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Entre professionnalisation et précarité

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Le recrutement des 10 900 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), annoncé par le ministre de l’Education nationale et la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, se heurte à des difficultés pratiques et organisationnelles liées au statut de ces personnels. Certaines affectations ne sont pas encore connues et le risque de turn-over toujours présent. Explications.

A l’approche de la rentrée, plusieurs accompagnants des élèves en situation de handicap ne connaissent pas encore leur affectation. Un phénomène fréquent, d’après Elisabeth Garnica, membre du collectif AESH France : « Cela fait des années que cela fonctionne comme ça, certains AESH arrivent en fin d’année sans avoir d’affectation. Il faudrait rencontrer l’enfant en amont pour connaître la pathologie et s’adapter à ses besoins. Et même si l’on reçoit la notification en avance, on a le nom de l’élève mais pas son handicap, qu’on découvre le jour de la rentrée. »

Pour Anne-Charlotte Chéron, chargée de relations publiques et médias à l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei), l’annonce du recrutement de 10 900 accompagnants pour la rentrée, faite le 18 juillet, est à inclure dans l’équation. « Vous connaissez beaucoup d’organismes capables de recruter plus de 10 000 personnes en un mois et qui plus est au mois d’août ? »

De son côté, le secrétariat d’Etat chargé des personnes handicapées justifie ce retard par « les écarts entre les prescriptions de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) d’un territoire et la répartition prévisionnelle des dotations en emploi sur ce territoire », et par les délais et les difficultés de recrutement des accompagnants, qui s’accompagne d’un turn-over important.

Le contrat AESH, stabilisateur d’emploi ?

La transformation des emplois aidés d’auxiliaire de vie scolaire (AVS) en contrats AESH est, pour le gouvernement, le moyen de stabiliser le nombre d’accompagnants tout en les professionnalisant par le biais d’un contrat à durée déterminée de six ans transformable en contrat à durée indéterminée. « Le contrat aidé n’est pas le bon support, certains postes n’étaient pas pourvus », argue Sophie Cluzel. « Les AESH sont des contrats plus robustes, qui permettent de se projeter. » La secrétaire d’Etat reconnaît néanmoins que leur formation de 60 heures, qui n’a pas à être effectuée avant la prise de fonction, « n’est pas satisfaisante. Il existe pourtant une formation initiale diplômante « accompagnant éducatif et social » avec une option « éducation inclusive ». Il permet d’étudier sur tous les temps de vie de l’enfant, pour que l’accompagnant puisse traverser les murs et avoir un second employeur. Il faut trouver une ingénierie qui facilite la vie des salariés et des familles. » Briser la frontière entre médico-social et éducatif pour offrir un complément d’activité – et donc de salaire – aux accompagnants est l’une des idées centrales de la politique d’inclusion à l’école. Mais le diplôme mis en avant ne sera peut-être pas la solution disruptive pour renforcer l’attractivité du métier. « Tous les centres de formation ne proposent pas cette option, et ils incitent plutôt à aller vers d’autres métiers que l’inclusion scolaire », avance Elisabeth Garnica. « Beaucoup de personnes font la formation d’un an puis réalisent qu’ils ne peuvent pas vivre avec le salaire proposé et migrent vers le médico-social ou reviennent à leur expérience professionnelle antérieure. Les AESH déjà en CDI, eux, doivent se former seuls sur Internet, ou utiliser leurs propres deniers. »

La rémunération est d’ailleurs l’épicentre du problème pour Jézabel Sueur, conseillère départementale du Calvados : « C’est un super métier, mais il est dur de dire aux gens qu’ils vont gagner 700 € par mois pour 24 heures par semaine. Cela veut dire travailler ailleurs après, mais il n’est pas possible de s’inscrire à Pôle emploi puisqu’on est sur un temps scolaire. » En conséquence du manque de recrutement, Anne-Charlotte Chéron rappelle que « des milliers d’enfants seront sans solution pour la rentrée scolaire. Comment objectiver un résultat – le nombre d’accompagnants – si celui-ci n’est jamais assorti des besoins en accompagnement ? Aujourd’hui, les listes d’attente sont gonflées, alors que le nombre d’accompagnants augmente. Avec la généralisation du diagnostic, il y a de plus en plus d’enfants repérés. Comment va-t-on faire si le système arrive déjà à saturation ? »

Selon Sophie Cluzel, le problème viendrait de l’inflation des notifications. « Il y a 12 à 13 % d’augmentation des notifications tous les ans alors qu’il y a 7 à 8 % d’augmentation d’enfants handicapés : l’accompagnant devient un moyen de réassurance pour la famille et l’enseignant. On surprotège en pensant que l’AVS est la panacée. Comment connaître les besoins de l’enfant qui n’est pas encore à l’école ? L’accompagnement n’est pas un préalable à la scolarisation. Pour une déficience intellectuelle, une trisomie, une déficience auditive, il n’y a pas toujours besoin d’un AVS : laissons l’enseignant évaluer lui-même ses besoins. »

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