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Les Ehpad au pied du mur

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La prise en charge, depuis le 15 septembre par l’assurance maladie, des actes de téléconsultation et de télé-expertise donne le véritable coup d’envoi de la télémédecine. Attendue dans les Ehpad, cette nouvelle pratique se heurte encore à des problèmes organisationnels et à une insuffisance de la formation. Enquête.

APRÈS AVOIR TROUVÉ UN ACCORD sur les tarifs de téléconsultation, les médecins se retrouvent devant le fait accompli. Le docteur Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français, se satisfait de l’arrivée officielle de dispositifs de télémédecine et évoque « une véritable innovation ». « Cela prendra du temps : tous les problèmes techniques ne sont pas résolus » tempère-t-il.

« Pour nous, ça va – et ça doit – démarrer avec prudence. Les plateformes commerciales, elles, anticipent depuis un moment ! », soulève le docteur Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France. Il se dit « assez énervé par les publicités » qui ont fleuri dès l’entrée en vigueur de cette nouvelle pratique, notamment de la part d’entreprises « comme Qare ». Jean-Paul Hamon a été sollicité comme ses collègues par ces entreprises proposant leur « aide ». « Il n’y a aucun garde-fou », selon lui, pour contrôler leur arrivée sur le marché : « En associant les plateformes commerciales à la télémédecine, il y a une désorganisation du système de soins. » En plus de se vendre comme support de téléconsultation, certaines plateformes proposent de « faire de la télémédecine elles-mêmes ». Son constat est sans appel : « Entre les sites de prises de rendez-vous en ligne, la publicité des cabinets qui va être autorisée, les plateformes de télémédecine… L’ubérisation de la médecine, on y est ! Je ne suis pas sûr que le patient y gagne. »

Un manque de formation

Dans les Ehpad la mise en place s’accélère. « Nous formons les autres Ehpad à s’inscrire dans la télémédecine, grâce à des kits élaborés avec l’hôpital », explique Jeanne-Chantal Docquier, directrice de la résidence Les Mimosas à Commequiers (Vendée) disposant d’une salle de téléconsultation depuis 2011. Les infirmiers ont peu à peu été formés, par exemple à « l’utilisation de stéthoscopes électroniques ». « Quand on demande aux étudiants ce dont ils manquent en stage, la formation à la télémédecine revient souvent », souligne Ludivine Gauthier, présidente de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers. « L’utilisation de l’outil numérique, des logiciels n’est pas enseignée. » Du côté des aides-soignants, le manque de préparation est encore plus criant. « Nous n’avons pas du tout été sollicités pour la mise en place de la télémédecine », regrette Denis Fischer, vice-président de la Fédération nationale des associations d’aides-soignants. « Or dans les Ehpad, il y a beaucoup d’aides-soignants. Quant aux hôpitaux, y seront-ils formés ? », interroge-t-il, dans l’expectative.

« Je ne suis pas inquiet de la maîtrise technique. Le problème est sur le fond », considère Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers. S’il reconnaît que la téléexpertise « renforce la qualité des soins », il reste critique vis-à-vis de la téléconsultation. « Si le rôle de l’infirmier est d’être à côté du patient pendant qu’il dialogue avec un médecin par écran interposé, cela n’a pas trop de sens, accuse-t-il. Nous sommes là pour accompagner les personnes ; or ce modèle nous pousse à être complices d’une déshumanisation des soins. » Avec le feu vert donné à la télémédecine, c’est la relation du soignant à la personne âgée ou malade qui revient au centre des interrogations.

Repères

La téléconsultation consiste en un échange entre un médecin et un patient. La téléexpertise se fait entre deux professionnels sans la présence du patient. Quant à la télésurveillance médicale, basée sur la transmission à un médecin des données du patient enregistrées à son domicile, celle-ci reste à un stade expérimental.

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