniable ancienneté dans les relations entre employeurs et salariés. Avant 1982, le règlement intérieur pouvait ainsi avoir vocation de régler la quasi-intégralité des règles de travail dans l’entreprise ou l’association. C’est la loi du 4 août 1982 sur la liberté des travailleurs dans l’entreprise qui fait la mention précise du règlement intérieur et recentre ce dernier sur trois domaines spécifiques : le champ d’application est plus restreint et les règles qui pouvaient être traitées au sein du règlement auparavant doivent relever de la négociation collective.

Ce dossier juridique viendra faire le point sur le champ d’application et les formalités obligatoires pour mettre en place le règlement intérieur, ainsi que les clauses qui doivent obligatoirement figurer dans le document unilatéral. L’étude s’attachera, dans un second volet, aux clauses recommandées soumises à un strict principe de proportionnalité au but recherché et enfin interdites.

I. Champ d’application et formalités

A. Le champ d’application

Le code du travail fixe le champ d’application du règlement intérieur et prévoit que sont soumis à l’obligation d’établir et de respecter un tel document tous les établissements des employeurs de droit privé, outre établissements publics à caractère industriel et commercial. Ainsi, le domaine d’application du règlement intérieur ne se limite pas aux entreprises à caractère commercial, mais doit également trouver application aux structures ayant une forme associative. Est fixée également par le code du travail une condition d’effectif. Le règlement intérieur n’est obligatoire qu’en cas d’emploi d’au moins 20 salariés par la structure (code du travail [C. trav.], art. L. 1311-1 et L. 1311-2). Pour précision, le niveau d’appréciation des effectifs est celui de l’entreprise ou l’association. Ainsi, pour une entreprise employant au moins 20 salariés comportant plusieurs établissements, un règlement unique devra être adopté et sera applicable pour tous ses établissements. En revanche, si les établissements dépassent l’effectif de 20 salariés, chacun des établissements visés aura pour obligation d’établir son propre règlement intérieur.

L’obligation légale de mise en place du règlement intérieur pour les structures employant au moins 20 salariés est fixée dès lors que le seuil d’effectif a été atteint durant 3 mois de manière continue en cas de création d’entreprise ou d’association. En dehors de ces cas, la mise en place du règlement intérieur est obligatoire dans un délai de 6 mois, dès lors que la structure a atteint ou franchi le seuil de 20 salariés pendant ladite période(1). En toute hypothèse, les modalités de calcul des effectifs applicables sont les règles générales posées par le code du travail (art. L. 1111-2).

A noter : Le règlement intérieur, s’il est obligatoire pour toute structure employant au moins 20 salariés, n’en est pas moins autorisé pour les structures ne remplissant pas les conditions d’ouverture. La mise en œuvre du règlement intérieur n’est toutefois pas libre et il sera impératif de respecter l’intégralité des règles propres au règlement intérieur tant sur le fond que quant à la procédure. Le contenu et le mode d’élaboration sont donc identiques aux structures de 20 salariés et plus.

B. L’élaboration du règlement intérieur par l’employeur

Le code du travail précise expressément que le règlement intérieur est un acte unilatéral de l’employeur qui est donc entièrement rédigé par ce dernier. Il appartient ainsi à l’employeur de prévoir la rédaction d’un projet de règlement intérieur intégrant éventuellement en cas d’établissements multiples employant 20 salariés ou plus des règlements spécifiques aux établissements.

L’employeur a l’obligation de solliciter l’avis des représentants du personnel : délégués du personnel ou du comité d’entreprise selon les anciennes dispositions du code du travail ou encore comité social et économique (CSE), s’il a été mis en place.

A noter : Si la structure n’a pas encore mis en place de CSE, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) encore existant devra être consulté pour les matières relevant du domaine de l’hygiène et de la sécurité dans l’entreprise. La Cour de cassation a par ailleurs rappelé à plusieurs reprises que l’absence de soumission du règlement intérieur pour avis au CHSCT sur les matières relevant de sa compétence conduit à considérer la consultation comme nulle. De même, s’agissant de la modification du règlement intérieur sur un domaine relevant de l’hygiène et de la sécurité dans l’entreprise, l’absence de consultation du CHSCT rendrait la modification inopposable aux salariés (Cass. soc. 11 février 2015, n° 13-16457).

En revanche, si le CSE a été mis en place, le CHSCT n’existe plus et, quelle que soit la matière, la consultation n’est effectuée qu’auprès de cette instance.

En toute hypothèse, la consultation des représentants du personnel revêt un caractère obligatoire : le règlement intérieur qui ne ferait pas l’objet d’une soumission aux représentants du personnel serait considéré comme nul. En d’autres termes, il ne pourrait pas être appliqué et surtout, l’employeur ne pourrait se prévaloir des manquements des salariés au règlement pour justifier une quelconque sanction disciplinaire par d’exemple.

De surcroît, on relèvera que la consultation ayant un caractère obligatoire, son absence est considérée par le code du travail comme un délit d’entrave aux institutions représentatives du personnel et pourrait entraîner la condamnation de l’employeur à une contravention de 4e classe (amende maximale de 750 €, art. 131-13 du code pénal).

Enfin, rappelons que le rôle des représentants du personnel est consultatif : l’avis donné ne lie pas l’employeur qui pourrait, même en cas d’avis défavorable, passer outre.

C. Le contrôle de l’inspection du travail

Après avoir recueilli l’avis des membres de l’institution représentative du personnel, l’employeur a l’obligation de transmettre le règlement intérieur et l’avis des représentants du personnel à l’inspection du travail.

L’inspection du travail compétente est celle à laquelle est rattachée l’entreprise. Dans l’hypothèse où l’entreprise ou l’association dispose de plusieurs établissements et établit des règlements d’établissement spécifiques, l’inspecteur du travail compétent deviendra celui auquel est rattaché l’établissement. En revanche, si la structure dispose de plusieurs établissements, mais établit un règlement intérieur commun à l’ensemble de ces derniers, l’inspection du travail compétente demeure celle du siège social de l’entreprise (Conseil d’Etat, 5 mai 1993, n° 96676).

En pratique : L’employeur transmet le règlement intérieur en deux exemplaires à l’inspecteur du travail accompagné de l’avis du comité social et économique ou, à défaut, du procès-verbal de carence aux dernières élections des représentants du personnel.

L’inspecteur du travail dispose de compétences élargies et l’article L. 1322-1 du code du travail prévoit expressément qu’il « peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L. 1321-1 à L. 1321-3 et L. 1321-6 ».

Le contrôle de l’inspecteur du travail peut donc porter sur le contenu du règlement, le respect des dispositions du code du travail et accords collectifs éventuellement applicables. Il appartient également à l’inspecteur du travail de vérifier que le règlement et son contenu n’apportent pas aux droits et libertés des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à l’accomplir ni proportionnées au but recherché ou encore seraient discriminatoires.

L’inspecteur a enfin la faculté d’exiger que le règlement intérieur comporte l’intégralité des dispositions obligatoires. Ainsi, il s’agira des mesures d’application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l’entreprise ou de l’établissement, des conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer à la demande de l’employeur au rétablissement de conditions de travail protectrices de la santé et de leur sécurité, des règles générales et permanentes relatives à la discipline et notamment en matière de nature et d’échelle des sanctions.

Attention : Le pouvoir de contrôle de l’inspecteur du travail est permanent. Il a la faculté de procéder à un contrôle à tout moment et ne se limite pas à un contrôle du règlement intérieur initial ou de ses modifications.

Après son contrôle, l’inspecteur du travail doit en principe, selon le code du travail, rendre une décision motivée et notifiée à l’employeur. La décision est également communiquée pour information au CSE ou, à défaut, aux anciennes institutions représentatives du personnel. Ainsi, toute demande de l’inspecteur visant au retrait ou à la modification d’un élément du règlement intérieur doit être étayée et fondée sur les dispositions légales du code du travail.

L’employeur a alors l’obligation de prendre en considération les demandes de l’inspecteur du travail et de procéder aux retraits ou aux modifications sollicitées. Il lui appartiendra également de transmettre le règlement intérieur dans sa nouvelle version à l’inspection du travail. Toutefois, l’employeur n’est pas obligé de consulter une seconde fois les représentants du personnel avant de transmettre le nouveau document à l’inspection du travail. Il convient de préciser enfin que l’employeur n’est pas à l’abri d’une contestation d’une disposition du règlement par le salarié devant le conseil de prud’hommes. En effet, si l’inspecteur du travail a jugé une disposition licite, rien n’empêche le salarié de la contester devant le juge judiciaire via un contrôle par voie d’action ou d’exception.

A savoir : Le pouvoir du contrôle de l’inspection du travail étant très étendu, l’absence de décision dans le délai de 1 mois à compter de la soumission de l’employeur du règlement à ses services ne doit pas être interprétée comme un accord implicite. Cette absence de décision ne fait pas obstacle à l’entrée en vigueur du règlement intérieur, mais ne pourra en aucun cas conduire l’employeur à considérer que l’inspection du travail a validé le document.

La décision de l’inspection du travail notifiée à l’employeur peut être contestée et faire l’objet d’un recours hiérarchique ou contentieux. Le recours hiérarchique devra être porté devant la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) dans un délai de 2 mois suite à la notification de la décision (C. trav., art. R. 1322-1). Ce recours peut être formé par l’employeur, mais également par tout salarié ou membre des représentants du personnel. Le recours contentieux devra quant à lui être effectué devant le juge administratif dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision contestée via un recours en excès de pouvoir.

D. Les formalités de publicité

La validité du règlement intérieur est soumise à l’obligation de satisfaire à des formalités de dépôt et de publicité.

Important : La date d’entrée en vigueur devra nécessairement être postérieure d’une durée de 1 mois minimum à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité (C. trav., art. L. 1321-4).

Concernant la publicité auprès de la Direccte, si l’employeur procède à un envoi du document en lettre recommandée avec accusé de réception, il doit tenir compte du délai d’acheminement postal et du délai de contrôle de 1 mois dont dispose l’inspecteur. Il appartient donc à l’employeur de satisfaire en premier lieu aux formalités de publicité et de dépôt avant de pouvoir considérer que le décompte peut commencer. En pratique, le délai minimal court à compter de la dernière date des formalités de dépôt ou de publicité.

Les formalités de dépôt sont simples et il appartiendra seulement à l’employeur de déposer auprès du secrétariat-greffe du conseil de prud’hommes un exemplaire du règlement intérieur. Le dépôt peut être effectué par lettre recommandée avec accusé de réception ou directement dans les locaux de la juridiction auprès du greffe, il conviendra alors d’obtenir une preuve du dépôt. En effet, le dépôt constitue une formalité substantielle et la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser à plusieurs reprises qu’en l’absence de preuve de dépôt ou de dépôt le règlement intérieur ne pouvait être opposé par l’employeur aux salariés (voir notamment Cass. soc., 4 novembre 2015, n° 14-18574).

Conseil de prud’hommes compétent est celui :

• du lieu du siège social de l’employeur, lorsque le règlement intérieur est commun à tous les établissements de l’entreprise ou de l’association ou lorsqu’il s’agit d’une structure à établissement unique ;

• du lieu de situation géographique de chacun des établissements, si les règlements intérieurs diffèrent d’un établissement à l’autre.

Quant à la publicité auprès des salariés, le code du travail prévoit que le règlement intérieur doit être porté par tout moyen à la connaissance de toutes personnes ayant accès aux lieux de travail ou aux locaux où se fait l’embauche (C. trav., art. R. 1321-1).

Il n’est pas obligatoire pour l’employeur de prévoir un affichage du règlement intérieur et l’on peut alors également envisager une information des salariés par écrit (courriers ou emails). En effet, si l’affichage était obligatoire jusqu’au décret n° 2016-1417 du 20 octobre 2016, il appartient dorénavant à l’employeur de démontrer que les salariés ont bien pu prendre connaissance du document. Ainsi, selon le type de structure et les modalités de travail, l’affichage pourrait ne pas être le plus adapté. On prendra à titre d’exemple les structures d’aide à domicile ou plus généralement de services à la personne où l’affichage n’apparaît pas comme la méthode la plus appropriée : en effet, bon nombre des salariés interviennent au domicile des usagers ou clients des structures et ne se rendent que par exception dans les locaux de leur employeur. On pourrait alors conseiller aux structures des services à la personne d’informer les salariés, par exemple lors de leur embauche, et prévoir la signature d’un document intégrant que les salariés ont bien été informés de l’existence et des modalités d’accès au document. Cette formalité devrait tout de même s’accompagner d’un affichage, car le code du travail ne vise pas expressément les salariés, mais toute personne ayant accès aux locaux où se fait l’embauche et aux lieux de travail. Il pourrait donc s’agir de l’inspection du travail ou de tout autre contrôleur de l’Urssaf.

La remise d’un exemplaire du règlement intérieur aux salariés nouvellement embauchés ne constitue pas une obligation légale pour l’employeur. Les salariés peuvent donc bénéficier d’une simple information sans obtenir le document lors de leur embauche. Il faudra en revanche prêter attention aux conventions collectives qui peuvent prévoir des modalités différentes. Ainsi, la convention collective de la branche de l’aide et accompagnement à domicile applicable aux structures associatives prévoit expressément la remise du règlement intérieur aux salariés entrants :

« L’employeur tient à disposition du personnel un exemplaire à jour de la convention collective. Le règlement intérieur doit être affiché à une place aisément accessible au siège de la structure.

L’employeur remet à chaque nouvel embauché un exemplaire du règlement intérieur, ainsi qu’un document explicatif du régime de prévoyance et du régime de complémentaire santé »(1).

Ces formalités de publicité sont indispensables et il est impératif que l’employeur puisse en rapporter la preuve. A défaut, il ne pourrait pas se prévaloir des dispositions du règlement et serait dans l’impossibilité totale de se fonder sur le document pour toute décision dans les matières visées par le règlement.

II. Clauses obligatoires

Le règlement intérieur connaît un champ d’application strictement délimité par le code du travail et doit exclusivement comprendre :

• les mesures d’application de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise intégrant les mesures prévues par l’article L. 4122-1 du code du travail. Il s’agira notamment, lorsque la nature des risques le justifie, des conditions d’utilisation des équipements de travail, des équipements de protection individuelle, des substances et préparations dangereuses qui devront être adaptées à la nature des tâches à accomplir ;

• les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer, à la demande de l’employeur, au rétablissement de conditions de travail protectrices de la sécurité et de la santé des salariés dès lors qu’elles apparaissent compromises ;

• les règles générales et permanentes relatives à la discipline et notamment la nature et l’échelle des sanctions que l’employeur a la faculté de prendre.

Cependant, il existera des clauses qui ne pourront faire l’objet d’aucune adaptation par l’employeur et d’autres clauses qui seront, au contraire, adaptables aux besoins de l’entreprise ou de l’association visée.

A. Des clauses légales non modifiables

1. Harcèlement moral et sexuel et agissements sexistes

Dans le cadre de la protection de la santé et la sécurité des salariés, l’employeur a l’obligation d’intégrer au règlement intérieur les dispositions du code du travail relatives à la protection des salariés contre le harcèlement moral et sexuel outre les agissements sexistes. Le code du travail prévoit de surcroît l’obligation pour l’employeur d’intégrer les sanctions fixées par le code pénal. Ces dernières sont toutefois insérées directement dans le code du travail et n’ont donc pas l’obligation de faire l’objet de citations spécifiques.

En pratique, il s’agira pour l’employeur de préciser l’ensemble des dispositions suivantes :

• l’interdiction de sanctionner un salarié qui a subi ou s’est refusé à subir des agissements de harcèlement sexuel de toute personne dont le but est d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit comme au profit d’un tiers ;

• l’interdiction de sanctionner un salarié qui a subi ou s’est refusé à subir des agissements sexistes définis « comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant » (C. trav., art. L. 1142-2-1) ;

• l’interdiction de prononcer une quelconque sanction pour tout salarié ayant relaté ou témoigné sur des faits de harcèlement moral, sexuel ou agissement sexiste.

La clause du règlement intérieur ne peut pas connaître d’adaptation quelconque : les articles du code du travail doivent être expressément et intégralement cités dans le règlement intérieur (C. trav., art. L. 1321-2).

Les articles du code du travail devant faire l’objet d’une citation complète sont(1) :

• pour le harcèlement moral, les articles L. 1152-1 à. 1152-6 ;

• pour le harcèlement sexuel, les articles L. 1153-1 à L. 1153-6 ;

• et pour les agissements sexistes de l’article L. 1142-2-1.

A savoir : Au-delà des dispositions spécifiques au harcèlement moral ou sexuel et aux agissements sexistes, figurent également dans le code du travail des mentions relatives aux actions en justice et les dispositions pénales. Afin de garantir la validité de la clause du règlement, il appartiendra à l’employeur de faire également la mention de ces éléments et de citer en conséquence les articles L. 1154-1 et 2 du code du travail relatifs aux actions en justice et les articles L. 1155-1 et 2 du même code afférents aux dispositions pénales.

2. Les sanctions disciplinaires

Le règlement intérieur à l’obligation de prévoir la nature et l’échelle des sanctions disciplinaires. La jurisprudence rappelle de surcroît qu’il doit se limiter aux sanctions éventuellement énumérées dans la convention collective applicable (Conseil d’Etat, 28 janvier 1991, n° 84586) (voir exemple de clause, encadré ci-contre).

En outre, l’employeur doit veiller à bien indiquer la durée de la mise à pied à titre disciplinaire. En effet, la jurisprudence précise que la durée maximale de la mise à pied disciplinaire doit obligatoirement figurer dans le règlement intérieur. A défaut, la sanction prononcée serait nulle. On notera pour information que cette limitation ne concerne pas la mise à pied conservatoire, qui peut toujours être prononcée pour donner le temps nécessaire au déroulement d’une procédure disciplinaire engagée par ailleurs en raison d’une faute considérée comme grave.

Au-delà de l’échelle des sanctions, le règlement intérieur a l’obligation d’intégrer les droits de la défense des salariés afin de prévoir les modalités selon lesquelles il pourra obtenir les informations nécessaires ou répondre à la sanction qui aura pu lui être notifiée.

A ce titre, la clause doit préciser que toute sanction disciplinaire a l’obligation d’être motivée et notifiée par écrit au salarié. De même, au-delà du blâme et de l’avertissement, la sanction disciplinaire devra comprendre les garanties de procédure fixées par le code du travail (C. trav., art. L. 1332-1 à L. 1332-3).

A noter : Il n’y a en revanche aucune obligation légale à reproduire in extenso les articles du code du travail. Cependant l’inspection du travail rappelle régulièrement que cette reprographie est conseillée aux employeurs.

B. Des clauses adaptables

1. Droit de retrait

L’article L. 4131-1 du code du travail prévoit, au profit des salariés, le droit de se retirer d’une situation de travail dont ils ont un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour leur vie et/ou leur santé. Ce droit a l’obligation de figurer dans le règlement intérieur. En revanche, les modalités de rédaction sont libres et l’employeur pourra se limiter à renvoyer à de plus amples explications, par note de service à titre d’exemple.

« Article droit de retrait

Tout salarié qui a un motif raisonnable de penser qu’une situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ou qui constate une défectuosité dans les systèmes de protection doit en avertir immédiatement le chef d’entreprise ou son représentant et son supérieur hiérarchique et bénéficie d’un droit de retrait conformément à l’article L. 4131-1 du code du travail.

Les salariés utilisent à cet effet, en tant que de besoin, le registre d’observations prévu par l’article 24 du décret du 8 janvier 1965. »

2. Mesures de protection de la santé et sécurité au travail

Bloc fondamental du règlement intérieur, la protection de la santé et la sécurité des travailleurs dans l’entreprise ou l’association doivent impérativement être fixées.

La clause relative à l’hygiène et à la santé est obligatoire, mais devra impérativement être adaptée en fonction de l’activité de la structure concernée. Ainsi, à titre d’exemple, pour le secteur de l’aide et accompagnement à domicile ou encore dans les services à la personne, le règlement devra nécessairement faire état des spécificités de l’intervention des salariés au domicile de particuliers et des risques inhérents à une telle activité.

La convention collective nationale des entreprises de services à la personne fait mention de l’obligation d’information des salariés quant aux risques pour leur santé et leur sécurité (Partie II, Chapitre III, Section 1). L’information des salariés sur les risques encourus au regard de leur santé et de leur sécurité peut être mise en place par tout moyen et il appartiendra à l’employeur de prouver cette information. Dans le secteur des services à la personne et au vu des emplois spécifiques des salariés qui exercent leur prestation de travail au domicile ou au sein du lieu choisi par le bénéficiaire, l’information devra être effectuée de manière adéquate et compréhensible pour les salariés.

La protection de la santé et la sécurité des travailleurs pourront également être assurées grâce à l’intégration de mesures de protection individuelle : le règlement intérieur a la faculté d’imposer aux salariés le port d’équipements de protection individuelle en fonction des postes de travail.

L’inspection du travail a pu à ce titre retenir l’intérêt d’adjoindre au règlement intérieur des schémas ou dépliants adaptés aux spécificités des postes des salariés intervenant au domicile privé de bénéficiaires ou des clients.

Les mesures d’hygiène devront également figurer dans le règlement intérieur. Il appartiendra de nouveau à l’employeur de définir quelles mesures d’application de la règlementation en matière d’hygiène sont nécessaires dans le cadre de son secteur d’activité (C. trav., art. L. 1321-1).

Dans le domaine de la santé et la sécurité au travail, le règlement devra comprendre également une clause quant aux règles de participation éventuelle des salariés au rétablissement de conditions de travail protectrices de leur santé et de leur sécurité.

L’employeur pourra alors intégrer une clause plutôt générale, rappelant la règlementation en matière d’hygiène et de sécurité au travail. Le Conseil d’Etat a retenu la validité d’une telle clause, dont les dispositions sont reproduites ci-dessous et dont la portée n’a pas été remise en cause par la suite (Conseil d’Etat, 11 juillet 1990, n° 85416).

Attention : La clause visant les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être amenés à participer au rétablissement de conditions de travail visant la protection de leur santé et leur sécurité ne doit pas et ne pourra pas avoir pour effet de permettre à l’employeur de se défaire de l’obligation de sécurité lui incombant. Il appartient en effet à tout employeur de veiller à préserver la sécurité et la santé de ses salariés et la clause du règlement ne pourra que permettre de responsabiliser les salariés.

A savoir : La violation des dispositions du règlement intérieur relatives à la protection de la santé, sécurité et hygiène au travail pourra conduire à l’application de l’échelle des sanctions disciplinaires figurant dans le document. Ce point devra être rappelé dans la clause afférente.

Au-delà des modalités de mise en place du règlement intérieur et des clauses qui devront nécessairement y figurer, devront être abordées également les clauses recommandées et proportionnées et enfin interdites. Le second volet du dossier juridique fera le point sur ces clauses et leur place dans le règlement intérieur.

Que faire en l’absence de représentants du personnel ?

L’absence de représentants du personnel doit conduire l’employeur à procéder unilatéralement à l’établissement du règlement intérieur et la phase de consultation des représentants du personnel est alors exclue. Il convient toutefois d’être extrêmement prudent dans ce cadre et de vérifier l’existence d’un procès-verbal de carence pour le CSE. En effet, une structure qui n’aurait pas mis en place ou renouvelé les institutions représentatives du personnel malgré ses obligations légales ne pourrait prétendre avoir respecté les dispositions du code du travail. Dans cette situation, le règlement intérieur qui pourrait être mis en place par l’employeur ne respectant pas les conditions légales encourrait la nullité.

Autres types de documents

Notes de service relatives à la discipline ou aux mesures d’hygiène et de sécurité

Dès lors que l’employeur produit une note de service intégrant des prescriptions générales en matière de discipline ou de santé et de sécurité, il ne peut se dispenser de respecter les modalités fixées pour la mise en place et la validité du règlement intérieur. La jurisprudence, de manière ancienne, prévoit que ces notes de service prennent le caractère d’annexe au règlement intérieur et doivent donc répondre aux conditions précitées.

L’administration considère que les notes de service comportant des dispositions relevant du champ de compétence du règlement intérieur doivent être soumises au régime de ce dernier et donc à l’intégralité des modalités décrites au sein de cette partie.

Chartes et codes de bonne conduite

Les chartes et les codes de conduite n’ont par principe pas de nature juridique spécifique. Le code du travail ne fait aucune mention de ces types de texte. Il conviendra donc, comme dans le cadre des notes de service, de vérifier le contenu du texte : une charte ou un code ayant un caractère disciplinaire ou contraignant devra être inclus dans le règlement intérieur et subir les mêmes formalités alors qu’un document ne constituant qu’une recommandation n’aura pas à répondre aux formalités du règlement intérieur.

A noter qu’il existe un unique code de conduite prévu dans le code du travail, le code relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Ce code est soumis expressément aux modalités du règlement intérieur et doit y être intégré depuis la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

• Exemple de clause

Echelle des sanctions

Tout agissement considéré comme fautif pourra, en fonction de sa gravité, faire l’objet de l’une ou l’autre des sanctions classées au sein du présent règlement par ordre d’importance. Il est rappelé que les sanctions disciplinaires ne doivent pas nécessairement suivre l’ordre énoncé ci-après.

Tenant compte des faits et circonstances, la sanction disciplinaire sera prise sans suivre nécessairement l’ordre de ce classement :

– blâme : réprimande écrite d’un comportement fautif ;

– avertissement : observation écrite destinée à attirer l’attention ou rappeler des règles ;

– mise à pied disciplinaire de ……. (à compléter) jours maximum : suspension temporaire du contrat ;

– mutation disciplinaire : changement de poste à titre de sanction ;

– rétrogradation : affectation à une fonction ou à un poste différent et de niveau inférieur ;

– licenciement disciplinaire, avec ou sans préavis et indemnités de rupture selon la gravité de la faute.

Attention : Il faut bien vérifier la convention collective applicable. A titre d’exemple la CCN des entreprises de services à la personne prévoit l’échelle des sanctions et devra être respectée par toute entreprise soumise au texte conventionnel (Partie II, Chapitre V, Section 3) :

« Les sanctions susceptibles d’être prises suivant le degré de gravité de la faute et les circonstances sont les suivantes :

– observation écrite ;

– avertissement écrit ;

– mise à pied disciplinaire de 1 à 3 jours sans rémunération ;

– mutation disciplinaire ;

– rétrogradation ;

– licenciement pour faute ;

– licenciement pour faute grave ;

– licenciement pour faute lourde. »

Prévention des risques dans les conventions collectives

Le texte conventionnel fait mention expresse des particularités de la prévention en matière de protection de la santé des travailleurs intervenant au domicile de personnes aidées. Les clauses relevant de ce domaine devront donc intégrer, en sus des règles issues du code du travail, les prescriptions spécifiques conventionnelles. Les deux conventions collectives font une mention particulière du lieu de travail des intervenants et prévoient à ce titre des dispositions particulières.

La convention collective de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile

« Le salarié doit pouvoir utiliser les installations de la personne aidée, sur les lieux de vie où il exerce ses activités, notamment un local, un vestiaire et des installations sanitaires.

Avant le début des interventions chez une personne aidée, les salariés de l’entreprise sont informés, pendant le temps de travail, des mesures de sécurité à prendre, des risques à éviter et des moyens mis en œuvre pour assurer leur sécurité.

Le salarié s’assure du bon fonctionnement courant du matériel éventuellement mis à sa disposition par la personne aidée ou par son employeur. Il informe sa hiérarchie lorsqu’un matériel est défectueux. L’employeur s’assure que le salarié est informé des5consignes de sécurité propres au5domicile et à l’utilisation du matériel mis à sa disposition.

Les salariés de l’entreprise sont soumis à toutes les règles relatives à l’hygiène et à la sécurité applicables chez la personne aidée ou dans son lieu de vie.

L’employeur doit s’assurer que le salarié dispose des moyens et protections lui permettant d’assurer sa sécurité.

L’évaluation et la prévention des risques doivent être organisées dans le cadre du document unique prévu par les dispositions légales et réglementaires » (Titre IV, Chapitre IV, article 20).

La convention collective des entreprises de services à la personne

« Les salariés sont sensibilisés et formés à la prévention des risques professionnels. Les salariés sont des acteurs conscients des enjeux et vigilants pour leur sécurité et celle de leurs collègues.

Dans la branche, les salariés sont sensibilisés notamment aux risques particuliers liés à leurs lieux de travail, qu’ils s’agissent des domiciles des bénéficiaires des services ou des autres lieux choisis par ces bénéficiaires.

Conformément aux instructions qui lui sont données, dans les conditions prévues s’il y a lieu au règlement intérieur, il incombe à chaque salarié de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail.

Le salarié prend soin du matériel mis à sa disposition par l’entreprise de service à la personne ou le bénéficiaire du service et ne les utilise pas à d’autres fins que celles prévues dans le cadre de ses activités.

Le salarié respecte les règles de manutention et de sécurité préconisées par l’entreprise de services à la personne.

Tout salarié qui, délibérément, ne respecte pas les règles de sécurité, pourra encourir des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement. De même, le refus d’un salarié de participer à une formation pourra être sanctionné » (Partie II, Chapitre III, Section 3, article 1).

• Exemple de clause

« Chaque salarié doit prendre garde à sa sécurité personnelle notamment en portant les appareils ou dispositifs de protection individuelle, tels que baudriers ou harnais de sécurité, casque, lunettes, bottes… qui sont mis à sa disposition par l’entreprise lorsqu’il exécute des travaux pour lesquels le port de ces dispositifs a été rendu obligatoire par la réglementation ou par l’entreprise. »

L’interdiction de fumer

La question de la cigarette sur le lieu de travail connaît une réponse spécifique dans le secteur des services à la personne et de l’aide, de l’accompagnement et des soins à domicile. En effet, les salariés interviennent au domicile privé des bénéficiaires ou clients et n’effectuent pas leur prestation de travail dans l’entreprise ou l’association. L’interdiction de fumer est cependant parfaitement envisageable et pourra figurer dans le règlement intérieur en intégrant le fait que cette interdiction est valable, quel que soit le lieu de travail des salariés.

Cette question peut par ailleurs soulever une interrogation quant à la protection de la santé et la sécurité des salariés qui interviennent au domicile privé de personnes qui peuvent, elles, fumer dans leur habitation… Cette épineuse problématique ne trouvera pas de réponse dans le règlement intérieur qui ne peut que se borner aux questions d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise ou l’association.

Notes

(1) Circulaire DRT n° 5-83 du 15 mars 1983, B.O. Trav. n° 83/16.

(1) Convention collective nationale étendue Branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile du 21 mai 2010, Titre IV, Chap. III, art. 13.

(1) L’ensemble des prescriptions du code du travail peut être retrouvé sur www.legifrance.fr.

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