« LE DIGITAL PEUT ÊTRE BÉNÉFIQUE pour permettre aux personnes qui maîtrisent les outils informatiques de connaître et d’accéder à leurs droits sociaux (par exemple, via le site mesaides.gouv.fr), et de lutter ainsi contre le non-recours. Les démarches en ligne peuvent être également perçues par certains comme moins stigmatisantes que le fait de se rendre aux guichets ou de rencontrer un travailleur social. Au-delà de l’accès aux droits sociaux, la maîtrise du numérique est importante pour l’insertion professionnelle et sociale, l’accès à des offres commerciales plus avantageuses ou encore le maintien des liens sociaux.
S’il est important d’aider les personnes à monter en compétences sur la maîtrise des outils numériques, il est également essentiel de proposer une alternative à la démarche en ligne pour celles qui sont les plus éloignées du numérique, ne serait-ce que pour leur permettre de pouvoir encore remplir des formulaires papier.
Les personnes qui viennent dans nos ateliers d’initiation numérique sont celles que la Croix-Rouge accompagne déjà dans le cadre d’une aide alimentaire, de l’apprentissage de la langue française, et celles que les travailleurs sociaux du département ou les centres communaux d’action sociale orientent vers nous car ils n’ont pas le temps de les aider dans ces démarches.
On constate que l’isolement relationnel est aussi un facteur d’exclusion numérique. Les personnes qui ne peuvent pas être aidées par leur entourage proche se tournent vers les associations, ce qui crée une nouvelle dépendance à l’égard des structures. Enfin, il y a aujourd’hui un manque important de lieux d’accueil et d’accompagnement numérique dans les zones rurales et périurbaines. Les pouvoirs publics ont la volonté de développer les maisons de services au public (MSAP) pour qu’elles deviennent aussi des lieux de médiation numérique. Mais, pour l’heure, les MASP ne couvrent pas tout le territoire national.
Aujourd’hui se pose la question des limites du rôle de nos bénévoles, qui n’ont pas vocation à remplacer les agents des services publics ni les travailleurs sociaux dans l’accompagnement aux démarches administratives. Leur positionnement n’est donc pas facile à trouver. Par ailleurs, les bénévoles ne sont pas soumis au secret professionnel. Afin de cadrer a minima les pratiques d’accompagnement et d’éviter les dérives potentielles, la Croix-Rouge a élaboré une charte « Numérique et libertés », par laquelle les bénévoles s’engagent à respecter la confidentialité des données. »
Diplômée de Sciences Po Grenoble (2009) et de l’EHESS (2010), Soisic Rivoalan travaille depuis 2012 au département de l’action sociale de la Croix-Rouge française. Et, depuis le début 2018, elle est chargée du pilotage du programme national d’inclusion numérique de l’association.