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« Conserver des guichets est une impérieuse nécessité »

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Quelles sont les conséquences de la dématérialisation pour les CCAS ?

Les centres communaux d’action sociale (CCAS) disent que leur travail a été impacté par la dématérialisation. 89 % des adhérents de l’Unccas ont remarqué qu’il y avait un accroissement des demandes liées au fait que les personnes n’arrivent pas à résoudre leurs problèmes en raison de la dématérialisation. Cela touche tout le territoire, dans les communes rurales comme dans les grandes villes. Il s’agit en priorité de personnes sans équipements informatiques (65 % des cas), ou ayant des difficultés avec le numérique (64 %). Il s’agit souvent de personnes âgées. L’autre tiers des demandes provient de personnes maîtrisant mal le français pour la lecture comme pour l’écriture, qu’elles soient issues de l’immigration ou non. Par ailleurs, nous avons demandé aux CCAS dans combien de cas ils estiment que la difficulté liée à la dématérialisation induit un non-recours. Le pourcentage est de 70 %. Les agents des CCAS se sont alors retrouvés à attribuer une aide d’urgence à une personne qui était éligible à une aide sociale mais qui n’a pas pu en faire la demande. Ce qui entraîne un travail supplémentaire puisqu’il faut débloquer une aide d’urgence puis faire en sorte que la personne accède à ses droits.

Pourquoi la dématérialisation n’a-t-elle pas amélioré les choses ?

On n’a pas profité de la dématérialisation pour rendre les dossiers plus simples et plus souples. La déclaration d’impôt, par exemple, a été pensée par l’administration fiscale pour que le dossier – qui était très difficile à remplir – devienne simple. Les dossiers de demandes d’aides sociales comme le revenu de solidarité active (RSA), complexes sur papier, sont devenus complexes sur écran, avec les problématiques d’équipement qui peuvent manquer et la forte tentation de se dire « j’abandonne », d’autant plus si la personne est seule. On a augmenté le risque du non-recours. Quand on est bénéficiaire d’aides sociales, on cumule souvent des problématiques de précarité, de transport, parfois d’illettrisme, voire d’estime de soi, et il est déjà difficile alors de faire des démarches. Pourquoi ne pas profiter du numérique pour créer un dossier social partagé, par exemple ? Cela éviterait d’envoyer 10 fois le même document. Les procédures seraient accélérées, et le non-recours réduit. Au lieu de prendre un mois, l’ouverture des droits pourrait de faire en 24 heures.

Comment les travailleurs sociaux vivent-ils ces changements ?

Ils disent que leur responsabilité a augmenté. Les usagers qui ne parviennent pas à faire leurs démarches donnent leurs identifiants et leurs codes aux travailleurs sociaux, ou aux agents d’accueil : ils sont en possession des codes et, s’il se passe quelque chose, on peut leur demander des comptes. La dématérialisation a entraîné un accroissement d’activité parce qu’ils se retrouvent à devoir faire un travail d’accompagnement en plus pour que les bénéficiaires puissent accéder à leurs dossiers, ou alors ils se retrouvent à les remplir eux-mêmes. Et ce n’est pas leur rôle de le faire. Ils ne peuvent plus se concentrer sur leur mission principale. Il y a également une forte demande de la part des personnels des CCAS d’être formés par les caisses d’allocations familiales et d’assurance vieillesse, ou d’autres institutions, pour être capables de répondre aux questions des usagers. Les CCAS ne sont pas spécialistes de toutes les politiques sociales et ne peuvent se substituer à tous les guichets.

Comment faire évoluer les choses ?

La dématérialisation peut être bénéfique, mais il y aura encore beaucoup de personnes qui auront besoin d’un accompagnement humain. Leurs problématiques sont multiples. Le travail social nécessitera toujours une discussion, de la recherche pour comprendre la situation de l’usager et pour mettre en œuvre des actions pour l’en sortir. Le CCAS d’Amiens, qui a lancé tout un plan numérique sur ses différentes actions, fonctionne très bien parce qu’il maintient des guichets, des assistantes sociales, des gens qui se déplacent au domicile des personnes âgées. Il ne faut pas perdre de vue qu’il y a un tas d’usagers qui ne peuvent pas, voire ne souhaitent pas, passer par le numérique. Il faut permettre aux gens d’avoir le choix sur leurs modalités de service. Conserver des guichets est une impérieuse nécessité, car pour toute une tranche de la population qui bénéficie du RSA, le numérique est un mur.

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