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La domiciliation administrative

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Le dispositif de domiciliation administrative des personnes sans domicile stable a été réformé par la loi « ALUR » du 24 mars 2014 puis par la loi « égalité et citoyenneté » du 27 janvier 2017. Plus récemment, un décret du 2 novembre 2017 et une note d’information du ministère des Solidarités et de la Santé du 8 mars 2018 sont venus préciser cette réforme. Le point sur ce dispositif essentiel à l’accès aux droits sociaux.

La domiciliation administrative est un dispositif central pour garantir l’accès aux droits(1). En effet, l’élection de domicile auprès d’un organisme permet aux personnes ne disposant pas d’un domicile stable de déclarer une adresse lors de leurs différentes démarches administratives et d’y recevoir du courrier, éléments indispensables pour bénéficier de prestations sociales ou encore faire valoir leurs droits civiques et civils.

La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR »(2), a réformé en profondeur le dispositif de la domiciliation administrative(3). Cette réforme avait pour objectif de simplifier le dispositif afin de lutter contre le non-recours aux droits dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale(4). Deux décrets sont venus ensuite assez tardivement préciser le nouveau dispositif(5).

La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté(6) a approfondi cette réforme en intégrant au dispositif de droit commun de la domiciliation les gens du voyage, supprimant ainsi le système de la commune de rattachement et l’obligation de détenir un titre de circulation. Cette réforme entrera pleinement en vigueur le 28 janvier 2019, date jusqu’à laquelle les gens du voyage précédemment rattachés à une commune et qui n’ont pas établi de domicile ou de domiciliation auprès d’un autre organisme sont de droit domiciliés auprès du centre communal ou intercommunal d’action sociale dont ils dépendent (loi n° 2017-86, art. 194). Après cette date, les personnes concernées devront formuler une demande de domiciliation dans les conditions de droit commun.

I. Les organismes de domiciliation

Les demandes de domiciliation administrative peuvent être adressées auprès du centre communal d’action sociale (CCAS) ou du centre intercommunal d’action sociale (CIAS) en fonction de la réalité du territoire ou auprès d’un organisme agréé à cet effet par le préfet de département.

A. Les CCAS et les CIAS

Les centres communaux et intercommunaux d’action sociale sont dans l’obligation de procéder à la domiciliation administrative des personnes qui justifient d’un lien avec la commune ou l’établissement de coopération intercommunale.

A cet effet, chaque commune du département met à disposition du public la liste des organismes agréés dans le département (code de l’action sociale et des familles [CASF], art. L. 264-6).

Pour l’établissement de cette liste, le préfet de département transmet aux maires, aux centres communaux et intercommunaux d’action sociale, aux organismes agréés et aux organismes payeurs la liste des organismes agréés dans le département en précisant leurs coordonnées, les types de publics accueillis et les horaires d’ouverture au public (CASF, art. D. 264-15).

B. Les organismes agréés

Le préfet de département peut délivrer un agrément à des organismes pour qu’ils soient en mesure de procéder à des domiciliations administratives (CASF, art. L. 264-6).

1. Les organismes concernés

Certains organismes peuvent demander à être agréés aux fins de recevoir les déclarations d’élection de domicile. Tel est le cas (CASF, art. D. 264-9) :

→ des organismes à but non lucratif qui mènent des actions contre l’exclusion ou pour l’accès aux soins ;

→ des établissements et services sociaux et médico-sociaux assurant l’accueil, notamment dans les situations d’urgence, le soutien ou l’accompagnement social, l’adaptation à la vie active ou l’insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse mentionné ;

→ des organismes d’aide aux personnes âgées, notamment les centres locaux d’information et de coordination et les services d’aide à domicile ;

→ des centres d’hébergement d’urgence soumis à déclaration ;

→ des établissements de santé et des services sociaux départementaux.

Lorsque ces organismes sont gérés par une association, ils doivent justifier, à la date de la demande d’agrément, d’au moins 1 an d’activité dans les domaines suivants : lutte contre l’exclusion, accès aux soins, hébergement et accueil d’urgence, action sociale ou médico-sociale à destination des personnes âgées ou handicapées (CASF, art. D. 264-9).

Les personnes hébergées de manière stable au sein d’un organisme qui aurait pu relever de la procédure d’agrément et qui peuvent y recevoir leur courrier sont réputées y être domiciliées même si l’organisme concerné n’a pas formellement obtenu d’agrément (CASF, art. D. 264-9).

2. La procédure d’agrément

A La demande d’agrément

La demande d’agrément doit être effectuée auprès du préfet de département et doit comporter (CASF, art. D. 264-10) :

→ la raison sociale de l’organisme ;

→ l’adresse de l’organisme demandeur ;

→ la nature des activités exercées depuis au moins 1 an et les publics concernés ;

→ les statuts de l’organisme ;

→ les éléments permettant d’apprécier l’aptitude de l’organisme à assurer effectivement sa mission de domiciliation ;

→ l’indication du cadre géographique pour lequel l’agrément est sollicité ;

→ un projet de règlement intérieur décrivant l’organisation de sa mission de domiciliation et précisant les procédures retenues pour la gestion du courrier.

Par ailleurs, le préfet de département peut mentionner dans le cahier des charges d’autres éléments constitutifs de la demande d’agrément (CASF, art. D. 264-10).

B Le cahier des charges

Afin d’être agréé, l’organisme demandeur doit s’engager à respecter le cahier des charges établi par le préfet de département après avis du président du conseil départemental (CASF, art. L. 264-7). Un modèle de cahier des charges est notamment proposé par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) dans son guide de la domiciliation(1).

Ce cahier des charges détermine notamment les obligations d’information, d’évaluation et de contrôle auxquelles est tenu l’organisme, en particulier à l’égard de l’Etat, du département et des organismes chargés du versement des prestations sociales. Ainsi, l’organisme domiciliateur devra (CASF, art. D. 264-5) :

→ adresser chaque année au préfet de département un bilan de son activité de domiciliation ;

→ délivrer des attestations d’élection de domicile conformes au modèle défini ;

→ procéder au retrait de l’attestation lorsqu’ils ont connaissance du fait que la personne dispose d’un domicile stable ;

→ adresser au plus tard 3 mois avant l’expiration de l’agrément une demande de renouvellement.

C La décision d’agrément, de renouvellement ou de retrait

Lorsque l’organisme répond aux critères d’attribution, le préfet de département délivre l’agrément. Ce dernier a une durée maximale de 5 ans, contre 3 ans précédemment (CASF, art. D. 264-11).

L’agrément peut être retiré, après que l’organisme a été mis en mesure de présenter ses observations, lorsqu’il ne respecte pas le cahier des charges, lorsqu’il cesse de remplir les conditions pour être agréé, ou à sa demande (CASF, art. D. 264-12).

Le préfet de département ayant procédé au retrait d’un agrément en raison du non-respect du cahier des charges doit alors en informer les préfets des autres départements de la région et désigner les organismes chargés d’assurer la domiciliation des personnes qui avaient élu domicile dans l’organisme auquel il a retiré l’agrément (CASF, art. D. 264-12).

Les décisions d’agrément et de retrait d’agrément doivent être publiées au recueil des actes administratifs de la préfecture (CASF, art. D. 264-13).

Le renouvellement de l’agrément n’est pas tacite. Ainsi, les organismes agréés doivent présenter une demande de renouvellement au plus tard 3 mois avant son expiration. Pour ce faire, l’organisme doit présenter un bilan de son activité pour la période considérée, au regard des engagements pris dans le cahier des charges, ainsi que les perspectives envisagées pour l’exercice de la même activité (CASF, art. L. 264-7). Si, à cette occasion, le préfet constate un écart inexpliqué entre l’activité exercée durant la période de validité de l’agrément et le cahier des charges ainsi que les services proposés, le renouvellement d’agrément peut être refusé.

D Le contenu de l’agrément

L’agrément indique la durée pour laquelle il est délivré (au maximum 5 ans). Il peut déterminer un nombre d’élections de domicile au-delà duquel l’organisme n’est plus tenu d’accepter de nouvelles élections. Il peut également l’autoriser à restreindre son activité de domiciliation à certaines catégories de personnes ou à certaines prestations. Dans ce dernier cas, l’attestation d’élection de domicile ne pourra pas être présentée pour d’autres démarches que l’accès aux prestations sociales visées par l’agrément (CASF, art. L. 264-7).

C. Les obligations des organismes domiciliataires

Les organismes domiciliataires doivent s’assurer que la personne qui élit domicile est bien sans domicile stable. Ils doivent également rendre compte régulièrement de leur activité de domiciliation auprès du préfet de département (CASF, art. L. 264-8).

A cet effet, les organismes agréés et centres communaux et intercommunaux d’action sociale transmettent chaque année au préfet de département un bilan de leur activité de domiciliation(2) comportant notamment (CASF, art. D. 264-8) :

→ le nombre d’élections de domicile en cours de validité et le nombre de personnes domiciliées au 31 décembre de l’année écoulée ;

→ le nombre d’élections de domicile délivrées dans l’année ainsi que le nombre de radiations et de refus avec leurs principaux motifs ;

→ les moyens matériels et humains dont dispose l’organisme pour assurer son activité de domiciliation ;

→ pour les seuls organismes agréés, les conditions de mise en œuvre du cahier des charges ;

→ les jours et horaires d’ouverture.

II. La procédure de domiciliation administrative

La procédure de domiciliation administrative est aujourd’hui uniformisée quels que soient le statut du bénéficiaire et les démarches en vue desquelles la domiciliation est nécessaire, à l’exception des demandeurs d’asile qui continuent à relever d’un régime spécifique.

A. Les bénéficiaires

La procédure de domiciliation administrative est uniformisée, toute personne sans domicile stable peut y accéder. Cependant, des conditions de nationalité ou de régularité du séjour peuvent être opposées au demandeur.

1. Les personnes sans domicile stable

Peuvent bénéficier du dispositif de domiciliation les personnes sans domicile stable, c’est-à-dire celles qui ne disposent pas d’une adresse leur permettant d’y recevoir et d’y consulter leur courrier de façon constante et confidentielle(1). La DGCS donne ainsi l’exemple de personnes dont l’habitat permanent est une résidence mobile, celles hébergées de façon stable par des tiers ou encore les personnes sans abri vivant à la rue.

A l’inverse, les personnes hébergées dans des établissements de type centre d’hébergement et de réinsertion sociale, centre maternel, foyer de jeunes travailleurs ou encore foyer de travailleurs migrants et qui peuvent y recevoir leur courrier n’ont pas vocation à recourir à la procédure de domiciliation administrative, indique la DGCS.

Par ailleurs, le bénéficiaire d’une attestation d’élection de domicile peut y faire figurer ses ayants droit (CASF, art. D. 264-1), à savoir :

→ son conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité (PACS) ;

→ les enfants mineurs à sa charge ;

→ les autres personnes sous sa charge effective et permanente.

Pour ce faire, le lien avec la commune doit être effectif pour chacun des ayants droit figurant sur l’attestation de domiciliation.

2. Les conditions de nationalité ou de régularité du séjour

Afin de bénéficier d’une attestation d’élection de domicile, le demandeur doit séjourner en France de façon stable et régulière. Il doit ainsi être (CASF, art. L. 264-2) :

→ soit de nationalité française ;

→ soit ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne ;

→ soit ressortissant d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;

→ soit ressortissant de la Confédération suisse ;

→ soit détenteur d’un titre de séjour en cours de validité.

Cependant, ces conditions de nationalité et de régularité du séjour ne sont pas applicables quand une personne nécessite une domiciliation administrative pour solliciter l’aide médicale de l’Etat ou pour l’exercice des droits civils (mariage, divorce, tutelle) (CASF, art. L. 264-2).

De même, les ressortissants étrangers en situation irrégulière peuvent formuler une demande de domiciliation administrative pour le bénéfice de l’aide juridictionnelle lorsque(2) :

→ leur situation apparaît particulièrement digne d’intérêt au regard de l’objet du litige ou des charges prévisibles du procès ;

→ ils sont mineurs, témoins assistés, mis en examen, prévenus, accusés, condamnés ou parties civiles ;

→ ils bénéficient d’une ordonnance de protection ;

→ ils font l’objet de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ;

→ ils font l’objet de l’une des procédures prévues au code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

B. La procédure de demande

Les CCAS ou CIAS ainsi que les organismes agréés sont tenus de recevoir et d’instruire les demandes de domiciliation administrative dans les conditions fixées par les textes.

1. L’organisme compétent

La demande de domiciliation administrative doit être déposée auprès d’un CCAS ou d’un CIAS ou d’un organisme agréé. Pour les communes de moins de 1 500 habitants n’ayant ni CCAS ni CIAS, l’élection de domicile est faite directement par la mairie.

Le CCAS ou CIAS compétent est celui de la commune ou du groupement de communes avec lequel le demandeur a un lien. Pour déterminer ce lien, il faut examiner le lieu de séjour du demandeur à la date de demande d’élection de domicile, indépendamment du statut ou du mode de résidence (CASF, art. R. 264-4).

Le lieu de séjour regroupe des réalités multiples. En effet, il s’agit aussi bien d’un logement fixe occupé de façon plus ou moins précaire et avec ou sans titre, que du fait de vivre sans logement dans la rue ou dans un espace public sur le territoire communal. Cela recouvre également le cas du logement ou de la résidence mobile sur le territoire communal. En outre, le caractère licite ou illicite de l’occupation ne doit pas être pris en compte par les organismes domiciliataires pour déterminer le lien du demandeur avec la commune(1).

Par ailleurs, aucune durée minimale de présence sur la commune ou le groupement de communes ne peut être imposée, dès lors que la personne justifie de son lien avec la commune au moment de la demande d’élection de domicile(2).

Si le lieu de séjour du demandeur n’est pas situé sur le territoire de la commune, il peut toutefois avoir un lien avec la commune ou le groupement de communes, lorsqu’il (CASF, art. R. 264-4) :

→ y exerce une activité professionnelle ;

→ y bénéficie d’une action d’insertion ou d’un suivi social, médico-social ou professionnel ou a entrepris des démarches à cet effet ;

→ présente des liens familiaux avec une personne vivant dans la commune ;

→ exerce l’autorité parentale sur un enfant mineur qui y est scolarisé.

2. Le dépôt de la demande

La demande de domiciliation doit être faite via le formulaire Cerfa n° 15548*02(3). Ce dernier précise notamment l’identité du demandeur et de ses ayants droit, la date du dépôt de la demande ainsi que le nom et l’adresse de l’organisme auprès duquel la demande a été effectuée (CASF, art. D. 264-1).

L’organisme qui reçoit un formulaire de demande d’élection de domicile doit en accuser réception et y répondre dans un délai de 2 mois. Le silence gardé à l’issu de ce délai vaut refus(4).

3. L’entretien préalable

Toute demande d’élection de domicile ou de renouvellement doit être suivie d’un entretien avec l’intéressé. Il reçoit alors une information sur ses droits et obligations en matière de domiciliation, y compris le cas échéant ceux fixés par le règlement intérieur de l’organisme. Il est invité à faire connaître à l’organisme s’il est déjà en possession d’une attestation d’élection de domicile (CASF, art. D. 264-2).

La direction générale de la cohésion sociale a publié un guide de l’entretien préalable dans le cadre de la demande de domiciliation(1). Elle y rappelle notamment que cet entretien est également l’occasion de faire un point sur la situation du demandeur et de l’orienter dans ses démarches, voire d’engager un accompagnement social.

C. La décision

En cas d’accord, l’élection de domicile est valable 1 an (CASF, art. D. 264-1). L’organisme agréé, le CCAS ou le CIAS, remet alors aux intéressés une attestation d’élection de domicile (modèle Cerfa n° 15547*02) qui mentionne notamment le nom et l’adresse de l’organisme agréé ou du centre communal ou intercommunal d’action sociale, la date de l’élection de domicile et sa durée de validité (CASF, art. L. 264-2 et D. 264-1).

Les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale ne peuvent refuser l’élection de domicile des personnes sans domicile stable que si elles ne présentent aucun lien avec la commune ou le groupement de communes. Dans ce cas, ils doivent motiver leur décision (CASF, art. L. 264-4). Quant aux organismes agréés, ils ne peuvent refuser l’élection de domicile que dans les cas prévus par leur agrément (CASF, art. L. 264-4).

Lorsqu’un organisme agréé, un CCAS ou un CIAS refuse une élection de domicile, il doit orienter l’intéressé vers un organisme en mesure d’assurer sa domiciliation (CASF, art. L. 264-4). Ainsi, le formulaire Cerfa de demande d’attestation d’élection de domicile prévoit dans le cadre « décision » une partie à remplir en cas de refus indiquant les motifs du refus et l’orientation proposée.

D. Le retrait de l’élection de domicile

L’organisme qui assure la domiciliation y met fin lorsque l’intéressé le demande, lorsqu’il acquiert un domicile stable ou lorsqu’il ne se manifeste plus (CASF, art. L. 264-5). Ainsi, on peut considérer qu’il ne se manifeste plus lorsque l’intéressé ne s’est pas présenté ou, à défaut, n’a pas contacté l’organisme domiciliataire pendant plus de 3 mois consécutifs, sauf si cela est justifié par des raisons de santé ou de privation de liberté. Pour pouvoir mettre en œuvre cette mesure, l’organisme tient à jour un enregistrement des contacts avec l’intéressé (CASF, art. D. 264-3).

E. Le renouvellement

L’élection de domicile est renouvelable de droit (CASF, art. L. 264-2).

Il est conseillé aux organismes domiciliataires d’inciter les bénéficiaires d’une attestation d’élection de domicile à formuler leur demande de renouvellement dans les 2 mois précédant la fin de validité de l’attestation afin d’éviter toute rupture de droits(2).

III. Les effets de la domiciliation

La domiciliation administrative des personnes sans domicile stable est obligatoire pour leur ouvrir l’accès à plusieurs droits (CASF, art. L. 264-1), tels que les prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles, l’exercice des droits civils qui leur sont reconnus par la loi, la délivrance d’un titre national d’identité, l’inscription sur les listes électorales, le bénéfice de l’aide juridictionnelle.

A. L’accès aux droits sociaux

C’est le lieu dans lequel le demandeur a élu domicile qui permettra de déterminer quel est l’organisme territorialement compétent pour attribuer une prestation sociale et le département qui sera débiteur de l’allocation personnalisée d’autonomie, de la prestation de compensation du handicap et du revenu de solidarité active (CASF, art. L. 264-1).

L’absence d’une adresse stable ne peut être opposée à une personne pour lui refuser l’exercice d’un droit, d’une prestation sociale ou l’accès à un service essentiel garanti par la loi, notamment en matière bancaire et postale, dès lors qu’elle dispose d’une attestation d’élection de domicile (CASF, art. L. 264-3). Ainsi, une attestation d’élection de domicile permet donc à son titulaire ou à ses ayants droit(3) :

→ d’avoir accès à l’ensemble des droits et prestations sociales sous réserve de remplir les conditions d’attribution propres à chacune de ces prestations ;

→ d’avoir accès à la scolarisation ;

→ d’accéder aux démarches professionnelles, notamment dans le cadre des dispositifs d’insertion sociale ;

→ d’entamer des démarches fiscales ;

→ d’effectuer des démarches en vue d’une admission ou d’un renouvellement d’admission au séjour ;

→ d’avoir accès à un compte bancaire ou de souscrire une assurance légalement obligatoire.

Le Conseil national de lutte contre l’exclusion (CNLE) note que les discriminations liées aux lieux d’habitat peuvent être un obstacle à l’accès aux droits sociaux. Pour optimiser le dispositif, il demande que soit réalisée une évaluation du contenu des schémas départementaux de la domiciliation, en s’inspirant des plus satisfaisants, et des moyens mis en œuvre, département par département, par les services déconcentrés de l’Etat pour les animer et mieux informer le public. Il souhaite également que l’Etat rappelle à ses opérateurs, aux organismes de protection sociale, aux bureaux des étrangers des préfectures et aux banques, le respect du droit à la domiciliation. Cela exige notamment que chaque préfet s’assure que son bureau des étrangers respecte rigoureusement la réglementation. Les organismes domiciliataires doivent également être accompagnés dans l’accomplissement de leur mission via la mise en place d’outils mais aussi par des moyens financiers supplémentaires, indique le CNLE.

Par ailleurs, les organismes payeurs des prestations sociales peuvent s’assurer auprès de l’organisme indiqué par l’attestation qu’une personne est bien domiciliée chez lui. L’organisme est tenu de lui communiquer cette information dans le mois qui suit la demande (CASF, art. D. 264-7).

B. Le lieu d’exercice des droits civils et civiques

Le lieu d’exercice des droits civils d’une personne sans domicile stable est celui où elle a élu domicile (CASF, art. L. 264-3 ; code civil, art. 102). Les droits civils concernent notamment l’ensemble des prérogatives attachées à la personne qui nécessitent la déclaration d’une adresse, à savoir(1) :

→ les droits extrapatrimoniaux liés à l’état de la personne (mariage, décès, adoption, tutelle…) ;

→ les opérations sur la gestion du patrimoine (actes d’administration et de disposition, ouverture de compte bancaire…) ;

→ la capacité d’ester en justice ou à répondre d’un préjudice devant les tribunaux.

L’attestation d’élection de domicile permet ainsi à son titulaire et à ses ayants droit d’avoir accès aux démarches d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour, d’obtention d’un titre d’identité(2). A ce sujet, le défenseur des droits a alerté, dans une décision de 2017(3), sur les refus de nombreuses préfectures d’instruire les demandes d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour de personnes sans domicile stable ne pouvant fournir, comme justificatif de domicile exigé par les textes, qu’une attestation d’élection de domicile par un centre communal d’action sociale ou un organisme agréé. Le défenseur des droits a rappelé que « de tels refus sont contraires à la loi, à la Constitution ainsi qu’à plusieurs textes internationaux ratifiés par la France et constituent une discrimination ».

Par ailleurs, les personnes sans domicile stable sont, à leur demande, inscrites sur la liste électorale de la commune où est situé l’organisme auprès duquel elles ont élu domicile si elles peuvent justifier de leur lien avec cette commune depuis au moins 6 mois (code électoral., art. L. 15-1).

C. La réception de la correspondance

L’organisme domiciliataire est tenu de recevoir la correspondance destinée aux personnes domiciliées et de la mettre à leur disposition (CASF, art. D. 264-6).

Ce qu’il faut retenir

Objectifs. La domiciliation administrative des personnes sans domicile stable est obligatoire pour leur ouvrir l’accès à plusieurs droits. Elle leur permet notamment de disposer d’une adresse stable où elles peuvent recevoir du courrier, élément indispensable pour bénéficier de prestations sociales ou encore faire valoir leurs droits civils et civiques.

Organismes domiciliataires. Les centres communaux et intercommunaux d’action sociale (CCAS et CIAS) sont dans l’obligation de délivrer une attestation d’élection de domicile aux personnes sans domicile stable qui justifient d’un lien avec leur collectivité territoriale de rattachement. Par ailleurs, les demandes d’élection de domicile peuvent être adressées auprès d’un organisme agréé à cet effet par le préfet de département.

Bénéficiaires. L’accès au dispositif de domiciliation administrative est en principe soumis à des conditions de nationalité et de régularité du séjour. Néanmoins, les personnes étrangères en situation irrégulière peuvent disposer d’une attestation d’élection de domicile pour l’accès à certains droits.

Attribution d’une attestation d’élection de domicile. La demande et l’attestation d’élection de domicile sont uniformisées par arrêté sous forme de formulaires Cerfa. L’attestation ne peut être refusée que dans des cas restreints. Elle est accordée pour 1 an, peut être renouvelée et bénéficie également aux ayants droit du demandeur.

Les schémas départementaux de la domiciliation

Le préfet de département en tant qu’animateur et garant du dispositif de domiciliation élabore un schéma départemental de la domiciliation sous la coordination du préfet de région. Ce schéma est une annexe du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées et s’inscrit dans le cadre du dispositif de veille sociale et d’hébergement d’urgence.

Le schéma départemental de la domiciliation doit répondre à trois enjeux (CASF, art. D. 264-14 et instruction n° DGCS/SD1B/2016/188 du 10 juin 2016 relative à la domiciliation des personnes sans domicile stable) :

• assurer une couverture territoriale cohérente et une adéquation entre les besoins et l’offre ;

• s’assurer de la qualité du service de domiciliation rendu aux usagers ;

• permettre de mettre en œuvre une méthode harmonisée entre les départements sous la coordination des préfets de région pour mieux analyser l’offre et les besoins.

Textes applicables

• Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, J.O. du 26-03-14.

• Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, J.O. du 28-01-17.

• Code de l’action sociale et des familles, art. L. 264-1 à L. 264-10, D. 264-1 à D. 264-15 et R. 264-4.

• Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, art. L. 744-1 et art. R. 744-1 à R. 744-4.

• Arrêté du 3 novembre 2017, NOR : SSAA1731141A, J.O. du 16-12-17.

• Note d’information n° DGCS/SD1B/2018/56 du 5 mars 2018.

• Instruction n° DGCS/SD1B/2016/188 du 10 juin 2016.

La domiciliation dans le cadre de la demande d’asile

La domiciliation des demandeurs d’asile relève d’un régime spécifique (CASF, art. L. 264-10). Le demandeur d’asile qui ne dispose ni d’un hébergement ni d’un domicile stable bénéficie du droit d’élire domicile auprès d’une personne morale conventionnée à cet effet pour chaque département (code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile [Ceseda], art. L. 744-1).

De plus, quand un demandeur d’asile est hébergé dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile ou toute structure déclarée bénéficiant de financements du ministère chargé de l’asile autres que les établissements hôteliers, ces lieux d’hébergement valent élection de domicile pour les demandeurs d’asile qui y sont hébergés (Ceseda, art. R. 744-1). Ils sont ainsi tenus de recevoir la correspondance destinée aux personnes domiciliées et de la mettre à leur disposition (Ceseda, art. R. 744-4).

Les organismes conventionnés ou hébergeant de manière stable des demandeurs d’asile remettent aux intéressés une déclaration de domiciliation, d’une durée de 1 an (renouvelable), dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de l’asile. Cette déclaration est délivrée aux personnes en possession d’une attestation de demande d’asile. Elle précise le nom et l’adresse de la personne morale, la date de la déclaration, et, le cas échéant, l’énumération des droits ouverts pour lesquels cette déclaration peut être utilisée. La déclaration de domiciliation vaut également justificatif de domicile pour l’ouverture d’un compte bancaire. A noter que l’absence d’une adresse effective ne peut être opposée à un demandeur d’asile pour lui refuser l’exercice d’un droit ou l’accès à un service essentiel garanti par la loi, notamment en matière bancaire et postale, dès lors qu’il dispose d’une déclaration de domiciliation en cours de validité (Ceseda, art. R. 744-2).

Par ailleurs, les organismes conventionnés procèdent à la domiciliation des demandeurs d’asile qui sont orientés vers eux par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Ils ne peuvent refuser l’élection de domicile que dans les cas prévus par leur convention. L’organisme qui assure la domiciliation y met fin lorsque l’intéressé le demande, lorsqu’il acquiert un domicile stable ou lorsqu’il ne se manifeste plus pendant plus de 1 mois pour retirer son courrier, sauf si cette absence est justifiée (Ceseda, art. R. 744-3).

L’organisme indiqué par la déclaration de domiciliation est tenu de communiquer pour l’exercice de leur mission, aux organismes de sécurité sociale, tous éléments utiles permettant de vérifier qu’une personne est bien domiciliée auprès de lui.

En sus, les organismes conventionnés doivent transmettre chaque année à l’OFII ainsi qu’au préfet de département un bilan de leur activité indiquant (Ceseda, art. R. 744-3) :

• le nombre de demandeurs d’asile suivis à la fin de l’année ;

• le nombre de demandeurs d’asile reçus dans l’année et le nombre de demandeurs dont la domiciliation a pris fin en cours d’année ;

• les moyens matériels et humains dont dispose la personne morale pour assurer son activité de domiciliation ;

• les conditions de mise en œuvre du cahier des charges.

Notes

(1) Voir ASH n° 2888 du 19-12-14, p. 30.

(2) Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, J.O. du 26-03-14.

(3) Voir ASH n° 2861 du 23-05-14, p. 41.

(4) Exposé des motifs de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

(5) Voir ASH n° 2962 du 27-05-16, p. 46.

(6) Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, J.O. du 28-01-17.

(1) Annexe 2 du guide de la domiciliation des personnes sans domicile stable de la DGCS, note d’information n° DGCS/SD1B/2018/56 du 5 mars 2018.

(2) Un modèle de rapport d’activité est proposé en annexe 3 du guide de la domiciliation des personnes sans domicile stable de la DGCS, note d’information n° DGCS/SD1B/2018/56 du 5 mars 2018.

(1) Guide de la domiciliation des personnes sans domicile stable de la DGCS, note d’information n° DGCS/SD1B/2018/56 du 5 mars 2018.

(2) Article 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.

(1) Guide de la domiciliation, DGCS, avril 2018.

(2) Guide de la domiciliation, DGCS, avril 2018.

(3) Arrêté du 3 novembre 2017, NOR : SSAA1731141A, J.O. du 16-12-17.

(4) Annexe du décret n° 2015-1461 du 10 novembre 2015.

(1) Disponible sur http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/guide_de_l_entretien_prealable_domiciliation.pdf.

(2) Guide de la domiciliation des personnes sans domicile stable, DGCS, mars 2018.

(3) Instruction n° DGCS/SD1B/2016/188 du 10 juin 2016 relative à la domiciliation des personnes sans domicile stable.

(1) Guide de la domiciliation, DGCS, avril 2018.

(2) Guide de la domiciliation, DGCS, avril 2018.

(3) Décision du défenseur des droits n° 2017-305 du 28 novembre 2017.

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