« LE TÉLÉTRAVAIL DÉSIGNE TOUTE FORME D’ORGANISATION DU TRAVAIL dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux d’un employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication » (code du travail [C. trav.], art. L. 1222-9).
Décrit comme outil de lutte contre l’absentéisme permettant également aux structures y recourant de limiter les coûts notamment en matière de locaux et de fonctionnement, le télétravail doit permettre par ailleurs aux salariés de développer autonomie et productivité en garantissant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie sociale.
Le télétravail, introduit par un accord-cadre européen du 16 juillet 2002 puis transposé par l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 a été introduit dans le code du travail par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives. Toutefois, les modalités définies n’ont connu qu’un succès modéré, le cadre juridique du télétravail étant relativement restreint. Afin de développer le télétravail, une concertation a été engagée entre les partenaires sociaux en 2017, avec les organisations patronales et salariales le 7 juin 2017. C’est enfin l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 qui a précisé le cadre juridique du télétravail et posé un nouveau cadre plus moderne et adapté aux nouvelles méthodes de travail. On notera que les nouvelles règles du télétravail sont applicables depuis le 23 septembre 2017 et ont été complétées par la loi de ratification du 29 mars 2018(1). La nouvelle définition du télétravail permet d’admettre différentes formes de travail dès lors que le salarié effectue sa prestation en dehors des locaux de l’employeur de manière volontaire et en utilisant les technologies de l’information et de la communication.
Le télétravail peut donc revêtir différentes formes :
• le télétravail sédentaire : le salarié exécute sa prestation de travail directement à son domicile ou depuis un centre de proximité disposant des équipements informatiques et de télécommunications ou encore depuis un bureau satellite de l’employeur ;
• le télétravail pendulaire ou alterné : le salarié exécute alors sa prestation de travail alternativement et selon des modalités définies par les deux parties au contrat ou accord collectif/charte dans plusieurs lieux intégrant, par exemple, son domicile et l’entreprise ;
• le télétravail nomade : le salarié exécute son contrat de travail en dehors des locaux de l’entreprise mais y conserve un bureau. Il s’agit alors notamment des salariés dont l’activité impose un mode de travail nomade comme les commerciaux ou toutes autres professions qui nécessitent de nombreux déplacements et qui, grâce aux moyens de télécommunication, demeurent en contact avec l’entreprise.
Les modalités de mise en place du télétravail sont précisées par l’article L. 1222-9 du code du travail précité qui détermine expressément une mise en place par accord collectif, ou à défaut charte, et, en l’absence de l’un de ces derniers, par simple accord entre le salarié et l’employeur.
Lorsque l’employeur entend fournir un cadre strict au télétravail, il est dans l’obligation de recourir par principe à un accord collectif et, par exception, à une charte après avoir recueilli l’avis du comité social et économique (CSE) s’il existe. Il n’est donc à aucun moment envisageable pour l’employeur de tenter de recourir à la mise en place d’une charte sans avoir démontré que l’accord collectif n’a pas pu être mis en place.
On notera à titre liminaire que l’accord collectif peut être un accord qui aurait été négocié au préalable. Il pourra donc s’agir indifféremment d’un accord collectif de branche, d’entreprise ou encore de groupe. En revanche, conformément à la nouvelle hiérarchie des normes, l’accord d’entreprise primerait sur l’accord collectif de niveau supérieur. Quant aux parties à la négociation pour l’accord, s’est posée la question de savoir si l’employeur devait suivre les règles classiques de la négociation collective. Dans l’hypothèse où il existe des délégués syndicaux dans l’entreprise, la négociation devra impérativement être engagée avec ces derniers et ce n’est qu’en cas d’échec que l’employeur pourra recourir à la charte. En revanche en l’absence de délégué syndical, l’employeur pourra immédiatement recourir à la mise en place d’une charte, sans devoir utiliser auparavant les modalités de négociation d’accord collectif avec le CSE ou éventuellement un salarié mandaté.
Le code du travail prévoit expressément les mentions qui doivent obligatoirement être contenues dans le document mettant en place le télétravail :
• les conditions de passage en télétravail intégrant les épisodes de pollution et les conditions de retour à une exécution normale du contrat hors télétravail ;
• les modalités d’acceptation pour le salarié quant à la mise en œuvre du télétravail ;
• les modalités de contrôle en matière de temps de travail et de régulation de la charge de travail ;
• les plages horaires durant lesquelles l’employeur a la faculté de contacter le salarié en télétravail ;
• les modalités d’accès spécifique des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail. Il s’agira ici de respecter les conditions prévues par l’article L. 5213-6 du code du travail.
Ainsi, tout accord ou toute charte devra impérativement comprendre l’intégralité des mentions précitées.
En pratique, dans le cadre évoqué et afin d’éviter par la suite des contestations ou difficultés d’application, il est formellement conseillé à l’employeur de définir avec la plus grande précision l’intégralité des conditions prévues et de ne pas se limiter aux obligations du code du travail.
Attention : S’agissant des accords collectifs, il est utile de rappeler que ces derniers devront nécessairement comprendre également toutes les mentions obligatoires pour les conventions ou accords collectifs (préambule, renouvellement et révision, clause de suivi, durée de l’accord…).
L’article L. 1222-9 du code du travail précise expressément que dans le cas de l’élaboration d’une charte, l’employeur devra recueillir l’avis du comité social et économique. En l’absence de CSE, il conviendra de consulter le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ou, à défaut, les délégués du personnel. De plus, dans l’hypothèse d’une structure comportant plusieurs établissements distincts et de la décision de mettre en place le télétravail au niveau de l’entreprise, l’employeur devra impérativement consulter le comité central et les comités d’établissements concernés.
A noter : La doctrine n’est pas unanime sur la consultation des représentants du personnel dans les structures employant moins de 50 salariés. En effet, ce type de consultation concernait antérieurement le comité d’entreprise et éventuellement le CHSCT si la décision entraînait une modification de l’organisation du travail. Toutefois, les anciens délégués du personnel étant compétents s’agissant de décision affectant les conditions d’emploi des salariés, il apparaît nécessaire de les consulter également. En conclusion, devraient être consultés les représentants du personnel membres du CSE, quelle que soit la taille de l’entreprise.
Dans la mesure où la mise en place d’un accord collectif ou d’une charte ne connaît pas de caractère obligatoire pour l’employeur, il est tout à fait possible que le salarié et l’employeur décident de formaliser un accord individuel par écrit de télétravail. A ce titre, l’article L. 1222-9 du code du travail, modifié par l’ordonnance du 22 septembre 2017 puis par la loi du 29 mars 2018(1) et enfin par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, précise qu’en l’absence d’accord collectif ou de charte, l’accord entre le salarié et l’employeur peut être formalisé par tout moyen.
A noter : La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a modifié l’article relatif au télétravail (C. trav., art. L. 1222) pour intégrer des dispositions spécifiques aux travailleurs handicapés. Dès lors que la demande de télétravail en dehors du cadre d’un accord collectif ou une charte sera formulée par un travailleur handicapé tel que défini par le code du travail ou un proche aidant tel que défini par le code de l’action sociale et des familles, l’employeur aura l’obligation de motiver sa décision de refus.
Dès lors que le code du travail prévoit la possibilité de mettre en place le télétravail par tout moyen, l’employeur et le salarié peuvent décider d’un commun d’accord une mise en place par accord verbal, email ou encore par écrit dans le cadre de tout autre support. En revanche, il est conseillé tant pour l’employeur que pour le salarié, de formaliser l’accord relatif au télétravail par écrit afin de conserver la preuve de son existence, mais également des conditions qui ont pu être mises en place ou négociées entre les parties. Le code du travail ne donne, lorsque l’on parle d’« accord individuel entre le salarié et l’employeur », aucun contenu obligatoire contrairement à la charte élaborée par l’employeur après avis du CSE ou à l’accord collectif.
De nouveau, malgré l’absence de prescriptions légales obligatoires, il est conseillé de reprendre l’intégralité des mentions qui sont exigées par l’accord collectif et la charte par le code du travail. La fixation des modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mises en œuvre du télétravail comme du contrôle du temps de travail, de régulation de la charge de travail ou la détermination des plages horaires notamment doit permettre de garantir au salarié et à l’employeur le respect du cadre légal défini pour le télétravail. En effet, si le code du travail ne prévoit pas de mentions obligatoires à faire figurer dans l’accord à caractère individuel, il n’en reste pas moins qu’il ne saurait être contraire au droit du travail.
Concernant le support écrit au sein duquel l’employeur et le salarié vont pouvoir formaliser leur accord afin de garantir la preuve tant de l’accord quant au recours au télétravail que les conditions de ce dernier, il est rappelé que le code du travail n’oblige pas les parties à une contractualisation dans le contrat du travail. En revanche, si le législateur laisse le libre choix entre le salarié et l’employeur du support, il apparaît en pratique indispensable de faire prendre au support la forme d’une clause insérée directement au contrat de travail ou d’un avenant à ce dernier spécifique au télétravail. Afin d’éviter par la suite tout litige, il sera également important de prévoir les conditions de retour à l’exécution du contrat de travail sans télétravail si l’employeur ou le salarié souhaite mettre fin à ces modalités spécifiques. En effet, le code du travail se contente de préciser en dehors de la mise en place d’un accord collectif ou d’une charte, la faculté de recourir à une décision individuelle. Il n’est toutefois pas question des modalités de mise en place comme de cessation du télétravail et le fait de ne prévoir aucune condition de retour du salarié à un emploi dans les locaux de l’entreprise ou de l’association pourrait évidemment conduire à des difficultés d’application pratique. En effet, précisons que l’article L. 1222-10 du code du travail ne prévoit qu’une obligation à l’égard de l’employeur de donner priorité au salarié en télétravail pour réintégrer un poste « classique » correspondant à ses qualifications et compétences outre le fait de porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature.
Il est ainsi conseillé de définir la procédure de retour du salarié à un emploi dans les locaux de la structure intégrant :
• les modalités de demande du salarié en situation de télétravail ;
• le délai de réponse de l’employeur ;
• la procédure permettant une étude des possibilités du salarié de retour ou accès à l’emploi dans les locaux de l’entreprise ;
• les modalités éventuelles de refus ;
• les conditions et délais de réintégration.
Enfin, la signature d’un nouvel avenant au contrat de travail du salarié sera par ailleurs indispensable afin de garantir et de formaliser les conditions du retour au travail dans le cadre d’un emploi dans les locaux de l’entreprise ou de l’association.
La mise en place du télétravail ne nécessite pas obligatoirement le passage du salarié en télétravail pour la totalité des heures de son contrat. Ainsi, il pourra être prévu que les salariés effectuent le télétravail en alternance avec des périodes de travail au sein des locaux de l’entreprise ou de l’association. Dans cette hypothèse, il est indispensable que soient fixées les périodes de télétravail et les périodes où le salarié doit être présent dans les locaux de l’employeur. Ces conditions devront être définies dans le cadre de l’accord collectif, de la charte ou dans la décision individuelle entre l’employeur et le salarié.
Attention : Il est important lors de la détermination des jours télétravaillés de bien réfléchir aux modalités de mise en place et de prévoir éventuellement une certaine souplesse, en appréciant par exemple le nombre de jours effectués en télétravail sur la semaine ou au mois sans les définir précisément chaque semaine. En effet, les salariés comme l’employeur sont ensuite tenus de respecter le calendrier et la modification du nombre ou des jours de télétravail par l’employeur serait alors en principe constitutive d’une modification du contrat que nécessiterait l’accord du salarié.
Par ailleurs, doivent être fixées des plages horaires pendant lesquelles le salarié peut être contacté par son employeur ou ses collègues de travail. La Cour de cassation a estimé dans un arrêt ancien que le salarié qui n’était pas joignable durant les plages horaires fixées par l’accord collectif, la charte ou l’accord individuel pouvait être sanctionné (Cass. soc., 17 février 2004, n° 01-45889). Cette jurisprudence ne semble par avoir été remise en question par les nouvelles modalités de télétravail mises en place par l’ordonnance du 22 septembre 2017 précitée. Notons également qu’en toute hypothèse la détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail est obligatoire dans le cadre de l’accord collectif ou de la charte (C. trav., art. L. 1222-9).
La fixation des plages horaires et la possibilité retenue par la Cour de cassation de sanctionner en cas d’absence de réponse du salarié pendant ces périodes conduisent également à s’interroger sur le contrôle des modalités des horaires de travail. En effet, il est difficile de déterminer pour l’employeur comment décompter le temps de travail en dehors des plages où le salarié doit être joignable et donc de vérifier le respect de la réglementation du temps de travail pour le télétravailleur. Il est en effet utile de rappeler que la mise en œuvre du télétravail ne pourra en aucun cas conduire à enfreindre la réglementation relative au temps de travail comme la durée maximale quotidienne, hebdomadaire ou encore les temps de repos obligatoire. De nouveau, et comme précédemment indiqué, la charte ou l’accord collectif aura l’obligation de comprendre ces éléments. Pour autant, il reste conseillé de déterminer précisément les modalités selon lesquelles le temps de travail pourra être contrôlé par exemple par la mise en place d’un logiciel de pointage directement sur l’ordinateur ou via un simple système de déclaration par le salarié.
L’article L. 1222-9 du code du travail précise que la charte ou l’accord collectif prévoit la régulation de la charge de travail. De nouveau, aucune mention n’est faite pour les accords individuels mais il demeure conseillé de prévoir les conditions relatives à la régulation de la charge de travail. En toute hypothèse, demeure l’obligation pour l’employeur quel que soit le mode de recours au télétravail d’organiser chaque année un entretien portant notamment sur les conditions d’activité du salarié et sa charge de travail. Cet entretien pourra être fixé dans le même temps que les entretiens annuels effectués au sein de la structure et permettre un échange efficace sur les conditions d’activité et la charge de travail du télétravailleur. La nécessité de conserver un écrit est par ailleurs rappelée.
La tenue de l’entretien revêt réellement un caractère indispensable afin de pouvoir garantir que le salarié placé en situation de télétravail est soumis à des conditions respectant le droit du travail. En outre, la fixation de la charge de travail amène également à s’interroger sur les modalités de contrôle offerts à l’employeur pour vérifier que les tâches et les délais sont respectés par le salarié. L’accord national interprofessionnel (ANI) du 19 juillet 2005 sur le télétravail a précisé à ce titre : « La charge de travail, les normes de production et les critères de résultats exigés du télétravailleur doivent être équivalents à ceux des salariés en situation comparable travaillant dans les locaux de l’employeur. Des points de repère moyens identiques à ceux utilisés dans l’entreprise sont donnés au télétravailleur. La charge de travail et les délais d’exécution, évalués suivant les mêmes méthodes que celles utilisées pour les travaux exécutés dans les locaux de l’entreprise, doivent, en particulier, permettre au télétravailleur de respecter la législation relative à la durée du travail et plus spécialement la durée maximale du travail et les temps de repos. ». Ces précisions données par l’ANI n’ont pas été remises en cause par la nouvelle organisation du télétravail depuis l’ordonnance du 22 septembre 2017.
Il ressort donc que l’employeur, afin de contrôler l’activité et la charge du travail du salarié, devra recourir à des modalités identiques à celles utilisées lorsque le salarié effectue son travail au sein des locaux de l’entreprise.
De manière légitime, l’employeur pourra également souhaiter réussir à contrôler l’activité du salarié et surtout tenter de vérifier la présence du télétravailleur et sa disponibilité. En réalité, la mise en place du télétravail implique de pouvoir, lorsque les conditions de l’emploi du salarié le permettent, donner une certaine latitude au salarié dans l’exécution des fonctions. En tout état de cause, comme pour la surveillance du travailleur dans les locaux de l’entreprise ou de l’association, la mise en place d’un mode de surveillance devra être pertinente et proportionnée à l’objectif poursuivi. L’information du télétravailleur sera évidemment obligatoire également.
Attention : La mise en place d’un logiciel de contrôle spécifique ou l’obligation faite au salarié de signaler régulièrement sa présence constituant un outil de contrôle des salariés en situation de télétravail, il apparaîtra indispensable de consulter les membres du comité social et économique et éventuellement, selon la situation, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Enfin, l’on doit s’interroger sur les équipements de télétravail et la conformité du poste de travail du salarié : l’employeur tenu d’une obligation de sécurité ne peut se dispenser d’y satisfaire sous le prétexte que la prestation de travail s’effectue au domicile du salarié ou dans un espace de coworking. Se posera la difficulté pour lui de vérifier le poste de travail du salarié s’il travaille depuis son domicile dès lors qu’il s’agit d’un lieu privé. Dans ces conditions, en aucun cas l’employeur ne pourra imposer au salarié d’intervenir à son domicile et ne pourra, sans son accord exprès, aménager le poste de travail.
Cette difficulté de vérifier notamment la conformité des installations électriques et techniques conduit l’employeur à solliciter du salarié une attestation de conformité technique et électrique dont le coût serait à la charge de l’employeur ou encore de proposer l’intervention d’un technicien à domicile sous la réserve expresse de l’accord du salarié. Il apparaît indispensable de bien formaliser par écrit ces éléments afin de garantir que le salarié a conscience de bien respecter les règles de sécurité. Notons de surcroît que le code du travail prévoit expressément que l’accident survenu sur le lieu au sein duquel est exercé le télétravail et ce pendant l’exercice de l’activité professionnelle sera présumé être un accident de travail comme tout autre accident qui se déroulerait sur le site de l’entreprise ou de l’association (C. trav., art. L. 1222-9).
Il est intéressant de relever que la question relative à l’équipement du télétravailleur et notamment l’ordinateur portable ou encore l’accès Internet n’est pas réglée par le code du travail. En effet, si ce dernier comporte des dispositions relatives du salarié quant à la restriction de l’usage des équipements, outils informatiques ou télécommunication lorsqu’ils sont fournis par l’employeur, aucune mention ne permet de déterminer si les équipements appartiennent nécessairement au salarié ou doivent être fournis par l’employeur.
Ainsi, dès lors que l’employeur fournit tout ou partie du matériel, il est recommandé de formaliser par écrit la liste des différentes fournitures et de prévoir la signature et la date de remise au salarié concerné. En revanche, lorsque ce sont les équipements personnels du salarié qui sont utilisés dans le cadre du télétravail, l’employeur devra procéder au remboursement du coût directement lié au télétravail. A ce titre, relevons que malgré l’absence de prescription spécifique dans le code du travail sur la prise en charge des coûts relatifs aux matériels, logiciels ou abonnements, demeure une obligation pour l’employeur dès lors que le salarié utilise des équipements personnels à des fins professionnelles.
Attention : Il appartiendra à l’employeur dès lors que le salarié utilise un matériel informatique de bien vérifier le respect du règlement général du traitement des données personnelles en assurant la protection des données utilisées par le télétravailleur dans le cadre professionnel en cas, par exemple, de mise en place d’un serveur à distance ou cloud.
Le code du travail prévoit expressément que le télétravailleur doit bénéficier de droits identiques à ceux du salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise ou de l’association.
Toutefois, on peut s’interroger sur l’attribution des titres de restaurant ou d’avantages liés au fait que le travailleur ne connaît pas la même situation pratique que les salariés qui exécutent leurs prestations dans les locaux de l’entreprise ou de l’association. L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) retient que les télétravailleurs bénéficient des mêmes droits individuels et collectifs que les autres salariés : dès lors que ces derniers bénéficient de titres restaurant, les télétravailleurs ne devraient pas pouvoir en être exclus. De surcroît, l’article 4 de l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 sur le télétravail précise que « les télétravailleurs bénéficient des mêmes droits et avantages légaux et conventionnels que ceux applicables aux salariés en situation comparable travaillant dans les locaux de l’entreprise ».
On relèvera toutefois que les dispositions du Code du travail ne prévoient en aucun cas que le salarié, pour bénéficier des titres restaurant, doit effectuer sa prestation de travail en dehors de son domicile. Il n’existe donc pas de réponse certaine quant à cette situation mais l’employeur qui souhaiterait exclure les télétravailleurs de l’attribution des titres restaurant devrait prévoir des critères objectifs de versement des titres, s’appliquant à l’intégralité des salariés sans préciser expressément que les télétravailleurs sont exclus de cet avantage. Il convient donc d’être très prudent avec la possibilité de prévoir une distinction entre les télétravailleurs et les autres salariés de l’entreprise, au risque d’une inégalité de traitement discriminatoire.
Dans le même cadre, se pose la question du remboursement des frais de transport domicile-lieu de travail prévus par le code du travail (C. trav., art. R. 3261-1). En effet, l’employeur a l’obligation légale de prendre en charge 50 % du prix des titres d’abonnements souscrits par les salariés dans le cadre des déplacements entre la résidence habituelle et le lieu de travail. Si le télétravailleur exécute sa prestation de travail au sein de son domicile, il n’existe donc pas de frais de transport afférents au travail… De nouveau, aucune réponse n’est donnée par le code du travail et il conviendrait en pratique pour les salariés alternant des périodes de télétravail et de travail dans les locaux de la structure de retenir des dispositions identiques au salarié employé à temps partiel. Dans ces conditions ce n’est qu’en cas d’horaires inférieures à un mi-temps pour la partie du temps de travail réalisée dans les locaux que l’employeur pourra prévoir une prise en charge de l’abonnement au prorata du nombre d’heures de travail par rapport à un emploi à mi-temps. Dès lors, si le nombre de jours de télétravail conduit à ne pas être inférieur à l’équivalent d’un mi-temps, le salarié devra bénéficier du remboursement de ses frais de transport dans les mêmes conditions que les salariés travaillant dans les locaux de l’association ou de l’entreprise.
Avant d’envisager la mise en place du télétravail au sein de l’entreprise ou de l’association, il est très important de procéder en amont à une étude précise et détaillée de son impact au sein de la structure. Il importera à l’employeur de vérifier s’il entend poser un cadre global au télétravail ou si, au contraire, il souhaite pouvoir gérer les demandes des salariés au cas par cas.
En effet, les dispositions du code du travail ne font par principe aucune restriction quant à la qualité des salariés éligibles. Dès lors, le télétravail est donc en théorie envisageable pour tous les salariés. Il appartient donc à l’employeur de définir s’il entend poser un cadre strict et précis qui permettra d’exclure des catégories de salariés définies par lui et de n’ouvrir le télétravail qu’à d’autres types de salariés comme dans le cadre d’un accord collectif ou d’une charte. Si l’employeur souhaite conserver une plus grande liberté, il procédera alors par décision individuelle pour chaque demande de salarié en intégrant toutefois l’obligation de répondre à chacun des salariés individuellement de manière plus précise qu’en présence d’un accord collectif ou d’une charte.
Attention : Si l’employeur n’a alors pas l’obligation de motiver son refus en cas de décision individuelle, la différence entre deux salariés placés dans des situations identiques ne pourra pas conduire à retenir un motif discriminatoire. Dans le cadre de l’accord collectif ou la charte, l’employeur devra toujours veiller à motiver le refus du recours au télétravail par un motif non discriminatoire afin d’éviter toute contestation éventuelle du salarié par la suite devant la juridiction prud’homale.
L’article L. 1222-9 du code du travail ne prévoit de consultation impérative du comité social et économique (CSE) que dans le cadre de l’élaboration d’une charte par l’employeur. En principe, les membres de la délégation du CSE ne devraient donc pas être sollicités lorsque l’employeur ne recourt au télétravail que par le biais d’accords individuels signés par chacun des salariés. Cependant, lorsque l’employeur signe des accords individuels avec plusieurs salariés, la question de la consultation du CSE demeure : dès lors que les décisions individuelles impactent tout de même l’organisation du travail, n’y a-t-il pas une place pour la consultation des représentants du personnel ?
L’article L. 2312-17 du code du travail précise ainsi que le CSE est consulté sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi. L’introduction du télétravail même via accords individuels entre l’employeur et chacun des salariés concernés conduisant à modifier l’organisation du travail amène en conséquence à considérer que la consultation des représentants du personnel devrait être systématique.
Au-delà de l’indemnisation relative au télétravail mise à la charge de l’employeur intégrant le remboursement des frais engendrés par le télétravail – type chauffage, électricité, Internet ou téléphone – effectués au réel ou par le biais d’une indemnité forfaitaire, le salarié en situation de télétravail doit bénéficier par ailleurs d’une indemnisation spécifique dès lors que le télétravail est bien effectué au domicile privé du salarié.
L’indemnité d’occupation est exclue pour tout télétravailleur exécutant sa prestation de travail en espace de coworking ou dans le cadre d’un bureau délocalisé appartenant et financé par son employeur.
La Cour de cassation a rappelé récemment l’obligation de versement de l’indemnité d’occupation du logement mais également l’absence de variation en fonction du temps de travail effectif ou du fait que le salarié ne soit placé en télétravail qu’à temps partiel et non à temps plein (Cass. soc., 8 novembre 2017, n° 16-18499). Au regard de cette jurisprudence, il apparaît que le montant de l’indemnisé d’occupation ne devrait donc plus prendre en compte la durée d’occupation du domicile au titre du télétravail mais uniquement le fait que le salarié utilise son logement pour effectuer sa prestation de travail.
L’article L. 1222-11 du code du travail prévoit la possibilité de mise en place du télétravail dans des conditions particulières : « En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. »
L’utilisation du télétravail dans ces circonstances exceptionnelles relève alors du simple aménagement de poste et non d’une modification du contrat de travail. Le salarié ne pourra en principe pas opposer de refus à son employeur.
Le recours au télétravail en cas de circonstances exceptionnelles devra être distingué du télétravail mis en place en période de pollution. En effet, les cas de pollution ne sont pas prévus par le même article du code du travail (C. trav., art. L. 1222-9, II, 1). La mise en place du télétravail en période de pollution, si elle doit être prévue dans l’accord collectif ou la charte, n’est assortie d’aucune sanction si la mention n’est pas intégrée. Il est toutefois utile de rappeler que l’employeur pourra cependant se voir reprocher la violation de son obligation de sécurité en ne mettant pas en place une telle disposition en cas de pics de pollution déclarés.
(1) Loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour le renforcement du dialogue social.
(1) Loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour le renforcement du dialogue social.