« ÊTRE RESPONSABLE SIGNIFIE RENDRE DES COMPTES, mais déjà être investi de missions. Ainsi l’Etat a-t-il des responsabilités dont il doit rendre compte. Convaincu d’en avoir trop, il veut se concentrer sur ce qu’il appelle ses fonctions régaliennes versus XXIe siècle intégrant une certaine dimension européenne : la sécurité nationale, le maintien de l’ordre, l’économie… Aux collectivités locales l’action sociale, qui doit contribuer à la création d’un tissu social ; aux familles le quotidien de la solidarité. Peu ou prou, cette approche sert désormais de répartition des responsabilités, notamment dans le champ de l’enfance.
Est-ce aussi simple ? L’Etat conserve des compétences propres – les personnes sans domicile fixe, par exemple –, mais il doit supporter sa part sur des dossiers qui sont de compétences conjointes. Or il n’assure pas toujours. Trois illustrations.
Sur le dossier des mineurs étrangers non accompagnés, il a mis vingt ans pour admettre sa cocompétence. Mais concrètement il l’assume a minima. S’agissant de jeunes destinés pour la majorité à être des enfants de France, il doit enfin prendre l’initiative comme chef de file d’une conférence nationale associant ses services à ceux des départements et au réseau associatif.
Il en va de même en ce qui concerne la présence sociale dans l’école (le service social scolaire et la santé scolaire, qui relèvent de l’Etat) ou dans les quartiers (la prévention spécialisée, de compétence territoriale). Or c’est un enjeu majeur qu’au plus tôt, pour des enfants en difficulté, on mobilise les compétences sociales pour faciliter aux parents l’exercice de leurs responsabilités. Un accord Etat-collectivités s’impose pour assurer une présence sociale dans toutes les écoles de France. A quand un plan Marshall sur la “prév” ? Un plan qui serait impulsé par l’Etat pour nouer au plus tôt un contact avec une jeunesse prête à partir en guerre contre la République.
De même avec les familles : à quoi bon entonner l’hymne aux responsabilités parentales si l’Etat ne joue pas son rôle en identifiant par la loi qui est responsable et de quoi, notamment dans les familles recomposées ? Deux millions d’enfants et six millions d’adultes sont concernés.
De même avec les familles : à quoi bon entonner l’hymne aux responsabilités parentales si l’Etat ne joue pas son rôle en identifiant par la loi qui est responsable et de quoi, notamment dans les familles recomposées ? Deux millions d’enfants et six millions d’adultes sont concernés.
En vérité, il est temps que l’enfance redevienne un objet explicite de politique publique où les rôles de la puissance publique (l’Etat et les collectivités, le secteur associatif exerçant une mission de service public) et de la sphère privée (les familles) soient nettement identifiés et les moyens nécessaires dégagés.
Or l’Etat n’assume pas vraiment ses responsabilités. On doit saluer l’effort engagé par l’Education nationale pour faire en sorte que les enfants les plus jeunes soient – justice sociale oblige – tous armés pour affronter la vie et ses exigences, mais on ne doit pas être dupe des limites du plan “pauvreté” ! On prolonge le combat contre la maltraitance à l’égard des enfants, mais on s’avère incapable de voter une loi sur l’éducation sans violence et on s’apprêtait à raboter de 400 000 € le budget du Giped (Groupement d’intérêt public “enfance en danger”).
Mobilisé sur l’économique, l’Etat déserte ses responsabilités sociales et devra rendre des comptes. L’erreur est d’autant plus regrettable que les collectivités locales et le secteur associatif habilité sont mobilisés et demandent simplement à être relayés, soutenus, étayés, cautionnés. »