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« Il n’y a pas de priorisation d’objectifs »

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Le président de la fédération Santé mentale France partage les objectifs de la feuille de route d’Agnès Buzyn, mais estime qu’il sera insuffisant, faute de définir des priorités et des mesures chiffrées.
Quelle est la situation de la psychiatrie en France ces dernières années ?

La psychiatrie ne va pas bien. Les mouvements de grève de ces derniers mois le prouvent. Cela traduit un trouble, l’impression d’une perte de sens social de ce qu’est le soin psychiatrique et de ce qu’il doit être. A cela s’ajoute une tendance à la confusion, ou en tout cas à la dilution, de l’objet de la psychiatrie. Il y a donc de réelles interrogations sur la pratique de la psychiatrie. De plus, ces dernières années, il y a eu une succession de rapports et de plans qui n’ont donné lieu à aucun chiffrage. Ainsi, en matière de santé mentale, il y a eu le plan de 2005-2008 (qui s’est étendu jusqu’en 2010), puis celui de 2011-2015, dans lesquels il n’y avait aucune priorisation, aucune indication des moyens pour y arriver.

La psychiatrie, par rapport aux autres disciplines, et au sens qu’elle a dans la société, a donc un peu l’impression d’être en perte de repères. Le fait que madame Buzyn ait fortement affiché, au mois de janvier, sa volonté de s’impliquer directement est une bonne nouvelle. Mais ce n’est sans doute pas suffisant.

Que pensez-vous des mesures qui viennent d’être annoncées dans le cadre de sa feuille de route ?

Il faut noter qu’il ne s’agit pas d’un plan avec des objectifs à atteindre, un pilotage, des moyens mis en œuvre, des ressources… C’est une feuille de route dans laquelle il n’y a, encore une fois, pas de priorisation d’objectifs et où l’on nous donne juste une série d’actions à mettre en place. De manière générale, à Santé mentale France, nous partageons les trois axes déclinés dans cette feuille de route. Mais il s’agit d’une liste d’actions qui ne sont pas priorisées entre elles. Pour certaines, il existe des objectifs chiffrés, mais beaucoup d’entre elles n’en ont pas (en matière de formation, de mise à disposition de ressources pour les professionnels…).

Ces mesures s’orientent-elles dans le bon sens ? Vous semblent-elles suffisantes pour résoudre la crise actuelle ?

Je pense que ce n’est pas complètement suffisant car quelques points ne sont pas abordés. Notamment, une chose manque énormément : la réaffirmation que les personnes atteintes de troubles psychiques ont les mêmes droits à la citoyenneté que n’importe quelle autre. Je pense qu’il aurait fallu le réafficher dans cette feuille de route, car c’est fondamental dans la relation que les professionnels de la santé et du médico-social ont avec ces personnes. Il me semble qu’il y a aussi une seconde omission : les familles ne sont jamais évoquées, ce que l’Unafam n’a pas manqué de souligner aussi.

Il y a d’autres mesures à propos desquelles on peut aussi noter quelques insuffisances. Par exemple, concernant les soins aux détenus, le problème des soins ambulatoires n’est pas du tout abordé. Sur la précarité, il n’y a pas non plus grand-chose. C’est évoqué à deux ou trois reprises, alors que l’on sait bien qu’une situation de précarité associée à des troubles psychiques pose problème.

Selon vous, que faudrait-il changer ou réformer en priorité ?

Parmi les points évoqués dans la feuille de route, je pense que les aspects de formation et de garantie de ressources de la psychiatrie sont les plus essentiels. De même, la garantie de développement de soins ambulatoires est importante parce qu’il est vrai que, ces dernières années, on a constaté un repli vers l’hôpital. Là, on va pouvoir continuer, prioritairement, à soigner les gens dans leur milieu de vie. Cela me paraît constituer une priorité, et cela doit être avancé.

En revanche, certaines choses n’ont pas été clarifiées. Depuis les lois de 1970 sur la réforme hospitalière et de 1975 sur le handicap et les institutions sociales et médico-sociales, on a vu se développer un grand nombre de nouvelles structures. Mais, depuis, leurs champs d’intervention n’ont pas été redéfinis alors même qu’il y a un besoin urgent de clarification. Mais je ne m’attendais pas à ce que cela le soit dans cette feuille de route. En effet, une feuille de route, c’est surtout un lancement d’actions. Or cette réflexion-là doit faire l’objet d’échanges entre les professionnels, les administrations, les autorités civiles et sanitaires et les élus.

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