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« Les personnes accompagnées attendent qu’on les écoute »

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La coordinatrice de l’Association nationale pour le développement de l’approche DPA estime que les professionnels cherchent à imposer leurs solutions.
Le passage par l’expérimentation est indispensable pour s’approprier l’approche « développement du pouvoir d’agir » et s’y former. Pour quelles raisons ?

Si les professionnels n’ont pas les clés pour développer eux-mêmes le pouvoir d’agir, ils auront du mal à accompagner les usagers dans ce sens-là. Il y a souvent un décalage entre ce que l’on pense faire et ce que l’on fait en réalité. Pour exemple, selon des statistiques publiées en 2015 lors des états généraux du travail social, alors que 81 % des professionnels et étudiants estimaient que les personnes accueillies-accompagnées étaient associées à la construction du projet individuel, 67 % de celles-ci répondaient qu’elles n’avaient pas été associées[1]. L’expérimentation du pouvoir d’agir va permettre de toucher du doigt ce décalage et de partir sur d’autres possibles.

Le secteur social et médico-social est-il prêt à l’« empowerment » des usagers ?

Les personnes accompagnées n’attendent que cela, qu’on leur laisse une place, que l’on écoute ce qu’elles ont à dire et que les professionnels soient prêts à aller dans le sens de ce qui est important pour elles-mêmes. Or, aujourd’hui, les professionnels apportent des solutions auxquelles ils cherchent à faire adhérer les personnes. C’est de cela qu’il faut que l’on se départe, nous, les experts et les sachants.

Quels sont les freins aux changements de postures professionnelles ?

Les formations en travail social, les institutions et, parfois même, les personnes accompagnées poussent souvent les professionnels à devenir des experts. Dans la définition légale du travail social inscrite dans le code de l’action sociale et des familles, la notion de « pouvoir d’agir » a été remplacée par « le développement des capacités des personnes à agir ». Que le développement du pouvoir d’agir devienne une généralité dans la culture professionnelle des travailleurs sociaux, on n’y est pas, et on en est encore très loin !

En octobre dernier, les 5es rencontres scientifiques de la CNSA étaient consacrées aux savoirs expérientiels. N’est-ce pas le signe d’un virage ?

Reconnaître les savoirs des patients et des usagers est un premier pas mais loin d’être suffisant. Le fait de reconnaître les savoirs expérientiels n’empêchera pas les professionnels de faire « à la place » des personnes accompagnées. Un nombre important de colloques, d’ouvrages sont consacrés à la participation des usagers. Pour autant, ce n’est pas devenue une pratique courante alors que les usagers doivent être partie prenante des changements qui sont impulsés. La participation des personnes accompagnées ne doit pas passer uniquement par leur parole. Il y a un cran de plus, c’est le fait d’agir sur ce qui est important pour soi.

Repères

Ancienne assistante de service social, formatrice retraitée, Claire Jouffray est membre fondatrice, coprésidente et coordonnatrice du pôle recherche de l’Anda-DPA (Association nationale pour le développement de l’approche Développement du pouvoir d’agir).

Notes

(1) Développement du pouvoir d’agir des personnes et des collectifs. Une nouvelle approche de l’intervention sociale, ouvrage collectif sous la direction de Claire Jouffray (éd. Presses de l’EHESP, 2018).

(2) « Démarche et processus des états généraux du travail social », Brigitte Bouquet et Marcel Jaeger, dans la revue Vie sociale n° 13 (éd. érès, 2016).

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