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« La démocratie en santé doit devenir réelle »

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A l’occasion de la publication de l’ouvrage collectif « La démocratie en santé en question(s) »(1), Karine Lefeuvre, directrice adjointe du département des sciences humaines et sociales et professeure à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP), explique que la démocratie sanitaire doit passer du stade de la réalité formelle à une effectivité concrète.
La démocratie en santé, est-ce une utopie ou une réalité ?

La question de l’expression des usagers prend de plus en plus de place dans les politiques publiques de santé. Il faut redonner la parole aux usagers au-delà d’une simple démocratie d’instances. Les termes de « démocratie sanitaire », qui ont servi de référence aux pouvoirs publics depuis plus de quinze ans, laissent place désormais à une acception plus large et transversale de « démocratie en santé ». Cela a complètement son sens puisque la démocratie en santé correspond à la philosophie des agences régionales de santé et à la notion de « parcours de l’usager » au-delà de tout cloisonnement entre le sanitaire, le social et le médico-social. La démocratie en santé implique aujourd’hui de dépasser le strict respect formel de la réglementation pour devenir réelle et effective.

En 2016, dans le cadre des travaux menés par l’Institut pour la démocratie en santé, qui n’a pas été reconduit par Agnès Buzyn, l’EHESP a animé un atelier de travail consacré à la place et à l’expérience de la démocratie en santé dans le champ du social et du médico-social. Il est apparu que la recherche de l’effectivité de la participation des citoyens en santé dans le champ social et médico-social nécessite un renversement de perspectives, un changement de paradigme. La personne accompagnée doit construire son parcours avec les professionnels et non l’inverse. Le fait d’accepter, d’assumer et de piloter la prise de risque inhérente à l’accompagnement a été mis en avant par tous les participants à l’atelier (personnes concernées, proches aidants, professionnels, institutions). Les usagers demandent qu’on leur fasse confiance lorsqu’ils expriment des choix et qu’ils puissent les formuler à leur manière.

Vous considérez que le secteur social et médico-social est une « source d’inspiration pour la démocratie en santé » . Quels sont ses atouts ?

Historiquement, la culture du secteur social et médico-social est marquée par une sensibilité plus « naturelle » à l’expression des usagers. L’accompagnement des personnes accueillies dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux s’inscrit davantage dans la durée que dans le secteur sanitaire. Par ailleurs, l’accueil dépasse le strict cadre du soin et est pensé autour du projet de vie. Pour reprendre une formule de Denis Piveteau, lors du discours au forum de lancement de l’Institut pour la démocratie en santé, en février 2016, le secteur médico-social est « une source inépuisable de progrès pour la démocratie sanitaire ».

Quelles solutions pour les usagers « sans voix » ou « invisibles », selon votre expression, dans les secteurs social et médico-social ?

La question de la démocratie en santé se pose aujourd’hui avec plus d’acuité pour les plus fragiles, ceux qui ont du mal à s’exprimer. Par exemple, à la suite du rapport de la Cour des comptes et du défenseur des droits, il y a dans le secteur de la protection des majeurs, l’émergence d’une prise en compte des souhaits et des préférences, du droit à la participation des majeurs protégés. Parmi l’ensemble des droits reconnus aux usagers, le droit d’expression apparaît comme l’un des plus déterminants. Comme le disait le Mahatma Gandhi, « la première arme de la dignité, c’est la parole ».

La sensibilisation des professionnels du secteur à la démocratie en santé passe également par la formation. Qu’en est-il à l’EHESP ?

Depuis trois ans, toutes les filières de l’EHESP ont un module de formation portant sur la démocratie en santé. L’école a même recruté un professeur dédié à ces questions, Fatima Yatim-Daumas, maître de conférences en démocratie en santé (Institut du management, EHESP), ce qui est très significatif. De plus en plus de mémoires sont consacrés à la démocratie en santé, de même que se développe la recherche avec des thèses pour détecter des sujets précurseurs.

Notes

(1) Sous la direction de Karine Lefeuvre, Roland Ollivier. Avec la collaboration de Olivia Gross – Editions EHESP, mars 2018.

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