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Visite guidée du premier village Alzheimer

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Depuis 2009, 152 personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer vivent dans le premier village Alzheimer du monde, situé dans la commune de Weesp, à une vingtaine de kilomètres au sud-est d’Amsterdam. En 2016, le docteur Bernard Pradines s’est rendu sur place. Il raconte.

« Je me suis rendu à Weesp le 17 août 2016 dans un cadre strictement privé. Je m’étais pas mal documenté, informé avant de partir, et je ne peux pas dire que j’ai été très surpris par ce que j’ai vu sur place. Ce n’est pas un projet extraordinaire, mais c’est un projet très original.

En effet, il s’agit d’un village qui s’étend sur un 1,4 hectare, dans la ville de Weesp, qui compte environ 16 000 habitants, au sud-est d’Amsterdam, et qui se veut le plus proche des conditions habituelles de vie. En revanche, il n’y a qu’une seule issue vers l’extérieur, évidemment contrôlée pour éviter qu’un patient sorte. Ce n’est donc pas totalement ouvert vers l’extérieur. Mais l’intérieur se veut au plus proche de la vie classique de tout un chacun.

A savoir que, dans les rues, les signalétiques sont les mêmes que n’importe où. De même, l’architecture est très proche de celle de Weesp. A l’intérieur de ce village Alzheimer, on retrouve un certain nombre de facilités : une supérette, une cafétéria, un théâtre, une médiathèque, une salle de musique… Il y a vraiment la volonté de recréer la vie quotidienne.

Chose assez surprenante pour un Français, le village est divisé en sept quartiers selon des classifications bien particulières, des styles de vie différents : chrétien, travailleur, bourgeois, indonésien, urbain, créatif et casanier. Ce sont des orientations dites « culturelles », mais qui ressemblent plus à des orientations en fonction de la classe sociale. La recherche d’authenticité, de continuité avec la vie antérieure est donc poussée à l’extrême, et le tout avec une optique non médicamenteuse. En effet, la réflexion autour de la création de ce village a été de dire : « Nous avons échoué à trouver des médicaments efficaces, cherchons des alternatives. »

A l’intérieur du village, il y a 152 résidents-patients, avec un soignant à temps plein pour un résident et autant de bénévoles. Plus précisément, il y a 23 maisons dans lesquelles vivent six ou sept personnes. Et, dans chaque maison, on retrouve de nouveau cette volonté de reproduire un univers proche de celui dans lequel ont vécu les résidents. Pour schématiser à l’extrême, ceux qui habitaient dans un appartement bourgeois ont un lustre en cristal alors que ceux qui vivaient dans un milieu plus « populaire » ont un environnement plus rustique. A l’intérieur, cela ressemble un peu à une colocation des temps modernes : des chambres individuelles avec la cuisine, la salle à manger et la salle de bains en parties communes.

A titre de comparaison, en France, actuellement, il y a une accumulation de contraintes réglementaires envers les résidents. Dans certains établissements, les résidents n’ont même pas le droit de faire cuire un œuf parce qu’il faut respecter telle ou telle norme d’hygiène alimentaire. A Weesp, en revanche, c’est tout l’inverse. Tout est fait pour ne pas étouffer les résidents sous une multitude de contraintes. L’idée étant qu’il faut rejeter ce modèle hospitalier, ce modèle de soins, et revenir à des choses plus basiques.

Ce village ne ressemble en rien à des unités d’hébergement renforcées, qui sont des lieux protégés pour des personnes ayant des troubles du comportement, des troubles cognitifs. Dans ces établissements, on enferme les personnes, ce qui n’est pas le cas dans ce village Alzheimer. A Weesp, on donne de l’espace. Cela repose sur l’idée de la nostalgie du village à l’ancienne : c’est la nature, la vraie vie, on prend un peu plus le temps pour faire les choses, les relations y sont plus poussées… Ce lieu a été créé en réaction à la médicalisation : il n’y a pas de blouse blanche, le moins de médicaments possible. On s’y sent bien. »

Bernard Pradines

est un gériatre en retraite de l’activité clinique depuis le 1er août 2010. Titulaire de multiples diplômes en gériatrie (capacité de gérontologie, diplôme d’université de psycho­gériatrie), il se consacre désormais à l’enseignement, à la formation et au conseil.

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