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La vulnérabilité détournée

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La notion de « vulnerabilité », censée apporter des garanties supplémentaires à certains demandeurs d’asile, serait dans la pratique utilisée comme un critère de tri pour la cimade.

« Les textes européens, de la Commission européenne, comme du Conseil européen, font de la notion de vulnérabilité un levier pour améliorer les conditions d’accueil et les garanties de procédure pour certaines populations migrantes », explique Gérard Sadik, responsable de la thématique asile à la Cimade. On parle des personnes porteuses de handicap, des familles avec enfants, des victimes de la traite etc. La liste, assez large, se voulait non exhaustive pour pouvoir concerner un bon nombre de personnes et pour qu’elles aient des garanties. »

Mais nombreuses sont les personnes vulnérables qui se trouvent en centre de rétention. On évoque souvent le cas des familles avec enfants en bas âge – qui ont valu à la France d’être condamnée 6 fois depuis 2012 par la Cour européenne des droits de l’homme –, mais selon les associations qui travaillent sur la rétention, des personnes handicapées, âgées ou atteintes de pathologies lourdes comme le VIH sont régulièrement enfermées avant leur expulsion. S’ils peuvent faire une demande d’asile depuis les centres de rétention, la loi prévoit depuis 2015 qu’ils soient d’office en procédure accélérée, au même titre que les personnes originaires de pays « sûrs » d’après la liste établie par l’Ofpra. L’établissement devra alors statuer sur leur dossier en 15 jours, au lieu de trois mois. Et si la demande d’asile est rejetée, la procédure accélérée prévoit que la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) rende son jugement en cinq semaines au lieu de cinq mois, avec un seul juge pour examiner le dossier au lieu de trois. Le déclassement en procédure normale est cependant prévu par la loi.

Au vu des éléments du dossier et selon la vulnérabilité de la personne, l’Ofpra peut décider de déclasser une demande placée en procédure accélérée, et elle sera examinée en procédure normale. Mais l’Ofpra le reconnaît, ce n’est pas très efficace comme dispositif : en 2016, il n’y a eu que 53 déclassements sur près de 20 000 décisions en procédures accélérées et 63 en 2017 sur un peu plus de 25 000 procédures accélérées. Seul effet positif : lorsqu’une personne est déclarée vulnérable, elle obtient un entretien de vive voix avec un officier de protection, au lieu d’un entretien par visioconférence.

« Aujourd’hui, la vulnérabilité est prise comme un critère excluant, souligne Gérard Sadik. Si vous n’êtes pas vulnérable, vous n’avez pas droit aux conditions d’accueil, d’hébergement. Si vous n’êtes pas très vulnérable, vous n’avez pas droit non plus à une procédure normale. C’est le contraire de ce que disent les textes européens. Seule la moitié des personnes sont hébergées dans le dispositif national d’accueil. La France doit pourtant respecter l’interprétation conforme du droit européen, mais cela se joue toujours dans l’évaluation, souvent on n’évalue pas les personnes qui sont vulnérables. »

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