LA MALADIE DU SALARIÉ, QU’ELLE SOIT D’ORIGINE PROFESSIONNELLE OU NON, ou même liée à un accident du travail, n’est pas sans incidence sur la relation de travail. Une vigilance toute particulière est même requise dans le secteur sanitaire et social tant de nombreux métiers sont concernés par les arrêts de travail, qu’ils aient pour origine des pathologies physiques ou psychiques. En fonction des structures, des publics pris en charge, des mesures d’accompagnement déjà adoptées, le taux d’absentéisme peut ainsi être particulièrement élevé.
Il appartient alors aux responsables des ressources humains, aux directions, aux managers, aux représentants du personnel, d’appréhender avec précision ces situations aux enjeux humains et juridiques forts.
La maladie du salarié n’entraîne pas nécessairement l’arrêt de travail de l’intéressé, notamment si son état de santé permet la poursuite de l’exécution de la prestation de travail. Le législateur précise néanmoins qu’en cas de maladie grave, le salarié doit bénéficier « d’autorisations d’absence pour suivre les traitements médicaux rendus nécessaire par son état de santé » (code du travail [C. trav.], art. L. 1226-5). Il en est ainsi des salariés atteints d’une affection de longue durée, comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse.
Pour ceux dont l’état de santé implique un arrêt momentané ou plus pérenne de la prestation de travail, le certificat médical d’arrêt de travail est prescrit par le médecin traitant et transmis à l’employeur et à la caisse primaire d’assurance maladie dans les 48 heures (C. trav., art. L.1226-1). Le contrat de travail du salarié est alors suspendu, ce qui peut nécessiter, pour qu’il puisse revenir dans l’entreprise, de respecter un certain formalisme à l’expiration de l’arrêt de travail. Il peut également être envisagé une rupture du contrat de travail.
Conséquence directe de l’arrêt de travail, le contrat de travail est suspendu entre les parties. En principe, les obligations principales cessent d’être dues. Le salarié n’exécute plus sa prestation de travail et l’employeur voit son obligation de verser le salaire suspendue. Un certain nombre d’obligations subsistent néanmoins, qu’il s’agisse de l’obligation de loyauté ou de celle de discrétion du salarié, mais aussi des mandats de représentation que l’arrêt de travail ne suspend pas. Plus largement, le maintien du contrat de travail, toutefois suspendu, implique une analyse de l’incidence concrète de cette situation.
Le salarié dont le contrat de travail est suspendu du fait de sa maladie ne doit en aucune matière, directement ou indirectement, être lésé pour ce motif, notamment en matière de rémunération, d’intéressement, de formation, de qualification, ou encore de promotion professionnelle (C. trav., art. L. 1132-1). Dans le cas contraire, l’employeur opérant une différence de traitement en fonction de l’état de santé des uns ou des autres est susceptible d’être civilement et pénalement sanctionné pour discrimination (C. trav., art. L. 1132-1). Cette règle, applicable quelle que soit l’origine de la maladie, est expressément rappelée s’agissant des accidents du travail et des maladies professionnelles (C. trav., art. L. 1226-8).
La mise en œuvre concrète de ce type de prescription est parfois malaisée, mais pourtant nécessaire. Ainsi, en matière salariale, si des augmentations collectives et individuelles sont attribuées à tous à un moment de l’année, les salariés en arrêt maladie doivent également en bénéficier, au moins à leur retour.
De même, si un accord d’intéressement existe et qu’une prime d’intéressement est versée à l’occasion d’un exercice, les salariés dont le contrat de travail est suspendu du fait d’une maladie ne doivent pas être exclus du dispositif. En revanche, la répartition peut s’effectuer, en tout ou partie, en fonction de la durée de présence des intéressés au cours de l’exercice considéré (C. trav., art. L. 3314-5). De facto, les salariés dont le contrat de travail est suspendu du fait d’une maladie d’origine non professionnelle sont alors lésés par la perception d’une prime moindre. Il ne s’agit pourtant pas d’une discrimination.
Ces deux exemples démontrent que l’appréciation des situations, de l’existence ou non d’une discrimination fondée sur l’état de santé, n’est donc pas toujours évidente. Tantôt une stricte égalité de traitement doit être respectée, au besoin par le recours à des mesures de rattrapage ou de compensation, tantôt la situation n’est que la simple résultante de l’absence du salarié.
Dans l’hypothèse d’une suspension du contrat de travail pour maladie, il se peut que le salarié ne bénéficie d’aucun maintien de salaire par son employeur, notamment s’il n’a pas 1 an d’ancienneté et que la convention ou l’accord collectif n’instaure pas de régime plus favorable que la loi, ou bien que l’intéressé n’a pas, ou plus, le droit aux indemnités journalières de la sécurité sociale (voir page 43). Dans ce cas, un bulletin de paie à zéro peut être établi par l’employeur. Si l’intéressé bénéficiait de la complémentaire santé d’entreprise, la participation de l’employeur peut également être suspendue (circulaire DSS « questions-réponses » du 29 décembre 2015 relative aux contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de santé, QR 5). Il appartient alors au salarié de financer l’intégralité de sa couverture des frais de santé jusqu’à son retour dans l’entreprise(1).
Dès lors qu’un salarié est absent pour maladie, se pose la question de son droit à congés payés. Il faut alors distinguer ce qui relève de l’acquisition de droits à congés et ce qui concerne la prise effective des congés payés.
En matière d’acquisition des droits à congés, le code du travail assimile les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle à des périodes de travail effectif (C. trav., art. L. 3141-5). Dans la limite d’une durée ininterrompue de 1 an, ces périodes donnent donc lieu à l’acquisition de 2,5 jours ouvrables de congés par mois. En revanche, les absences dues à un accident de trajet ou à une maladie d’origine non professionnelle n’ouvrent pas droit à de nouveaux congés. Cette distinction n’est pas prévue par la directive européenne n° 2003/88/CE du 4 novembre 2003 et son application directe pourrait, à l’avenir, imposer une évolution des pratiques en la matière (en ce sens : Cass. soc., 22 juin 2016, n° 15-10.111).
S’agissant de la prise effective des congés, la maladie survenant juste avant la période de congés prévue n’amène à décompter aucun des jours programmés. Les jours de congés sont alors maintenus au solde du compteur du salarié et reportés pour une utilisation future. Ils ne peuvent d’ailleurs pas être considérés comme « perdus ». La difficulté est autre lorsque le salarié tombe malade pendant ses congés. L’application du droit de l’Union européenne amène à faire prévaloir l’arrêt maladie sur la période de congés (CJUE, 21 juin 2012, aff. C78/11). Au titre de ses congés payés, le salarié doit bénéficier d’une période dédiée au repos et aux loisirs, ce que la maladie ne permet pas. Dès lors, à suivre la position de la juridiction européenne, une fois l’employeur informé de l’arrêt maladie de son salarié pendant ses congés, le décompte des jours de congés cesse et l’indemnisation est celle de la maladie. Les jours non pris restent alors crédités au compteur de l’intéressé, qui pourra les prendre ultérieurement, une fois que la suspension de son contrat de travail aura cessé. Cette position, d’application directe en France, en dépit de son absence de codification dans le code du travail, est encore intégrée – non sans risque – de manière très hétérogène dans les entreprises.
L’absence du salarié malade amène la structure à devoir réagir à celle-ci afin de répartir, de différer et d’aménager le travail que l’intéressé fournissait jusqu’alors. Pour cela, bien entendu, les heures supplémentaires et complémentaires constituent de précieux outils. Mais, bien souvent, cela ne saurait suffire. Le recours aux compléments d’heures par avenant ou à des contrats de remplacement s’impose alors.
Instauré en 2013, le complément d’heures par avenant permet d’augmenter temporairement, par voie d’avenant au contrat, la durée de travail prévue par le contrat du salarié à temps partiel, notamment pour remplacer un salarié absent (C. trav., art. L. 3123-22). La solution présente l’avantage de permettre des augmentations de volume horaire importantes pour les salariés à temps partiel mobilisés pour le remplacement. En outre, et cela renforce l’attractivité du dispositif, en cas de remplacement d’un salarié absent nommément désigné, le nombre d’avenants temporaires pouvant être conclus dans l’année n’est pas limité. Sur un plan financier, les heures réalisées par le salarié remplaçant dans le cadre de cet avenant sont rémunérées avec une majoration fixée par voie conventionnelle et au moins égale à 25 %.
En revanche, une limite importante au développement du dispositif est posée par le législateur : le principe et les modalités de mise en œuvre des compléments d’heures par avenant doivent être prévus par une convention ou un accord de branche étendu. Il n’est ainsi pas possible d’y recourir par décision unilatérale de l’employeur ou par accord d’entreprise. A chacun donc de s’assurer que, dans sa convention collective, cette faculté existe. Il en est notamment ainsi pour les structures relevant de la convention collective nationale des acteurs du lien social et familial : centres sociaux et socioculturels, associations d’accueil de jeunes enfants, associations de développement social local du 4 juin 1983 (chap. IV, art. 2.6.).
Mais la sollicitation ou sur-sollicitation des salariés de la structure n’est pas toujours suffisante ou opportune. Il est souvent nécessaire de remplacer le salarié absent par une personne n’appartenant pas aux effectifs de l’employeur. Il peut s’agir de l’emploi direct de salariés en contrat de travail à durée déterminée (CDD) ou du recours à des salariés intérimaires. Dans les deux cas, le remplacement d’un salarié absent, notamment pour maladie, constitue un motif valable de recours à ce type de contrat (C. trav., art. L. 1242-2 et L. 1251-6). Mais l’encadrement de cette solution demeure important puisque le salarié recruté ne peut remplacer qu’un seul salarié absent et que le nom et le poste de ce dernier doivent figurer dans le contrat de travail du remplaçant. En revanche, les remplacements dits « en cascade » sont autorisés, permettant une meilleure allocation des compétences et expériences au sein de la structure. Ce motif de recours demeure néanmoins intéressant en ce que non seulement les litiges sont plus rares que pour d’autres motifs (accroissement temporaire d’activité par exemple), mais aussi le terme peut être précis ou imprécis, les durées maximales ne s’appliquent pas, tout comme le nombre maximum de renouvellements.
Si l’arrêt de travail suspend le contrat de travail, il ne suspend pas les mandats dont le salarié est titulaire (comité d’entreprise, délégation du personnel, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, comité social et économique…). Cela implique que l’employeur continu d’être tenu d’inviter son élu aux réunions liées à son mandat, de lui communiquer les documents nécessaires à l’exercice de ses fonctions représentatives, ainsi que de lui permettre d’exercer sa liberté de circulation dans l’entreprise. A la condition que son médecin traitant l’ait expressément autorisé à poursuivre son activité de représentation, la Cour de cassation a également considéré que le salarié devait bénéficier du paiement de ses heures de délégation (Cass. ch. mixte, 21 mars 2014, n° 12-20002 et 12-20003).
A l’issue de l’arrêt de travail, à tout le moins une fois que son terme approche, le retour du salarié doit être anticipé et envisagé par l’ensemble des parties prenantes : le ou les médecins (du travail et, le cas échéant, traitant), l’employeur, qu’il s’agisse de la direction des ressources humaines ou du manager de l’intéressé, et le salarié en arrêt. C’est alors au médecin du travail de jouer le rôle de chef d’orchestre dans l’organisation du retour dans l’entreprise. Il peut notamment, au regard de la compatibilité de l’activité avec l’état de santé de l’intéressé, souhaiter un retour à temps partiel.
Dès lors que l’arrêt de travail a duré plus de 30 jours, ou même sans condition de durée minimale si l’arrêt est justifié par une maladie professionnelle, le salarié doit passer une visite médicale de reprise auprès du médecin du travail (C. trav., art. R. 4624-31). Cette visite peut être organisée à l’initiative de l’employeur ou du salarié, lorsque la reprise du travail est envisagée. Elle a pour objet d’apprécier l’aptitude du salarié à reprendre ses anciennes conditions de travail, mais aussi d’apprécier ou de préconiser des aménagements et adaptations du poste de travail du salarié (C. trav., art. R. 4624-32).
Tant que le salarié n’a pas passé sa visite médicale de reprise, son contrat de travail est suspendu. Il est donc essentiel que l’employeur organise au plus tôt la visite dès lors que le retour du salarié est prévu. Il en va de sa responsabilité et du respect de son obligation de sécurité. Bien souvent, néanmoins, l’absence d’organisation rapide d’une visite médicale est due aux carences du service de santé au travail dont relève l’entreprise. Il appartient alors à l’employeur de tout mettre en œuvre pour obtenir les rendez-vous nécessaires pour ses salariés arrêtés. En cas de dommages liés aux manquements des services de santé au travail, l’engagement de leur responsabilité doit être envisagé. L’employeur doit alors s’être ménagé les preuves attestant de la carence alléguée.
Procédant à l’examen de l’état de santé du salarié, le médecin du travail peut le considérer comme étant apte à la reprise de son activité professionnelle. Il lui délivre alors une attestation de suivi de l’état de santé. L’intéressé retrouve son emploi ou, s’il n’existe plus, un emploi similaire comportant le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l’emploi initial.
Le médecin du travail peut également proposer des mesures d’adaptation permettant de favoriser le maintien du salarié dans son emploi. Il ne s’agit pas d’un avis d’inaptitude, mais de réserves et de préconisations. Ces « mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail » présentent un caractère obligatoire pour l’employeur. En revanche, le médecin du travail ne peut pas imposer à l’employeur de mettre en œuvre des actions de formation professionnelle.
Dans d’autres hypothèses, lorsque le retour du salarié à son poste antérieur est impossible, le médecin du travail peut également déclarer le salarié inapte. Il appartient alors à l’employeur de chercher à le reclasser en fonction des préconisations médicales émises et des possibilités existant au sein de l’entreprise. Si tout reclassement est impossible, le licenciement du salarié pour inaptitude est mis en œuvre (voir ci-contre).
L’état de santé du salarié peut parfois justifier un retour dans l’entreprise à temps partiel. L’initiative de cette réduction temporaire du temps de travail appartient au médecin prescripteur de l’arrêt de travail. Elle permet à l’intéressé de reprendre partiellement son activité, tout en percevant une partie des indemnités journalières, maintenues par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 323-3).
Lorsque la CPAM accepte le temps partiel thérapeutique, le salarié en informe son employeur, qui doit organiser une visite médicale de reprise auprès du médecin du travail. La quotité de travail réalisée est définie par le médecin du travail et le médecin-conseil de la CPAM. S’agissant des autres aspects du temps partiel thérapeutique, notamment du maintien de la rémunération en complément des indemnités journalières de la sécurité sociale, ou du statut du salarié dans l’entreprise, le cadre juridique applicable est vague, préjudiciant parfois au bon fonctionnement de ce dispositif gagnant-gagnant pour tous. En outre, la question n’est pas vraiment tranchée de savoir si l’employeur peut refuser la reprise à temps partiel de son salarié, notamment en raison des difficultés organisationnelles engendrées.
Parfois, le salarié absent pour maladie ne revient pas dans l’entreprise. Cela peut être en raison de son impossibilité au regard de son état de santé, du fait que son absence prolongée cause un trouble dans le bon fonctionnement de l’entreprise, pour un motif totalement étranger à son arrêt maladie ou, enfin, que les deux parties conviennent d’un commun accord du départ du salarié.
Lorsque, à l’issue de l’arrêt de travail, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, une procédure doit impérativement être respectée par l’employeur. Il s’agit de chercher à reclasser le salarié sur des emplois considérés par le médecin du travail comme étant compatibles avec son état de santé et, à défaut, de procéder au licenciement de l’intéressé. La procédure est particulièrement complexe et diffère notamment en fonction de l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude. En outre, elle implique systématiquement les institutions représentatives du personnel, lesquelles doivent être consultées préalablement à la recherche de reclassement. Pour les structures n’ayant pas organisé d’élections professionnelles, alors même qu’elles y étaient tenues, il est alors nécessaire, préalablement à la mise en œuvre de toute procédure, de mettre en place le comité social et économique. Il convient par ailleurs de noter que l’inaptitude est également applicable aux salariés en contrat à durée déterminée et justifie la rupture anticipée de la relation contractuelle.
Si la maladie du salarié et l’absence prolongée qui en découle ne peuvent à elles seules justifier un licenciement, qui serait discriminatoire, les perturbations qu’elles causent dans le fonctionnement de l’entreprise peuvent amener à la rupture du contrat de travail. Il est alors nécessaire que le remplacement définitif de l’intéressé soit requis (Cass. soc., 13 mars 2001, n° 99-140111 et 2 mars 2005, n° 03-42800). C’est ainsi que deux conditions doivent être cumulativement caractérisées pour qu’il puisse être procédé au licenciement :
• des perturbations dans le fonctionnement de l’entreprise du fait de l’absence ;
• et la nécessité de procéder au remplacement définitif, c’est-à-dire l’impossibilité de recourir aux solutions de substitution temporaires (CDD, travail temporaire, heures supplémentaires et complémentaires…).
Ces éléments doivent expressément figurer dans la lettre de licenciement. L’analyse de ce mode de rupture par la jurisprudence est volontairement restrictive, tant le risque de voir la rupture annulée au motif d’une discrimination fondée sur l’état de santé est important. A des fins informatives, la convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 rappelle ces règles et indique que le licenciement ne sera possible « que dans le cas où, sous peine de compromettre le fonctionnement d’un établissement ou d’un service, il apparaîtra indispensable de remplacer effectivement un salarié malade et impossible de recourir, en ce qui le concerne, à un remplacement provisoire » (CCN 51, art. 15.02.1.3.).
En particulier, dans son analyse de ce motif de licenciement, le juge s’assure que la décision de licencier n’est pas précipitée et que les absences sont fréquentes ou durables. S’agissant de la désorganisation de l’entreprise, l’interprétation n’est pas la même en fonction du poste occupé ou de la taille de l’entreprise. En effet, plus la structure est petite et plus le poste occupé par le salarié absent est spécialisé et/ou à responsabilités, plus la possibilité de procéder au licenciement existe. Par ailleurs, concomitamment à la rupture, ou dans un délai proche, le remplaçant du salarié absent doit être recruté avec une quotité horaire équivalente et en contrat à durée indéterminée.
A condition que la cause de la rupture soit indépendante de la maladie, le salarié dont le contrat de travail est suspendu peut être licencié, notamment pour un motif disciplinaire ou pour motif économique. Les faits peuvent être antérieurs à l’arrêt de travail ou survenir pendant la suspension. Là encore, il appartient toutefois à l’employeur de s’assurer que la décision de licencier ne résulte pas, directement ou indirectement, de l’absence du salarié du fait de sa maladie. Par exemple, en cas de licenciement pour motif économique, si l’application des critères de licenciement ne permet pas de déterminer qui de deux salariés doit être licencié, l’absence de l’un ne doit pas amener à privilégier son départ.
En revanche, en cas d’arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, les possibilités de licenciement sont plus restreintes puisque seules la faute grave du salarié ou l’impossibilité de le conserver au service de l’entreprise pour un motif sans rapport avec l’accident ou la maladie peuvent être invoquées (C. trav., art. L. 1226-9).
De même qu’en cas de conflit entre l’employeur et le salarié, la suspension du contrat au titre de la maladie n’empêche pas, par principe, le recours à la rupture conventionnelle. La jurisprudence vérifie simplement que le consentement du salarié n’a pas été vicié. En particulier, il s’agit de s’assurer qu’aucune violence, physique ou morale, n’a été commise à son encontre afin qu’il accepte le principe et les modalités de la rupture. La liberté du consentement vérifiée, les règles de droit commun trouvent ensuite à s’appliquer, notamment s’agissant de la procédure suivie et des sommes versées.
L’intervention conjointe de l’assurance maladie, de l’employeur et de l’organisme assureur en charge de la prévoyance permet, dans la majorité des situations, l’indemnisation du salarié pendant le temps de son absence pour maladie. Corrélativement, il lui est imposé le respect d’un certain nombre d’obligations.
Lors d’un arrêt de travail pour cause d’accident du travail, de trajet ou de maladie professionnelle ou de droit commun, le salarié bénéficie, par principe, d’indemnités journalières versées par la sécurité sociale. Celles-ci ne couvrant pas l’intégralité du salaire, elles sont complétées par l’employeur et/ou par l’organisme assureur en charge de la prévoyance(1). Fréquemment, la convention collective de branche détaille ces modalités d’indemnisation de l’absence en fixant la période d’indemnisation incombant respectivement à l’employeur et à l’organisme assureur. En fonction du texte conventionnel applicable, le salaire maintenu pendant l’arrêt de travail peut d’ailleurs s’entendre brut ou net.
Trois situations doivent alors être distinguées.
A condition de remplir les conditions minimales de durée d’activité préalable ou de salaire, le salarié arrêté du fait d’une maladie ou d’un accident non professionnel peut bénéficier des indemnités journalières de la sécurité sociale.
En complément, à condition d’avoir 1 an d’ancienneté, et de justifier dans les 48 heures de sa situation auprès de son employeur et de sa caisse primaire d’assurance maladie, le salarié peut également bénéficier d’un maintien de salaire (C. trav., art. L. 1226-1). Le code du travail prévoit que ce maintien de salaire est égal à 90 % de la rémunération brute pendant les 30 premiers jours ; puis, pendant les 30 jours suivants, des 2/3 de la rémunération (C. trav., art. D. 1226-1). Cette durée d’indemnisation est par ailleurs augmentée en fonction de l’ancienneté du salarié (C. trav., art. D. 1226-2). En matière de paie, la part du salaire maintenu par l’employeur est considérée comme du salaire et doit être soumis aux cotisations sociales.
Naturellement, la convention collective de branche applicable, voire un usage de l’employeur, peut instaurer un dispositif d’indemnisation plus favorable. C’est ainsi que la convention collective nationale des missions locales et PAIO du 21 février 2001 prévoit un maintien de salaire à la charge de l’employeur dès 6 mois de présence dans la structure (art. 5.9.). Pour les salariés et employeurs relevant de la convention collective nationale des acteurs du lien social et familial du 4 juin 1983 : centres sociaux et socioculturels, associations d’accueil de jeunes enfants, associations de développement social local, l’ancienneté requise est même réduite à 4 mois consécutifs (chap. 10, art. 1). Se concentrant davantage sur la durée du maintien de salaire, la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 instaure, entre le 4e et le 6e mois d’arrêt, le maintien d’un « demi-salaire net » correspondant à l’activité normale du salarié (art. 26).
Lorsqu’un régime de prévoyance est mis en place, celui-ci prévoit habituellement le versement de prestations en relai des obligations de l’employeur, et en complément des sommes versées par l’assurance maladie. Parmi de nombreuses stipulations conventionnelles existant à ce propos, il est possible de relever la convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile du 21 mai 2010 (avenant n° 2 du 12 juillet 2011 relatif aux garanties sociales de prévoyance). Toujours à titre d’illustration, un avenant dédié à la protection sociale des salariés du secteur, et notamment à l’indemnisation de leur incapacité temporaire de travail, a également été conclu au sein de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne du 20 septembre 2012 (avenant n° 1 du 25 avril 2013 relatif à la protection sociale). Chaque convention collective de branche, ou presque, dispose de son régime de prévoyance.
Le salarié victime d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle ou d’un accident de trajet a le droit aux indemnités journalières de la sécurité sociale dès le premier jour qui suit l’arrêt de travail, sans délai de carence (CSS, art. L. 433-1).
Le maintien de salaire à la charge de l’employeur, pour lequel il peut d’ailleurs être assuré, concerne le jour de l’accident, mais aussi le complément des indemnités journalières versées par la sécurité sociale. Ce maintien de salaire est réalisé sans jour de carence. Sauf stipulation conventionnelle plus favorable, le maintien de salaire ne concerne que les salariés justifiant de 1 année d’ancienneté dans l’entreprise.
En relais de cette obligation à la charge de l’employeur, l’organisme assureur en charge de la prévoyance peut également verser des indemnités journalières complémentaires. C’est alors la convention collective de branche qui organise les modalités de l’indemnisation (voir ci-contre).
Dans certains cas, la situation précaire du salarié fait qu’il ne peut prétendre au versement des indemnités journalières de sécurité sociale, faute d’avoir cotisé suffisamment longtemps ou parce que le volume des heures travaillées est insuffisant sur une période donnée. Cette situation est fréquente dans les secteurs où l’emploi à temps partiel est très développé. Aussi, en fonction des conventions collectives, des règles spécifiques ont parfois été prévues pour ces salariés et leurs employeurs.
Corrélativement à son indemnisation pendant sa période d’absence, le salarié doit respecter certaines obligations, parmi lesquelles celle de s’abstenir de toute activité non autorisée, mais aussi de se soumettre aux différents contrôles médicaux.
Le salarié en arrêt de travail doit s’abstenir de toute activité, rémunérée ou non, qui n’est pas expressément autorisée par le médecin traitant (CSS, art. L. 323-6 ; Cass. ch. mixte, 21 mars 2014, n° 2-20002 et 12-20003). La conception retenue en jurisprudence est large, qu’il s’agisse d’activités bénévoles, de ventes sur des marchés avec son conjoint, ou encore d’activités réalisées en tant que travailleur indépendant. Par ailleurs, il importe peu que l’intéressé argue de la compatibilité entre son état de santé et l’exercice de l’activité non autorisée. Seul le médecin traitant est fondé à procéder à cette analyse. En marge de ce dispositif d’autorisation, le salarié en arrêt de travail peut toutefois demander, avec l’accord de son médecin traitant, à suivre des actions de formation compatibles avec son état de santé (CSS, art. L. 323-3-1).
Dans l’hypothèse où l’activité non autorisée donne lieu à rémunération, il s’agit d’une fraude aux prestations sociales, laquelle permet à la caisse primaire d’assurance, non seulement de solliciter le remboursement des indemnités journalières versées, mais aussi d’infliger une pénalité financière à l’intéressé.
En revanche, en droit du travail, le salarié enfreignant ses obligations ne peut pas nécessairement être sanctionné disciplinairement par son employeur (Cass. soc., 27 juin 2000, n° 98-40952). Si l’activité non autorisée cause un préjudice à l’employeur, en particulier si elle est concurrente, l’intéressé s’expose toutefois à un licenciement pour motif disciplinaire (Cass. soc., 12 octobre 2011, n° 10-16649). Sur un plan indemnitaire néanmoins, la suppression du droit aux indemnités journalières dispense, sauf obligation conventionnelle contraire, l’employeur de maintenir le salaire.
Bénéficiaire d’indemnités journalières, mais aussi d’un maintien de salaire, le salarié arrêté du fait de sa maladie est susceptible d’être contrôlé par un médecin, chargé de s’assurer que l’état de santé de l’intéressé justifie toujours le versement des prestations.
S’agissant des indemnités journalières versées par la caisse primaire d’assurance maladie, le service du contrôle médical de l’organisme peut, à tout moment, décider de contrôler l’état de santé de l’intéressé. Ce contrôle, pour lequel une convocation est préalablement adressée, peut être réalisé dans les locaux de la caisse ou au domicile de l’assuré. S’il est constaté que l’état de santé ne justifie plus le versement des prestations octroyées, ou que l’intéressé rend tout contrôle impossible, la caisse peut retenir tout ou partie des indemnités. L’employeur est alors informé de cette suspension des indemnités journalières, laquelle peut entraîner la suspension du maintien de salaire par l’employeur ou du versement des indemnités journalières par l’organisme de prévoyance.
Il peut également arriver que le médecin de la caisse considère que l’assuré social est guéri ou que son état de santé est consolidé. Dans ce dernier cas, l’intéressé est toujours malade, mais le médecin considère que son état est stabilisé : il ne s’aggrave pas, mais ne s’améliore pas davantage. Il n’appartient alors plus aux indemnités journalières de la sécurité sociale de pallier la perte de revenu. L’incapacité étant définitive, et non plus temporaire, l’intéressé est susceptible, si les conditions sont remplies, de bénéficier d’une pension d’invalidité ou d’une rente accident du travail. En pratique, la situation peut être brutale pour le salarié : son état étant considéré comme consolidé, les indemnités journalières, et donc le maintien de salaire, cessent d’être versées ; une visite de reprise auprès du médecin du travail est organisée et, le cas échéant, il peut, quelques semaines plus tard être licencié pour inaptitude. Sur un plan économique, le changement est d’autant plus difficile que l’indemnisation de l’incapacité temporaire, par le jeu des indemnités journalières, du maintien de salaire et de la prévoyance, est généralement bien plus favorable que le régime de l’invalidité.
L’employeur assurant un maintien de salaire, le code du travail l’autorise à organiser un contrôle médical de l’arrêt de travail de son salarié (une « contre-visite patronale »). Ce contrôle est réalisé en toute indépendance par un médecin qui doit, lors de sa visite, justifier de sa qualité et de son mandat. Le salarié n’a pas à être informé préalablement de ce contrôle et a l’obligation de s’y soumettre. A cette fin, il doit, notamment lorsque les sorties sont « libres », indiquer à son employeur le lieu et les horaires auxquels il peut être contrôlé. L’article 53 de la convention relative aux établissements médico-sociaux de l’union intersyndicale des secteurs sanitaires et sociaux précise ainsi qu’à « tout moment, la direction devra être tenue au courant du lieu de résidence du personnel en position d’arrêt de travail, afin qu’elle puisse procéder à tout contrôle médical qu’elle jugera nécessaire ». La convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 rappelle également cette faculté offerte à l’employeur (art. 26). En cas d’absence, l’intéressé devra justifier d’un motif légitime (Cass. soc., 7 octobre 1992, n° 89-40239).
Si le médecin diligenté par l’employeur conclu à la justification de l’arrêt de travail, aucune suite particulière n’est donnée au contrôle. En revanche, s’il conclu à l’absence de justification médicale de l’arrêt de travail, ou se trouve dans l’impossibilité de le réaliser, l’employeur en est informé. Ce dernier est alors fondé à suspendre son maintien de salaire. Le service du contrôle médical de la caisse est quant à lui informé des conclusions du médecin ayant contrôlé l’intéressé. En revanche, cette absence de justification de l’arrêt de travail ne saurait, à elle seule, justifier une quelconque mesure disciplinaire ou licenciement.
(1) Sur la gestion de la complémentaire santé en entreprise, voir ASH n° 3081 du 26-10-18, p. 38.