LA FIN DE VIE, LE DÉCÈS, EST UN SUJET DÉLICAT QUI RESTE TABOU, y compris dans les Ehpad, alors que ces établissements sont confrontés quotidiennement à la disparition de leurs résidents. Selon une enquête de la Drees – sur laquelle s’appuie notre enquête (voir page 22) –, un quart des personnes qui décèdent en France chaque année résident en Ehpad. C’est une proportion considérable. Cette concentration s’explique par le fait que l’âge moyen d’entrée dans les établissements et le degré de dépendance des personnes sont de plus en plus élevés. Plus de la moitié des personnes décédant ont plus de 90 ans et ont atteint un degré maximal de dépendance.
Or, curieusement, le décès des résidents est assez peu « protocolisé » et accompagné dans les établissements. Si beaucoup d’entre eux ont signé une convention avec des équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP), ils sont peu nombreux à faire appel à ces services, alors que le besoin est important. L’explication de ce décalage tient en partie au statut des Ephad qui, s’ils sont médicalisés, ne sont pas pour autant des hôpitaux. Et ce point mérite réflexion.
En effet, la prise en charge de la dépendance est appelée à évoluer, dans le sens où chaque structure aura un rôle particulier. Le maintien à domicile sera privilégié et les établissements intermédiaires comme les résidences services ou seniors prendront une place plus importante. Au final, les Ehpad vont être appelés à se recentrer sur l’extrême dépendance et le très grand âge. L’« organisation » de la mort va constituer pour eux un enjeu crucial. L’Ehpad va donc devenir le dernier domicile des personnes âgées et confrontées à la fin de vie.
Les établissements vont devoir apprendre ou, à tout le moins, développer une culture et un savoir-faire dans l’accompagnement de la fin de vie, avec ce que cela implique d’évolution du mode de fonctionnement, et d’intégration de compétences adaptées à cette nouvelle situation.
Quand on connaît l’état de tension interne des établissements avec le manque de personnels, des formations insuffisantes et des moyens limités, on mesure que le challenge n’est pas mince. Cette question devrait être posée dans le cadre de la concertation « grand âge ». Dans ce secteur, il faut apprendre à regarder la mort en face.