Alors que la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, promettait, le 30 mai dernier, lors de la présentation de sa feuille de route sur le « grand âge », un plan spécifique pour « aider les aidants » en 2019, l’article 53 de la loi pour « un Etat au service d’une société de confiance », adoptée le 10 août dernier, semble être une première piste de réflexion.
Cette expérimentation est définie comme visant des « prestations à domicile de suppléance du proche aidant d’une personne nécessitant une surveillance permanente ».
Venu du Québec, ce concept est appelé « baluchonnage », parce qu’un professionnel s’installe pendant plusieurs jours au domicile du malade – il pose son « baluchon », selon l’expression imagée de nos cousins de la Belle province – et s’en occupe nuit et jour.
Une présence qui permet un répit de plusieurs jours aux proches aidants, mais qui pose des problèmes vis-à-vis du droit du travail.
Le texte législatif assouplit le code du travail afin de mettre en place un service à domicile 24 heures sur 24 pendant six jours consécutifs. A titre expérimental, pour une durée de trois ans, les salariés volontaires des établissements et services « ne sont soumis ni aux articles L. 3121-13 à L. 3121-15, L. 3121-16 à L. 3121-26, L. 3122-6, L. 3122-7, L. 3122-17, L. 3122-18, L. 3122-24 et L. 3131-1 à L. 3131-3 du code du travail, ni aux stipulations relatives aux régimes d’équivalence, aux temps de pause, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail de nuit et à la durée minimale de repos quotidien prévues par les conventions et accords collectifs applicables aux établissements et services qui les emploient ».
Cet article 53 de la loi est ainsi anglé principalement sur les dérogations liées au droit du travail, une difficulté qui avait notamment entraîné des blocages et in fine le retrait de cette expérimentation dans la loi relative à « l’adaptation de la société au vieillissement » de 2015. Cela explique notamment la prudence des organisations du secteur de l’aide à domicile vis-à-vis de cet article de loi. Maude Collomb, directrice adjointe de l’Union nationale ADMR, évoque un texte législatif en demi-teinte : « Cet article témoigne d’une volonté de trouver des solutions pour les proches aidants, c’est positif, mais nous devons prendre position, en tant que syndicat d’employeurs, sur les dérogations qui sont ouvertes sur le droit du travail. » Et de préciser : « De plus, il y a encore des points à clarifier, notamment sur la formation des salariés ou encore le financement de ces prestations et le reste à charge pour les familles. » Du côté de l’ADMR, on s’interroge sur ces dérogations au droit du travail tant sur le repos quotidien, le travail de nuit ou encore la durée maximale de travail alors que le secteur présente un taux d’accident du travail trois fois supérieur à la moyenne nationale, avec 96,4 accidents de travail pour 1 000 salariés en 2016, selon la Caisse nationale d’assurance maladie. Vincent Vincentelli, responsable « réglementation d’activité » de l’Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles (UNA), argumente : « Le problème dans cet article est que l’on ne prévoit que des aménagements en droit du travail, on ne prévoit pas de mode de financement, de formation du personnel ou encore de surveillance de leur santé et conditions de travail. » Des interrogations qui trouveront certainement des réponses dans les décrets d’application de cet article 53. Un travail préalable à la mise en place effective de cette expérimentation et sur lequel les organisations du secteur, telles que l’ADMR et l’UNA, jugent légitime et intéressant d’être associées afin de permettre son succès pour aider les aidants.